Combien de bombes ont lancé les avions français ayant engagé le 11 janvier l’opération « Serval » pour contraindre les jihadistes à abandonner les villes occupées dans le Nord du Mali. Seul le commandement français le sait. Selon Paris, l’aviation française a bombardé les positions des islamistes autour Tombouctou, Gao et Kidal. Voilà comment cela se produisait …
On entend d’abord un avion s’approcher très vite, ensuite le sifflement d’une bombe qui tombe et enfin l’explosion…, les cris des enfants, des adultes. La scène est d’autant plus horrible que de telles attaques aériennes sont entreprises le pus souvent la nuit ou à l’aube.
Les avions ont pris le départ de l’aérodrome Kidal mercredi 30 janvier pour bombarder les positions des jihadistes à cent kilomètres au Nord de la ville. Les soldats français et maliens en blindés et les avions de combat auraient dû y être envoyés. Or, la tempête de sable qui a commencé soudain a arrêté l’offensive. La tempête se terminera et l’offensive sera poursuivie. Les Français en uniforme de soldats du 21ème siècle et l’armée malienne ont enregistré un succès impressionnant pendant trois semaines ayant affranchi des islamistes, d’ailleurs, sans résistance, trois grandes villes dans le Nord du Mali, contraint l’adversaire à reculer en profondeur du désert vers les monts des Ifoghas non loin des frontières avec l’Algérie. Le ministère français de la défense a rapporté à Paris l’achèvement de deux premières étapes de la campagne. La troisième étape : décisive est, de l’avis de plusieurs experts, la plus compliquée. Quelque 50 millions d’euros ont été dépensés pendant trois semaines de combats, a déclaré le 31 janvier le ministre de la défense Jean-Yves Le Drian. « Un peu trop tôt pour le dire », a-t-il avoué. Or, tout porte à croire que les dépenses augmenteront et le ministère se charge des frais. Selon le ministre, le budget suppose les dépenses de 630 millions d’euros pour les opérations au-delà des frontières de la France. Cependant, écrit Alexei Grigoriev, il ne faut pas compter l’argent d’autrui. D’autant plus que la France le dépense actuellement à des fins généreuses : pour détruire trois groupes d’islamistes radicaux d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), d’Ansar Dine (Défenseurs de l'islam) et du Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao). En ce qui concerne le Mouvement national de libération d’Azavad » (MNLA), il a déclaré depuis longtemps qu’il renonçait à la lutte armée et aux idées séparatistes dans l’intérêt de la fondation d’un Etat indépendant de Touaregs. Qui plus est, Paris a exhorté les autorités de Bamako à engager les pourparlers sur la réconciliation avec le MNLA. Le leader par intérim Dioncounda Traoré a déclaré en réponse à l’appel de Paris : « Le seul groupe avec lequel nous pouvons envisager des négociations c'est certainement le Mouvement Nationaonal de liberation d’Azavad (MNLA) à condition que le MLNA renonce à toutes ces prétentions territoriales ». Les prochains pourparlers entre le gouvernement malien et les anciens Touaregs séparatistes, estime l’auteur, constitueront un pas sérieux dans l’application de la feuille de route adoptée mercredi par le parlement du Mali en vue de rétablir l’ordre constitutionnel et la paix. L’ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de Russie au Mali Alexei Doumian a dit, en particulier, dans une interview téléphonique accordée à notre correspondant de Bamako :
La feuille de route est en fait adoptée, dit Alexei Doumian. C’est un document important attendu tant au Mali que dans la communauté mondiale parce qu’il pose le fondement pour les actes des autorités de transition dans le pays. Les priorités sont formulées dans ce document, notamment l’affranchissement du Nord et les élections générales. A en juger d’après la feuille de route, un grand travail et déjà réalisé en vue de préparer le scrutin. Les cartes biométriques des électeurs sont en voie de composition. Selon le président par intérim, il espère tenir les élections le 31 juillet. Cela dépendra sans doute de toute une série de conditions techniques et militaro-politiques qui seront réunies dans le pays vers cette date. L’affranchissement des territoires du Nord se déroule activement. Or, pour le moment ce n’est que la partie supérieure de l’iceberg, les groupes islamistes s’étant dispersés après l’offensive efficace des unités françaises et maliennes et s’étant abritées quelque part. Or, ils ne sont pas détruits, n’ont pas déposé les armes et il faudra les réprimer. Néanmoins, l’adoption de la feuille de route est un jalon important qui suppose la reprise de la coopération économique et politique internationale. Une délégation de travail de l’UE ayant visité cette semaine Bamako a déterminé les besoins du pays ayant perdu ses acquis substantiels suite au conflit surgi il y a une année dans le Nord. Ainsi, dit pour conclure l’ambassadeur russe, on voit des progrès dans la vie politique au Mali et – ce qui est tout particulièrement important au théâtre d’opérations armées. On va voir comment ces priorités seront réalisées. Or, le Mali et la société malienne voient enfin la lueur au bout du tunnel.
« Il est prévu de porter les effectifs des soldats de la paix africains avec à leur tête l’armée malienne dans le Nord du Mali à huit mille confirme que la guerre ne se terminera pas bientôt et le pays devra franchir la troisième étape de la lutte contre les islamistes radiaux, les jihadistes. On ne sait pas jusqu’à présent qui contrôle l’immense territoire d’Azavad … »
La plupart de la population est concentrée dans trois centres régionaux, dit Alexei Doumian. Ensuite ce sont les déserts et les territoires sémi-désertiques où il n’y a que du sable. Formellement, tant que ce territoire ne sera affranchi des extrémistes qui se dressent contre les autorités, il est prématuré d’envisager la normalisation. Fait révélateur : les trois centres – Tombouctou, Gao et Kidal se sont rendus pratiquement sans combat aux islamistes. Il n’y a pas eu d’affrontement de front avec les Français et l’armée malienne. Les Français ont réussi à infliger depuis l’air un coup sérieux à l’ennemi mais cela ne signifie pas que sa résistance est brisée. Les islamistes se sont dispersés dans le désert et les montagnes, beaucoup d’entre eux se rasent, ôtent leurs turbans pour se ressembler aux habitants locaux. Or, ils demeurent les jihadistes. L’ennemi dissimulé est non moins dangereux que l’ennemi qui lutte avec les armes. Tout porte à croire que la coalition franco-africaine devra beaucoup faire pour stabiliser la situation dans le Nord du Mali.
L’ex-ministre malien des AE Tiébilé Dramé a dit dans une interview à RFI qu’il était prématuré de constater la disparition des menaces émanant des groupes jihadistes : « Il n'y a pratiquement pas eu de combats. Les jihadistes se sont enfuis, sans doute pour préserver leur potentiel de guerre. De toute évidence, ils se sont repliés dans des sanctuaires plus au Nord, dans les chaînes montagneuses de l'Adrar, en attendant des jours meilleurs pour eux. Nous devons donc nous préparer à faire face à une longue période d'instabilité, avec des formes de guérilla et autres actes d’agression ». Le président français François Hollande a dressé pour ainsi dire samedi 2 février le bilan des victoires militaires et formulé les tâches en vue de normaliser la situation au Mali. François Hollande s’est rendu après les pourparlers à Bamako avec le président par intérim Dioncounda Traoré à Tombouctou,la ville contrôlée depuis près de cinq mois par les jihadistes.