Le 12 février dernier, les FEMEN se sont exhibées seins nus dans Notre-Dame de Paris pour fêter à leur manière la démission du pape Benoît XVI. Leur action a été condamné par la porte-parole de l'exécutif et ministre des Droits des femmes, Najat Vallaud-Belkacem, par le maire de Paris Bertrand Delanoë (c’est dire) et même par le ministre de l’intérieur Manuel Valls qui a fait part de sa consternation, condamnant une provocation inutile et témoignant de son soutien aux catholiques de France qui ont pu être offensés par ce geste grossier.
Les FEMEN, qui quelques mois après le lancement de leurs activités, cumulent déjà les plaintes et les mains courantes, se heurtent logiquement à quelque chose qui n’existe il est vrai peut être pas encore en Ukraine: un relatif Etat de droit et le fait qu’une société plus ou moins libre n’implique pas que l’on puisse y faire n’importe quoi mais au contraire que la liberté des uns s’arrête làou commence celle des autres. On pouvait se demander quelle allait être leur dernière provocation alors que la dernière manifestation contre le mariage pour tous à Paris a été exempte de leurs insanités et de leur violence morale.
... La guerre contre l’Islam?
Crédit photo: Fred Dufour - AFP
Mercredi 03 avril, trois membres du mouvement féministe ont brûlé un drapeau dit « salafiste » (en fait un drapeau noir barré de la profession de foi des musulmans) devant la Grande Mosquée de Paris, en exhibant sur leur torse dénudé l’inscription: « Les femmes arabes contre les islamistes », « Liberté pour les femmes », « Merde à vos morales ». Les FEMEN entendaient dénoncer l’Islam intégriste et les menaces qu’auraient reçues une de leurs militantes Tunisiennes après avoir publié sur Internet des clichés d'elle la poitrine nue barrée des mots « mon corps m'appartient, il ne représente l'honneur de personne » ou encore « Fuck your morals ». Celle-ci avait alors disparu, faisant craindre le pire, avant de réapparaître il y a quelques jours en expliquant qu’elle vivait recluse au sein de sa famille pour des raisons de sécurité.
Jeudi 04 avril les FEMEN ont donc organisé une action coup de poing dans différentes villes d’Europe. A Berlin, six militantes ont manifesté la poitrine nue devant le plus ancien lieu de culte musulman de la capitale allemande, la mosquée Ahmadiyya, scandant en cœur « Freedom for women » ou encore « Fuck islamism ». A Kiev, deux jeunes femmes aux seins nus ont protesté avec le slogan « Free Amina » sur leur torse devant l'unique mosquée de la ville. A Paris, plusieurs militantes ont tenté de s’approcher de l'ambassade de Tunisie avec sur leur torse les slogans « No islamists » et « No sharia ». Les militantes ont finalement toutes été arrêtées.
Visiblement, c’est l’affaire qui a fait déborder le vase et la provocation envers l’Islam ne passe ni en Tunisie, ou leur militante (cause pourtant de ces actions) critique leur geste en expliquant qu’elles auraient offensé des croyants, ni même en France ou nombre de militantes ont simplement décidé de quitter le mouvement.
Les FEMEN : des provocatrices ET des manipulatrices ?
Les représentantes des FEMEN avaient réagi à mes articles et en me priant par écrit de vérifier mes sources (!) et de me rappeler que leur lutte était « progressiste, nécessaire et engagée au péril de leur vie ». Les pauvres Safia Lebdi et Loubna Méliane, qui se sont généreusement occupées d’Inna à son arrivée en France, ont bien évidemment été roulées dans la farine par leurs nouvelles amies ukrainiennes. Mais je suis fondamentalement heureux qu’elles s’en soient finalement aperçues puisqu’elles viennent de confier a la presse qu’elles ont « mis des mois à comprendre que la situation en France ne les intéressait pas (les FEMEN - ndlr)» ou encore que « Dans notre dos, Inna prenait ses ordres à Kiev.. ».
Et oui ! Les Femen ne sont bien évidemment pas venues s’occuper de la condition des femmes françaises mais plus vraisemblablement exécuter une opération de communication parfaitement orchestrée et avec des objectifs parfaitement clairs, en manipulant au passage de pauvres militantes françaises qui, en s’attaquant a l’Islam de France, ne mesurent peut être pas complètement les risques qu’elles prennent. Je souhaiterais rajouter, très chère Safia, que contrairement à ce que vous écrivez ici, et donc contrairement à ce que vous a raconté votre nouvelle copine Ukrainienne, la croix coupée en Ukraine est bien une croix orthodoxe érigée suite a la révolution orange à la mémoire des victimes du communisme.
La guerre contre les religions : le prélude à une guerre de religions ?
Je ne peux m’empêcher de réfléchir aux conséquences directes des agissements des Femen. Leur manifeste est tellement absurde qu’il en est ridicule et leur action lors de la manifestation contre le mariage pour tous n’a servi qu’à galvaniser les militants les plus catholiques, donnant un souffle supplémentaire à ce mouvement populaire de contestation. Du coté des musulmans (pas seulement français), des groupes Facebook viennent d’être créés ou les jeunes musulmanes de différents pays affirment de plus belle leur foi et leur identité religieuse en rappelant avec bon sens qu’être femme ne veut pas dire exposer sa nudité devant tout le monde ou que lorsque l’on n'a rien à dire, il ne reste évidemment plus qu’à se déshabiller.
Crédit photo: Facebook Muslim Women against Femen
Ayesha Latif, une des portes paroles du mouvement « Muslim Women against Femen » affirme que c’est: « une erreur de penser que les femmes musulmanes sont des créatures soumises, contrôlées par les hommes, qui ont besoin d’être libérées par un groupe de femmes blanches bien coiffées et posant nues (…) Pour elles, plus vous vous déshabillez, plus vous êtes féministe - c’est l’idéologie féministe occidentale ».
On ne peut qu’acquiescer et rappeler que ce féminisme occidental n’est soutenu en 2013 que par une minorité agissante et non représentative, mais bénéficie du soutien implicite des élites politiques et médiatiques. En ces temps difficiles et troublés, le mouvement FEMEN pourrait bien en réalité involontairement accélérer le malaise d’un nombre croissant de citoyens croyants envers une France gangrenée par la laïcité totalitaire. Ce faisant, il ne ferait qu’accroître les tensions entre ces divers pans de la société française et sans doute rendre plus visible la ligne de fracture croissante entre la frange traditionnelle et conservatrice de la société et la frange plus moderniste et libérale qui estime que le progrès passe par la destruction des valeurs traditionnelles et l’émancipation de l’individu au mépris et même au dépens de la communauté.
Mais il y a sans doute plus inquiétant : La guerre contre les religions ne risque t-elle pas de mener à une guerre des religions, prélude du choc des civilisations? Est-ce bien l’avenir souhaité et souhaitable pour notre pays? T