Le module gonflable (BEAM, Bigelow Expandable Activity Module) pesant moins d'une tonne sera très probablement lancé vers l'ISS par le lanceur cargo privé Dragon. Il prendra une forme cylindrique une fois mis en orbite et aura une longueur de 4 mètres pour un diamètre de 3 mètres. Cette section supplémentaire est une excellente opportunité pour élargir l’espace vital de la station spatiale, estime le membre de l’Académie russe d’astronautique Iouri Karach.
« Pour l’ISS, le module gonflable – c’est avant tout un espace de vie pour les astronautes. Il est très compact et une fois mis en orbite, il se transforme en une grande construction. Ce genre d’habitations gonflables est actuellement étudié non seulement pour des projets circumterrestres, mais aussi pour des projets martiens. La société Mars-1, qui propose d’envoyer des humains sur Mars, compte édifier sur la Planète Rouge un véritable village composé de ces modules gonflables. La Lune aura également besoin de ce type de modules. Les chercheurs considèrent que les modules gonflables pourront garantir une meilleure protection contre le rayonnement et les météorites ».
L'idée d'utiliser des modules gonflables dans les technologies de l'espace n'est pas nouvelle: dans les années 1960, un sas gonflable était installé sur le vaisseau spatial Voskhod-2 et c’est par ce sas que le cosmonaute soviétique Sergueï Léonov a effectué la première sortie extravéhiculaire.
Aujourd'hui, des structures gonflables Genesis-1 et Genesis-2, construites par la société Bigelow Aerospace volent en orbite haute. Elles ont été envoyées au début des années 2000 par les fusées Dniepr depuis la base de missiles de la région d’Orenbourg (Oural). Bigelow a acheté ces brevets à la NASA. L'agence a créé un vaisseau spatial expérimental gonflable TransHab (Transit Habitat) destinés aux missions interplanétaires. Mais en 2000, le Congrès américain, malgré les attentes de la Maison Blanche, a ordonné à la NASA de suspendre le programme pour des raisons financières. Bigelow construisait donc ses Genesis d’après les schémas presque finalisés de TransHab, et maintenant il se chargera de la section gonflable pour l’ISS. C'est ce qui explique le montant relativement modeste du contrat, poursuit Iouri Karach.
« Quand la NASA verse à la compagnie Orbital Science plus d'un milliard de dollars, cet argent va à l'élaboration et la construction d'une série de vaisseaux spatiaux pour le lancement vers l'ISS. Et qu’est-ce que nous avons ici ? Un module gonflable, qui est réellement prêt et des technologies bien connues. Pourquoi alors payer un prix élevé, comme si on l’élaborait dès le début ? ».
Le contrat avec Bigelow est une occasion pour la NASA de vérifier l'efficacité de son concept, explique le chef de l’Institut de politique spatiale Ivan Moisseev.
« La NASA perçoit l'ISS comme un champ d'expérimentation. Il faut que toute idée prometteuse soit testée dans l’espace. Et pour les modules gonflables c’est le cas. L'objectif principal est le développement des technologies ».
Le module pour l'ISS, tout comme les Genesis, sera fabriqué avec des fibres résistantes multicouches « vectran » de couleur dorée. La société prévoit également le lancement d’une station spatiale sur la base d’une section gonflable qui aura trois fois la taille du module destiné à l’ISS. Ce sera un véritable hôtel pour les touristes spatiaux fonctionnant sur le principe « service compris ». Il devrait être lancé avec un missile lourd Atlas au cours des 2 à 3 prochaines années. Une place en orbite pour 30 jours reviendrait au minimum à 29 millions de dollars pour un touriste spatial. A titre de comparaison, en 2009 un vol d’une semaine sur l’ISS est revenu 40 millions de dollars au touriste spatial canadien Guy Laliberté.
Malgré des vols réussis des modules Genesis, les sceptiques invoquent le manque de grands modules gonflables sur une orbite plus basse, celle de l’ISS. On y trouve des restes d’atmosphère, mais très rares. A cause de son volume important, le module gonflable va ralentir l'ISS. Il faudra donc relever plus souvent l’orbite de la station à l’aide de cargos spatiaux. C'est sans doute la raison pour laquelle ce module ne restera amarré à la station que pour une période de deux ans. T