Les Russes, les Français et les Japonais se sont réunis au nom du respect de la nature humaine

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Quel plaisir de voir les représentants de trois pays se réunir pour saluer la vertu essentielle des êtres humains la bientraitance! A la différence de M. Hobbs je ne pense pas, moi personnellement, que l’homme est un loup pour l’homme.

 

Quel plaisir de voir les représentants de trois pays se réunir pour saluer la vertu essentielle des êtres humains la bientraitance ! A la différence de M. Hobbs je ne pense pas, moi personnellement, que l’homme est un loup pour l’homme. Et je ne suis pas la seule à ne pas le penser. L’énoncé du philosophe anglais a été plusieurs fois démenti au cours de la présentation de l’album des vues photographiques concernant les prisonniers de la guerre russo-japonaise de 1904-1905, recueillies par le Consul français M. Lucy-Fossarieu à cette époque-là. La collection des photos faites par les Français ainsi que par les Japonais et réunies dans cet album est un ouvrage unique en Russie.

J’ai demandé au directeur de l’Institut français de Moscou dont la Médiathèque a accueilli les invités japonais et français à cette occasion, Matthieu-M. Ardin, de présenter ce livre.

M. Ardin.Au-delà des frontières, au-delà des époques nous rassemblons aujourd’hui pour présenter un magnifique ouvrage, un ouvrage constitué et établi par nos amis japonais, par les archives cinématographiques de Russie et avec le soutien de l’Institut français de Russie. Donc c’est un bel événement parce que c’est un ouvrage qui témoigne que les hommes peuvent être bons même dans les pires circonstances.

La Russie en tant que partie perdante dans cette guerre avec le Japon qui a eu lieu en début du XX siècle a passé sous silence plusieurs faits de ce conflit assez court mais riche en conséquences. Il se trouve d’ailleurs que cette guerre était marquée non seulement par des actions héroïques des marins russes mais aussi par la générosité des Japonais qui accueillaient les prisonniers russes sur les îles japonaises. En effet, c’était un accueil plus que bienveillant. Les prisonniers ont eu le droit d’être logé avec leurs familles, de bien manger, d’apprendre des métiers japonais traditionnels et même de choisir le chef cuisinier. La Russie et le Japon s’étaient mis d’accord sur le respect des droits et de la dignité de leurs prisonniers et les Etats payaient à leurs soldats mis en détention par l’ennemi une certaine somme. L’ancien ambassadeur de la Russie au Japon (2006-2012) Mikhail Belyi nous a confié d’autres détails intéressants sur cette guerre.

Mikhail Belyi. Il ne faut pas idéaliser ce qu’on vient d’entendre. La guerre est toujours une tragédie. Mais en ce qui concerne le sort des prisonniers au cours de la guerre russo-japonaise, on peut dire que c’était une des dernières guerres chevaleresques, voire humanes. Les faits témoignent que les prisonniers russes étaient bien traités par les Japonais. J’ai vu moi-même comment les enfants et les retraités japonais vénèrent actuellement le mémoire des soldats russes qui étaient décédés sur le territoire du Japon à la suite des blessures ou des maladies. Là, vraiment je veux tirer mon chapeau devant les Japonais pour leur attitude émouvante envers les tombeaux des prisonniers russes. Le maire de la ville de Mazuyama m’a raconté que les écoliers de l’école primaire et les retraités au Japon sont chargés par l’Etat de soigner les tombeaux russes.

A cette époque la France était déjà l’alliée de la Russie. Et un des devoirs du Consul français M. Lucy-Fossarieu résidant dans la ville japonaise Kobe consistait à défendre les intérêts des prisonniers russes. En accomplissant cette mission le Consul fréquentait les ports où se trouvaient les camps des prisonniers et parlait avec les officiers russes. Ces derniers, à leur tour, ne pouvaient transmettre l’information sur la guerre et sur leur captivité que par le biais du Consul français car les autorités japonaises censuraient ce genre de lettres. Le Consul général actuel de France à Moscou, Francis Guénon nous a commenté ces faits historiques en termes suivants.

M. Francis Guénon. Ce travail montre le rôle de la France comme observateur vigilant des conditions de détention des prisonniers dans les conflits. Il montre aussi que les belligérants au cours de ce conflit, qui comme tous les conflits reste préjudiciable, se sont comportés avec humanité et un souci scrupuleux du bien-être des prisonniers. Ce travail est constitué de photographies et d’annotations méticuleuses et présente les conditions de détention des prisonniers russes dans les camps japonais au cours du conflit de 1904-1905 qu’il a opposé la Russie et le Japon. C’est un témoignage qui convient d’exhiber pour rappeler que le respect des hommes est essentiel en particulier dans les conflits.

La découverte des photos des prisonniers russes au Japon a fait preuve du fait que la guerre russo-japonaise de 1904-1905 a été la dernière guerre des gentlmans.

M. Ardin.Il se trouve que le Consul a rendu compte des conditions au Japon. Mais à la même époque il y a eu évidemment des prisonniers en Russie. Et même si la Russie a perdu cette guerre comme l’a rappelé l’ancien ambassadeur de Russie au Japon, que ce conflit a eu des conséquences et dramatiques sur l’empire russe, et dramatiques sans doute sur l’évolution des mentalités au Japon. Il y a eu aussi des prisonniers en Russie. Les deux belligérants ont décidé de donner des conditions décentes aux prisonniers ce qui n’a pas été le cas par la suite. On sait qu’au cours des conflits qui ont eu lieu par la suite, que ce soit des conflits pour la France, pour le Japon, pour l’Allemagne…les conditions ont souvent été déplorables. C’est la dernière guerre de gentlemans.

C’était la délégation japonaise présidée par le directeur adjoint de l’Université de la langue russe de Tokyo, Iosikhiko Mori, qui a présenté cet album merveilleux. M. le directeur adjoint nous a raconté en russe excellent le sort des prisonniers japonais dans le camp russe.

Iosikhiko Mori. Bien sûr que c’est un ouvrage précieux. On a réussi à traduire les mémoires du Consul français en russe et en japonais. Nous avons bien travaillé tous ensemble. Quant aux prisonniers japonais en Russie, il y n’en avait que 1800 à peu près et ils étaient de même très bien traités par les Russes. Nos prisonniers étaient renvoyés au village Medved qui se trouve dans la région actuelle de Novgorod. Et là-bas, ils ont eu le droit de se promener librement où ils voulaient sauf qu’il n’y avait pas beaucoup de divertissements dans cet endroit-là.

En effet, le travail accompli par les trois pays est très précieux. En se rendant compte qu’il y avait plusieurs questions restées sans réponses sur cette guerre, comme celles du nombre exact des prisonniers russes dans les camps japonais, des circonstances d’emprisonnement des soldats russes, des conditions de leur détention et que la plupart des mémoires ont vu le jour dans des tirages limités auxquels tout le monde n’avait pas eu l’accès, nous apprécions cet ouvrage qui comme chaque nouvelle source peut jeter la lumière sur l’histoire complexe des relations russo-japonaises.

Et les Japonais, et les Russes ont adopté dans ce conflit un comportement particulièrement digne, ce que nous découvrons aujourd’hui grâce au carnet du Consul de France de l’époque.

Vive la paix ! Vive l’amitié des peuples !

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