Un petit village de pêcheurs, qui s’appelle Alert, se trouve sur l’île d'Ellesmere. Le pôle Nord est à quelques 800 kilomètres d’ici. Dans cette zone, la nuit polaire dure cinq mois, et en hiver, les températures y chutent jusqu’à -50 degrés Celsius. Comment les chameaux, qui sont habitués à vivre dans les déserts chauds, auraient-ils pu survivre dans de telles conditions ?
Il y a trois millions d’années, le climat sur Terre était beaucoup plus chaud. Les traces de plantes anciennes retrouvées près du cercle polaire par les paléontologues en sont la preuve.
« Les ancêtres des chameaux actuels n’ont jamais vécu dans les froids », explique Evgueny Machtchenko, chercheur au Laboratoire des mammifères de l’Institut de paléontologie. « L’Arctique est glacé depuis une époque récente à l'échelle de l'histoire de la planète. A l’époque, c’était une zone de climat tempéré avec des forêts de feuillus. Les froids sont venus beaucoup plus tard dans cette région. D’ailleurs, les dinosaures pénétraient dans l’Arctique à la fin de la période du Crétacé pour y passer une partie de l’année. Ils migraient vers le Sud à la tombée de la nuit polaire. Apparemment, les chameaux se déplaçaient suivant le même schéma ».
Des restes des chameaux avaient été retrouvés précédemment en Alaska et dans le Yukon. Mais selon les scientifiques, la découverte des restes de chameaux dans l'Arctique canadien est plus importante, car ce nouveau site se trouve 1 200 kilomètres plus au Nord. Les chercheurs supposent que les chameaux seraient arrivés en Eurasie depuis l’Amérique du Nord par l'isthme de Béring - une zone de terre qui reliait l'Alaska à la Tchoukotka pendant l’époque préhistorique. Aujourd’hui, ils vivent dans les déserts d’Afrique et d'Asie.
« Il y a aussi des chameaux primitifs qui vivent en Amérique du Sud », explique Vladimir Babenko, professeur de zoologie et de l’écologie à l’Université pédagogique de Moscou. « Il s’agit des lamas, des guanacos et des vigognes. Ces animaux n’ont pas de bosse et vivent dans des régions avec un climat rigoureux, par exemple en Patagonie. La fourrure de ces animaux est très chaude, tout comme celle des chameaux. On fabrique des couvertures très chaudes à partir de cette fourrure ».
L'endurance des chameaux les aide à survivre dans n’importe quel climat difficile. Ce « chameau arctique », découvert par les chercheurs du musée canadien de la nature à Ottawa est 30 % plus grand que les dromadaires actuels. Il possédait une taille de 2,70 mètres et un poids de 900 kilogrammes. Selon les chercheurs canadiens, les caractéristiques actuelles des chameaux – des pattes larges, des grands yeux et la fameuse bosse - seraient apparus dans le processus de leur adaptation à la vie en Arctique. /L