La visite de Vladimir Poutine en Allemagne a été précédée d’une interview accordée à la chaîne allemande ARD, publiée sur le site présidentiel. Le président russe a annoncé que le montant de l'aide au profit des "agents étrangers" s’élevait à un milliard de dollars, a écrit lundi le quotidien Nezavissimaïa gazeta.
Vladimir Poutine a expliqué la loi adoptée en Russie concernant les organisations non gouvernementales financées depuis l'étranger et menant une activité politique intérieure, qui les oblige à s'enregistrer en tant qu'agents étrangers. Le président a souligné qu'une loi identique était en vigueur aux Etats-Unis depuis 1938 et qu’il n’était pas question d'interdire ces organisations: "Nous voulons simplement savoir qui reçoit cet argent et comment il est dépensé". Poutine a expliqué au journaliste que 654 ONG étaient financées par l'Occident en Russie et qu’elles avaient obtenu des subventions à hauteur d’un milliard de dollars ces quatre derniers mois.
Selon Poutine, le financement des ONG depuis l'étranger alimente l'opposition, ce qui est inadmissible. C'est parfaitement logique: il est pour la concurrence, sans que "cette opposition soit financée depuis l'étranger".
Les militants des droits de l'homme réfutent les chiffres annoncés par le président.
Boris Nemtsov, coprésident du Parti républicain de Russie – le Parti de la liberté populaire (RPR-PARNAS) — a proposé que les ONG publient leurs comptes afin de montrer qu'elles n'ont pas accès à autant d'argent. Il est soutenu par Lioudmila Alexeeva, chef du Groupe Helsinki de Moscou: "Nous n'avons aucun secret. De toute façon, on fournit constamment des bilans".
Lev Ponomarev, chef du mouvement Pour les droits de l'homme, a déclaré que le financement de son organisation s'élevait à 450 000 dollars par an: "Les chiffres de Poutine sont exagérés et ce sont leurs auteurs qui en sont responsables. Les fondations quittent la Russie et ces derniers mois, je continuais a recevoir des fonds d'une seule organisation, qui transfère sur notre compte 70 000 dollars par an. Il suffit de diviser ce chiffre par 12…".
Nikolaï Petrov, membre du conseil scientifique du centre Carnegie de Moscou, ne croit pas non plus à ce chiffre d’un milliard de dollars: "Je pense que Vladimir Poutine a mélangé toutes les ONG, y compris des départements et des représentations de la Banque mondiale par exemple. Cela lui a permis d'arriver à un chiffre qui pourrait impressionner l'auditeur". L'expert souligne que Poutine n'a pas le choix – il doit faire des déclarations fortes: "Qui plus est, il doit prouver son aptitude à faire monter les mises et durcir sa position s'il rencontre une résistance".
Les fondations allemandes n’ont pas été contrôlées par hasard: "Le signal envoyé par Poutine doit être clair pour l'Occident. En s’intéressant aux organisations allemandes, le président russe met en évidence le droit du Kremlin à faire tout ce qu'il veut au sein du pays – y compris contrôler les ONG quelles qu'elles soient". Par ailleurs, l'expert souligne la fragilité de l'idée de base de Poutine: "Il a l’impression que s'il ne paie pas pour les protestations, alors quelqu'un d'autre le fera. Son idée est donc d'éviter à tout prix une situation dans laquelle les organisations autonomes bénéficient d'un financement autonome… Ensuite, il la met en œuvre avec une fermeté ostentatoire, en envoyant de bons signaux aux élites politiques russes, à la population et à l'Occident".