Au sommaire :
- Les acquis de l’espace
- Institut Kourtchatov entre la bombe nucléaire et le soleil artificiel
- La chasse aux astéroïdes lancée par la NASA renferme beaucoup d’impondérables
Les acquis de l’espace
Téléviseurs à plasma, matelas orthopédiques, prévisions météo détaillées, sous-vêtements thermiques, propergol, réfrigérateurs no frost – voici la liste fort incomplète des acquis de l’espace dont nous profitons au quotidien à la suite de plusieurs décennies de son exploration.
C’est le 4 octobre 1957, année du lancement du premier satellite artificiel de la Terre, qui est considéré comme le début de l’ère des « spoutniks ». Cette date marque aussi le passage de l’humanité aux télécommunications si bien que nous profitons maintenant de la TV satellitaire, d’internet et de téléphonie mobile. Les signaux transmis depuis l’espace permettent aux scientifiques d’étudier en détail ce qui se passe sur notre planète. C’est ainsi qu’on peut désormais observer la répartition des masses d’air. Nous avons pu évaluer pleinement les avantages de la nouvelle technologie il y a deux ans, au moment d’éruption du volcan Eyjafjallajökull en Islande, - rappelle Lev Zeliony, directeur de l’Institut d’exploration de l’espace :
« Le nuage a pris alors la direction de l’Europe, les vols d’avions étaient suspendus et personne ne savait où était la zone la plus menacée par les cendres volcaniques. Les mesures faites par satellite ont permis d’évaluer la taille de ce nuage, d’en déterminer la direction et localiser les zones dangereuses pour le trafic aérien ».
Tous les navires et avions sont actuellement équipés de GPS si bien qu’en cas d’accident l’équipage peut donner le signal SOS qui sera retransmis par satellite vers les centres de contrôle. Ce système de navigation par satellite équipe également les véhicules de transport terrestres. Mieux encore, ses possibilités s’élargissent d’année en année, - raconte Alexandre Gourko, président du Partenariat à but non lucratif GLONASS :
« Le système GLONASS/GPS s’emploie surtout dans certains domaines spécifiques. Il permet de mieux organiser les travaux de construction et contrôler le respect des engagements contractuels en ce qui concerne les déplacements des véhicules et les travaux réalisés. Il trouve également ses applications dans les levés géodésiques, les mesures cadastrales et l’agriculture où il renseigne sur la possibilité du fonctionnement du matériel agricole pratiquement en régime automatique pour la récolte autonome y compris pendant la nuit. Bref, lesapplicationsnemanquentpas ».
Les technologies spatiales viennent également à point nommé dans la médecine, - rappelle Lev Zeliony :
« Il est naturellement difficile à l’homme de passer plus d’un an dans l’espace pratiquement en état d’immobilité. Ce séjour doit être assisté médicalement, c’est pourquoi on met au point des simulateurs, médicaments et costumes spéciaux. Or, il se trouve qu’ils conviennent aussi aux personnes à mobilité limitée et aux troubles de circulation sanguine ».
L’élaboration des technologies spatiales est un processus dynamique. C’est ainsi que les experts du cluster des technologies spatiales du pôle de compétitivité de Skolkovo sont en train d’étudier la commande de Roskosmos pour la conception des machines intelligentes destinées à assister les astronautes, - raconte son directeur exécutif Sergueï Joukov :
« Les applications spatiales des robots ne se comptent plus, depuis les petits dispositifs capables de tenir un tournevis et éclairer le champ de travail quand l’astronaute se livre à des travaux à l’intérieur de la station jusqu’aux robots sophistiqués qui peuvent aller en orbite pour réparer un satellite défectueux. Ils pourraient aussi opérer sur la Lune ».
Il est difficile de prédire actuellement si les robots spatiaux trouveront des applications sur terre. D’ailleurs, qui pouvait imaginer dans le temps que la technologie de traitement de l’eau aux ions d’argent conçue spécialement pour l’ISS serait si populaire sur terre et que les filtres à ions d’argent auraient leur place pratiquement dans chaque maison.
Institut Kourtchatov entre la bombe nucléaire et le soleil artificiel
La première bombe thermonucléaire au monde, la première centrale nucléaire industrielle et les premiers réacteurs pour sous-marins sont autant d’acquis parmi beaucoup d’autres du Centre national de recherche « Institut Kourtchatov » qui vient de souffler ses 70 bougies.
Fondé pendant la Seconde guerre mondiale, l’Institut Kourtchatov a pu en fait sauver le monde d’une guerre nucléaire autrement terrible. Mais le travail de ses chercheurs ne se limitait pas aux seules questions militaires, - fait valoir son directeur de recherche Andreï Gagarinski :
« Ces 70 ans sont saturés d’événements. Nous avons d’abord conçu des armes nucléaires en nous occupant parallèlement de centrales nucléaires et du problème de l’énergie thermonucléaire. La solution des problèmes de l’énergie peut être mise à l’actif de l’Institut mais nous avons également beaucoup travaillé dans le domaine de la physique nucléaire fondamentale ».
C’est le génie scientifique et le talent d’organisateur manifesté par l’académicien Igor Kourtchatov qui ont été déterminants dans l’affirmation et le développement de l’Institut, - a fait ressortir Gagarinski:
« IgorKourtchatov étaitunhommeunique. Notre pays a vraiment eu la chance qu’il ait été choisi pour ce poste. C’était un remarquable scientifique et un brillant organisateur qui a su réaliser un projet si ambitieux dans un pays ruiné par la guerre. Il a fondé dans les conditions extrêmement difficiles un secteur foncièrement nouveau qui a permis de forger le bouclier nucléaire. Kourctatov créait une nouvelle science, celle du nucléaire ».
Les succès dans le nucléaire sont depuis longtemps la carte de visite de l’Institut Kourtchatov. Comme l’a fait remarquer le directeur du département de physique nucléaire et d’astrophysique de l’Institut de physique Oleg Dalkarov, l’Institut est aujourd’hui à la pointe des recherches dans le domaine de l’énergie :
« Il s’agit de la construction de réacteurs et du thermonucléaire. Le rôle de l’Institut Kourtchatov a été déterminant dans ces domaines. Si le premier réacteur a été construit à Obninsk, il a été conçu à l’institut Kourtchatov. Pour revenir à l’énergie thermonucléaire, ces recherches sont associées aux noms des scientifiques dont quelques-uns, comme l’académicien Velikhov, travaillent toujours à l’Institut. Le Centre Kourtchatov pend actuellement la part la plus active à la création du réacteur ITER. Le réacteur se construit en France mais c’est un projet international qui regroupe plusieurs pays. La conception du futur réacteur doit en même temps beaucoup aux chercheurs de notre Institut ».
Le réacteur thermonucléaire ITER actuellement en chantier en France est souvent appelé « le prototype du soleil artificiel » mais ce n’est pas l’unique projet d’envergure de l’Institut Kourtchatov qui avait également prêté la main à la création du Grand collisionneur de hadrons du CERN en Suisse. Étant un grand acteur dans la science mondiale, l’Institut Kourtchatov participe pratiquement à tous les grands projets de niveau international dans le domaine de la physique.
La chasse aux astéroïdes lancée par la NASA renferme beaucoup d’impondérables
La NASA a proposé à Roskosmos de réaliser ensemble un projet intéressant. Selon Vladimir Popovkin qui dirige l’agence spatiale russe, il s’agit « d’amener un petit astéroïde sur l’orbite lunaire pour l’étudier en détail ». Cela signifie qu’on y enverra une expédition pilotée ou qu’on l’étudiera à l’aide de sondes automatiques ».
L’interview accordée par Vladimir Popovkine à Rossiïskaïa Gazeta dans laquelle il avait évoqué le danger associé aux astéroïdes, a coïncidé avec la publication aux États-Unis d’un nouveau programme de la NASA. On n’en sait pas grand’chose pour le moment mais il paraît que vers 2019 les Américains ont l’intention de capturer à l’aide d’un vaisseau robot un astéroïde de 500 tonnes et le placer en orbite circumlunaire pour y envoyer deux ans plus tard des astronautes à bord du vaisseau Orion qui sera fin prêt vers ce temps-là. L’équipage débarquera sur le corps céleste et prélèvera des échantillons de son matériau. La mission coûtera globalement 2,6 milliards de dollars. A la première étape qui correspond à l’exercice de 2014, il est prévu de demander 100 millions de dollars pour sélectionner l’astéroïde optimal.
Mais c’est là que se pose la question sur le rôle de la Russie. Il est trop tôt d’en parler puisque le projet lui-même est sujet à caution, - estime le rédacteur en chef de la revue Les nouvelles de l’astronautique Igor Marinine :
« Ce n’est le moment de parler du degré de notre participation du moment que le projet concret fait encore défaut et que ni la NASA, ni le Département d’État n’ont signé aucun accord concernant la réalisation de ce programme. A mon avis, les milliards de dollars nécessaires seront introuvables aux États-Unis. Il s’agit des sondages destinés à être fixé sur la possibilité d’une telle expérience. Cela va s’arrêter là puisque le projet est trop coûteux ».
La Russie a de bons spécialistes et de bonnes capacités de production. Reste à savoir si les Américains voudront passer des commandes à l’industrie spatiale russe au moment où la leur est plutôt dans une mauvaise passe, - s’interroge le membre correspondant de l’Académie russe d’astronautique Iouri Karasch :
« Les Américains ont pour principe que le participant d’un projet international paie pour soi. Même en supposant que la Russie est invitée à prendre part au projet, elle devra financer elle-même sa participation. Or, je ne vois pas très bien quel est son intérêt dans tout cela.
Nous saurons plus sur la nouvelle mission dans les semaines qui viennent et notamment sur la participation de la Russie, l’aspect du vaisseau robot et la façon de faire bouger l’astéroïde. Si le projet est réalisé un jour, il permettra manifestement de mettre au point la technique de capture et de transport d’astéroïde puisqu’il faudra de toute façon le faire tôt ou tard ».