Ces conclusions optimistes ont été faites à l’issue des résultats des travaux du spectromètre alpha-magnétique de la Station spatiale internationale (ISS). Le dispositif est arrivé sur la station en 2011 et a été fixé à l'extérieure. Il a la taille d'un bus et pèse 7 tonnes. Son rôle est de capturer et analyser les particules qui proviennent des profondeurs de l'espace.
La matière est « noire », parce qu’elle ne se manifeste en aucun état, sauf la gravitation. On peut conclure qu’elle existe uniquement grâce à des preuves indirectes : les concentrations de cette matière dévient légèrement les rayons de lumière qui viennent à travers eux depuis des galaxies lointaines. C’est pourquoi l’astronome voit une image déjà déformée de ces galaxies. Les particules de matière sombre rempliraient ainsi l'univers et pénètrent librement dans n'importe quel objet: le globe, les personnes, les étoiles. Comment un dispositif installé sur l’ISS peut alors définir ses propriétés ?
Selon les physiciens, les particules s'accumulent progressivement à l’intérieur des étoiles. S’ils sont trop nombreux, dans les conditions des températures extrêmes, elles réagissent les uns avec les autres. Ensuite une micro-explosion et une fission ont lieu. Ainsi naissent un électron et positron – des antiparticules de l'électron. Les positrons sont très intéressants, le spectromètre a pu les repérer, explique le directeur de l'Institut de physique spatiale, l’académicien Nikolaï Kardachev.
« Les résultats ont montré la présence d'un grand nombre de positrons. Cela peut indiquer qu'il existe un certain type de matière noire. D'autre part, il existe des sources de positrons et les explosions de supernovae à la suite desquelles se créent les étoiles à neutrons et les pulsars. Ils peuvent également donner des positrons ».
Pour ne pas confondre les positrons qui naissent avec les particules qui viennent des étoiles à neutrons et les pulsars, il faut définir d’où provient la source. Le spectromètre alpha-magnétique ne peut pas le réaliser, car il possède un angle trop large de capture de particules, explique le chef du Département d'astrophysique théorique au Centre aérocosmique de l’Institut de physique Vladimir Loukach.
« On peut fabriquer des détecteurs, construits sur un principe différent, qui définissent la direction. Tourner le détecteur et voir d’où arrivent les particules. Et puis comprendre de quelle source ils proviennent. Si cette source se trouve au centre de la galaxie, l’hypothèse de la matière noire pourra obtenir une confirmation supplémentaire. Si ce n’est pas le cas, c’est bien les pulsars qui en sont l’origine et non pas la matière noire ».
Une base de données obtenue de l’ISS sera étudiée par les physiciens pendant plusieurs mois. Si l’on distribue les particules capturées par la quantité d'énergie, certaines caractéristiques du spectre peuvent indiquer s’il s’agit de la matière noire. Certes, il existe plusieurs hypothèses sur ce qu’est la matière noire. Certaines supposent qu’elle ne donne pas de positrons sous certaines formes. Les discussions autour des résultats du spectromètre ne se calmeront pas pendant longtemps.
En attendant, les chercheurs attendront de nouvelles données de cet instrument de mesure qui est le plus cher du monde. Son développement a coûté 2 milliards de dollars. Ce projet a réuni 56 groupes de recherche issus de 16 pays, dont la Russie. Le spectromètre alpha-magnétique va travailler à bord de la station jusqu'en 2020. Les concepteurs ne doutent pas que les découvertes les plus frappantes sont encore à venir. /L