La Russie est actuellement le seul pays à disposer d’une flotte de brise-glaces nucléaires et de tout l’équipement nécessaire pour la construction de ce type de navires. La demande pour ces navires continue d’augmenter, car la flotte utilisée est en train de vieillir. D’ici 8 à 10 ans, les navires de cette classe deviendront complètement obsolètes et la Voie maritime du Nord risque de se retrouver sans brise-glaces, explique le directeur adjoint d’Atomflot Andreï Smirnov.
« Au cours des 3 à 4 dernières années, lorsque le trafic maritime a commencé à se développer activement dans cette région, il s’est avéré que les brise-glaces ont été fortement sollicités, surtout les navires plus grands et plus puissants. Les armateurs et les transporteurs se sont intéressés à cette route maritime, car elle est un tiers plus courte que le chemin qui passe par le canal de Suez. Et je ne parle pas de la voie maritime qui contourne l’Afrique ! Nous allongeons la saison de navigation et serons bientôt en mesure de l’assurer toute l’année. De nombreux armateurs envisagent de construire des navires capables de naviguer non seulement en été, mais aussi en hiver. Pour ce faire, des brise-glaces seront nécessaires ».
Le fret n’est pas la seule raison pour laquelle ces colosses nucléaires sont nécessaires. La Russie compte mettre en valeur des gisements de gaz et de pétrole en mer dans la région arctique. D’ailleurs, une série de projets dans ce secteur est déjà en cours de réalisation. L'un de ces projets est lié à la construction d’un port pour l'exportation du gaz naturel liquéfié (GNL) à Sabetta, dans le golfe de l’Ob. En tout 16 millions de tonnes de GNL seront exportés de ce port, estime Andreï Smirnov.
« Dans les années 1980, le volume de fret sur la Voie maritime du Nord atteignait à peine 7 millions de tonnes. Et lorsque nous élaborerons ce nouveau gisement, il donnera à lui seul 16 millions de tonnes de gaz liquéfié. La société Gazpromneft prévoit également d’extraire 9 millions de pétrole du golfe de l’Ob. La navigation sera assurée toute l’année ici, et les brise-glaces avec un moteur diésel ne seront pas efficaces dans ces conditions climatiques sévères ».
Les possibilités techniques des nouveaux navires de l’Arctique sont impressionnantes. Ils sont 20 % plus puissants que leurs prédécesseurs. Les réacteurs des nouveaux brise-glaces peuvent fonctionner 10 ans sans ravitaillement au lieu de 5-6, comme c’est le cas sur les anciens modèles. Et l’équipage de ces navires sera 1,5 moins nombreux grâce à l’automatisation des systèmes et des nouvelles technologies.
« Le nouveau brise-glace est plus sûr. Il est équipé avec les dernières fonctions de sécurité », explique le directeur général de la compagnie Baltiyski zavod Alexandre Voskresenski. « Il sera équipé avec de nouveaux systèmes de navigation. Il s’agit du premier des brise-glace nucléaire pouvant avoir deux tirant d’eau, ce qui lui permettra de naviguer en mer, mais aussi sur les fleuves moins profonds. Le navire peut briser des glaces dont l’épaisseur peut atteindre trois mètres. Il s’agit du brise-glace le plus large, qui fait 34 mètres ».
Des infirmeries modernes seront installées à bord des nouveaux brise-glaces, ce qui permettra aux médecins de procéder à des interventions chirurgicales complexes à bord des navires. C’est d’autant plus important que leurs missions se déroulent loin des rives et que le transport des malades ou blessés est toujours une opération compliquée.
Le coût total des deux projets atteint 86 milliards de roubles (près de 3 milliards de dollars). La construction des deux nouveaux brise-glaces devrait se terminer respectivement vers 2019 et 2020. /L
