Plus de 50% des Russes souhaitent que Vladimir Poutine ne soit pas réélu. Ce n'est pas un signe de mécontentement mais un signe de fatigue face à un pouvoir inchangé depuis plus de dix ans, écrit le quotidien Vedomosti du 11 avril.
Seulement 22% de la population voudrait que Vladimir Poutine soit réélu président en 2018, d'après les sondages menés du 22 au 25 mars 2013 par le centre Levada (1 601 personnes interrogées dans 130 villes et 45 régions avec une marge d'erreur inférieure à 3,4%). Il y a un an, après la première élection présidentielle, 17% des personnes sondées voulaient que Vladimir Poutine dirige le pays jusqu'en 2024.
Plus de la moitié de la population (55%) souhaiterait voir quelqu'un d'autre au poste présidentiel, et 8% voudraient que ce soit Dmitri Medvedev.
"La demande d'un nouveau visage augmente, explique Alexeï Grajdankine, directeur adjoint du centre Levada. Il ne doit pas forcément être d'un autre camp politique, communiste ou libéral : il suffit qu'il soit nouveau. En effet, la majorité de la population approuve toujours l'activité de Poutine mais la fatigue s'accumule, elle est déjà présente", poursuit le sociologue. Et il reste encore cinq ans avant la fin du mandat de Vladimir Poutine. Parmi ceux qui ont voté pour lui il y a un an, seulement 36% voudraient qu'il reste six années de plus : "Même son noyau électoral ne soutient pas l'idée d'un Poutine irremplaçable, d'un Poutine pour toujours", remarque Alexeï Grajdankine. Par ailleurs, le niveau d'approbation des activités de Vladimir Poutine reste élevé. Même s'il diminue depuis plusieurs mois, la "réserve d'appréciation positive" est encore très grande.
En mars 2013, pour la première fois, les Russes n'étaient plus majoritaires à penser que la concentration de presque tout le pouvoir entre les mains de Vladimir Poutine était un bienfait pour la Russie – ils n'étaient plus que 49% contre 53% il y a un an. Cette tendance a commencé en 2007. Un Russe sur trois pense que cette concentration du pouvoir ne promet rien de bon au pays : c'est le plus grand pourcentage enregistré depuis mars 2004. Cet état de fait n'est pas dû à un événement particulier survenu ces derniers mois à en juger par les sondages, estime Alexeï Grajdankine. Mais la population se lasse peu à peu des méthodes de Poutine, pense le sociologue. Dans les pays démocratiques cette fatigue se dissipe après une nouvelle élection, qui amène au pouvoir une force politique alternative. Mais ce n'est pas le cas en Russie et la fatigue s'accumule, déclare le sociologue.
En parlant de leur attitude envers Poutine, de plus en plus de Russes emploient des caractéristiques modérées : "Je ne peux rien dire de mal" (30%), "neutre" ou "indifférent" (22%). Les émotions vives disparaissent et deviennent de plus en plus pragmatiques, explique Alexeï Grajdankine.
La manière dont sont posées les questions ne permet pas d'interpréter clairement les résultats, estime Alexandre Pojalov de l'Institut de recherches socioéconomiques et politiques. Selon lui, le fait que 47% des personnes interrogées ne souhaitent pas voir Poutine président dans six ans montre un appel général au renouvellement du gouvernement, tandis qu'un tiers de la population est prête à discuter son caractère inamovible. La demande sociale en nouveaux visages n'a rien de surprenant, estime le politologue Igor Bounine. Selon lui, le véritable électorat de Poutine représente 25% de la population. Les autres le soutiennent pas inertie et en l'absence d'alternative, craignant le chaos. "Les erreurs et les absurdités de l'équipe de Poutine affectent également la popularité du président", pense-t-il.