Vous êtes sur la Voix de la Russie ! La Fédération russe des Échecs et la Chambre de commerce et d’industrie franco-russe (CCIFR) ont tenu il y a quelques jours une conférence de presse à Moscou, consacrée au tournoi international d’échecs, organisé en hommage au grand joueur russe Alexandre Alekhine au Musée du Louvre à Paris et au Musée Russe à Saint-Pétersbourg en avril 2013. Notre correspondant Igor Yazon, qui était parmi les journalistes à cette conférence de presse, reviendra encore sur la personnalité d’Alekhine, qui a joué pour l’Empire russe, l’URSS et la France, et à présent quelques mots sur le tournoi…
Les échecs de quoi relèvent-t-ils plus, du sport ou de l’art ? Le match pour le titre de champion du monde des échecs FIDE, tenu en mai 2012 à la Galerie Trétiakov à Moscou, a probablement enfin réconcilié des millions des amateurs des échecs sur le sujet. Le tournoi à la mémoire d’Alekhine, dont les premières parties seront jouées au Musée du Louvre le 21 avril va perpétuer la nouvelle tendance à organiser des tournois d’ d’échecs dans les musées. Voici ce qu’a raconté, en ouvrant la conférence de presse, Ilya Levitov, président du conseil de surveillance de la Fédération russe des Échecs.
« Cet événement me semble unique avant tout parce qu’il dépasse les échecs, - dit-il. – En somme, les compétitions d’échecs dans le monde sont assez uniformes et n’ont d’autre vocation que de désigner le plus fort joueur du monde ou la meilleure sélection. Là nous avons une conception différente. Elle a été formulée l’an dernier par Andreï Filatov et Guennadi Timtchenko,à savoir : dépasser le monde des échecs et essayer de les marier à l’art ».
Soit dit en passant, les noms de ces deux gros entrepreneurs russes sont connus pour de bonnes œuvres dans la sphère humanitaire et des actions philanthropiques dans le domaine de la culture. Guennadi Timtchenko est président, et son collègue Andreï Filatov est membre du Conseil économique de la CCIFR. C’est par leurs soins qu’on a signé en février un accord avec le directeur du Musée du Louvre Henri Loyrette en vue de compléter les fonds de ce musée de Paris par une collection de la peinture russe afin de propager l’art russe à l’étranger. En signant cet accord, Henri Loyrette avait déclaré que « l’absence d’art russe au Louvre était absolument choquante ». Avec non moindre enthousiasme il a accueilli l’idée d’organiser au Louvre le tournoi international d’échecs en hommage d’Alexandre Alekhine. Voici ce qu’a dit à ce propos le directeur général de la CCIFR Pavel Chinski.
« Il était question d’un format qui associerait les échecs et l’art en France, - dit Pavel Chinski. – Et le directeur du Musée du Louvre a réagi de la façon suivante ; nous avons bien, a-t-il dit, toute une série d’objets d’art très importants liés aux échecs. Tel que, par exemple, l’échiquier du Saint Louis IX, péri vers la fin de la croisade en Tunisie. Il y a un grand nombre de tableaux, y compris de peintres hollandais avec leurs natures mortes du 17e et du début du 18e siècle, figurant des pièces et l’échiquier. Et la premier projet que nous avons discuté avec lui, - poursuit Pavel Chinski, - ne concernait même pas le tournoi, mais l’élaboration d’un programme pédagogique pour des écoliers et des étudiants, qui étudient les arts et les échecs. Et c’est ensuite qu’il a été question de rappeler le succès en France de l’Année croisée avec la Russie en 2010 en organisant le tournoi d’échecs Alekhine. Il est Russe, mais on peut l’appeler à juste titre aussi Français. On s’est entendu de tenir ce tournoi en deux étapes – au Louvre et au Musée Russe à Saint-Pétersbourg. Au Musée du Louvre il n’y a pas de local convenant au tournoi, et il a été décidé de bâtir en territoire du jardin des Tuileries, reliant le Louvre à la place de la Concorde, une construction provisoire pour la période de la partie parisienne du tournoi du 21 au 25 avril. Ensuite ses participants se rendront à Saint-Pétersbourg, où se dérouleront au Musée Russe les quatre derniers manches du tournoi, qui prendra fin le 1er mai. Vu qu’on aime les échecs en France autant qu’en Russie, nous espérons, dit Pavel Chinski, - que le tournoi en hommage à Alekhine sera l’un des événements de nouvelles Saisons russes à Paris. Dès à présent on peut assurément parler de l’énorme intérêt de la Fédération Française des Echecs et en général du public porté à prochain tournoi Alekhine… ».
Alexandre Alekine, premier champion du monde russe d’échecs, voit le jour à Moscou en octobre 1982 dans la famille du député de la Douma d’Etat, homme très instruit et très riche. C’est sa mère qui apprend à jouer aux échecs à Alexandre lorsqu’il a 7 ans. Dès ses dix ans il commence à participer aux tournois par correspondance. A 14 ans il remporte sa première grande victoire à un tournoi par correspondance, organisé par la revue « Aperçu des échecs » en 1906. A partir de cette année Alexandre commence à participer régulièrement à des tournois en Russie et à l’étranger engageant des professionnels, et en quelques années il fait partie de l’élite des joueurs d’échecs du monde. En été 1914 il prend part au tournoi à Mannheim allemande et est en position de se qualifier pour être le premier. Or le 1er août l’Allemagne déclare la guerre à la Russie, et le tournoi est interrompu à six manches de la fin. Alekhine est proclamé gagnant et obtient son premier prix doté de 1100 marks allemands. Il ne revient en Russie qu’en octobre par la France, la Grande-Bretagne et la Suède. Dans ces pays il joue des parties en public et des matchs simultanés contre plusieurs adversaires. Après la révolution de 1917 les rapports entre Alekhine et le nouveau pouvoir ne s’établissent pas. Mais il continue de jouer, et en 1920 devient premier champion de Russie Soviétique des échecs. Dans encore un an il émigre en France, en obtenant en 1925 la nationalité française. En automne de 1927 à Buenos Aires Alekhine remporte le match pour le titre de champion du monde contre le grand Cubain José Capablanca et garde ce titre jusqu’à 1935, lorsqu’il perd face au Néerlandais Max Euwe. Mais deux ans après il prend la revanche et redevient champion du monde, le titre qu’il garde jusqu’à sa mort le 23 mars 1946 à Estoril portugaise. Dans l’histoire des échecs mondiaux Alexandre Alekhine est l’unique champion du monde à avoir reconquis son titre et à l’avoir gardé à vie. Le 25 mars 1956 une cérémonie d’inhumation de sa dépouille transportée a lieu au cimetière parisien de Montparnasse en présence du président de FIDE et d’une importante délégation de l’Union Soviétique. L’inscription sur la pierre tombale porte : « Au génie des échecs de Russie et de France ».
C’est à la mémoire de ce génie que se tiendra en avril le tournoi international des échecs au Musée du Louvre à Paris et au Musée Russe à Saint-Pétersbourg. Comme Ilya Lévitov l’a dit à la conférence de presse à Moscou, les grands maîtres internationaux d’échecs suivants ont confirmé leur participation au tournoi Alekhine : le champion du monde indien d’échecs Viswanathan Anand et des participants du tournoi des prétendants 2013 – le 14e champion du monde, 2e au classement mondial, Vladimir Kramnik ; l’un des meilleurs joueurs du monde, vainqueur de prestigieux tournois internationaux, numéro trois du classement mondial l’Arménien Levon Aronian ; le sextuple champion de Russie, détenteur de la Coupe du monde Petr Svidler ; le prétendant au titre de champion du monde (2012) Boris Gelfand ; le multiple champion de France, double champion d’Europe de blitz (2010, 2012) Maxime Vachier-Lagrave ; le grand joueur d’échecs du Royaume-Uni, participant régulier du tournoi des prétendants, Michael Adams ; le deuxième joueur de la sélection française, grand maître international depuis 2000, Laurent Fressinet ; le champion du monde au sein de l’équipe nationale de Russie Nikita Vitiougov et le champion en titre de Chine Ding Liren. A Paris et à Saint-Pétersbourg l’entrée sera gratuite, a informé Ilya Levitov. Le tournoi pourrait être suivi en ligne et en vidéo avec des commentaires en russe, français et anglais.
