La France a reconnu l’opposition syrienne représentative des intérêts du pays. François Hollande a franchi le pas répétant peut être même à son propre insu les agissements de l’administration sarkozyste. Cela ne nous étonne guère compte tenu de la conjoncture politique de la France. Paris ne contrôle plus sa politique militaire, car de position souveraine la France a dégringolé en bas de l’échelle jouant maintenant le rôle de l’acolyte américain. Cela est bien triste mais les faits sont bien là. C’est d’autant plus triste que les Français sont de plus en plus inconscients du danger qu’ils courent. Ainsi, Yvan Blot, haut fonctionnaire français et homme politique, a ouvertement déclaré le suivant :
Yvan Blot. Nous avons ici un ambassadeur américain en France qui passe son temps à faire de l’agitation dans la banlieue auprès es minorités musulmanes. Bon, c’est assez désagréable pour nous. Je pense que cette attitude va continuer. Et donc rien ne va s’améliorer.
Mais malgré cette politique ouvertement hostile des Etats-Unis la France continue sa danse effrénée avec le prédateur de la planète. Il y a de quoi perdre le moral !
Aujourd’hui on cause beaucoup sur la nécessité et le bien-fondé d’une intervention militaire dans la Syrie. On établit des hypothèses, s’acharne sur les analyses, les commentaires pullulent mais personne ne semble vraiment être intéressé par le potentiel militaire et l’esprit combattif de l’armée syrienne, par son rôle même appelée à tenir tête à toute intrusion dans le sanctuaire national. Pourtant, cette force armée est nombreuse et bien équipée. Forte de 200 mille militaires, elle est assise sur les mêmes principes que l’armée soviétique d’antan, c'est-à-dire l’appel sous les drapeaux mariés avec un corps d’officiers professionnels qui, eux, sont issus pour la plupart du milieu alaouite, hostile aux sunnites qui représentent toujours la majorité de citoyens syriens. Sous Hafez al-ASSAD, le service militaire durait 30 mois, ensuite la grande réforme fut lancée et l’on en arriva à 24 mois de service actif et, ensuite, 18 mois. Cette armée n’est pourtant pas passive. Elle apprend à lutter pour ses propres intérêts et c’est à ce titre-là qu’elle aurait décidé à prêter main forte au régime de Bachar al-Assad.
Quant à la combattivité et à la stratégie à laquelle cette armée a été formée, on sait pertinemment que son premier objectif consistait en organisation de défense renforcée sur la ligne du plateau du Golan, les Syriens craignant beaucoup une opération de l’armée israélienne dotée du matériel sophistiqué dernier cri.
Au cours de la dernière année de son existence, cette armée s’est trouvé une autre mission : c’est celle de contrer les efforts des commandos formés à la guerre clandestine et envoyés à partir d’une base en Turquie où les instructeurs américains leur eurent enseigné les méthodes subversives.
Force nous est de constater que cette armée syrienne s’en sort fort bien et, qui plus est, elle se fait tendre la perche par le renseignement militaire des plus actifs. Comme nous voyons, les Syriens sont très loin de vouloir se rendre et essaieraient coûte que coûte d’éviter le carnage que leur promettrait une guerre civile. C’est dire que la Syrie se retrouve en balançoire à bord d’un gouffre de violence islamiste.
On a tenu à interroger l’un des meilleurs experts et observateurs indépendants francophones Thierry Meyssan, Président du réseau Voltaire qui est aux premières loges d’actualité, à Damas et nous livre des détails insolites dans une interview exclusive qu’il nous a accordée :
La Voix de la Russie.Thierry, vous qui êtes l’un des meilleurs experts médiatiques de l’Orient, pourriez-vous nous dire ce que vous pensez à partir de la Syrie om vous vous trouvez en ce moment en homme courageux des agissements du Président français qui a reconnu l’opposition syrienne comme légitime représentant de l’Etat syrien ?
Thierry Meyssan. D’abord c’est clair qu’elle ne peut être reconnue comme représentative de l’ensemble du peuple syrien. On peut considérer qu’elle représente peut être une faction du peuple syrien. Mais certainement pas sa majorité et certainement pas son ensemble. Mais ce qui vient de se passer est un jeu un peu complexe français ; car jusqu’à présent la France et le Qatar avaient mis en place le Conseil International dont la première réunion s’était tenue à Istanbul mais en fait l’organe a été créé en France entièrement contrôlé par les services secrets français et qataris. Chaque membre de ce Conseil est dépendant par son titre de séjour, son logement et ses déplacements des services français et qataris.
Or cette situation a commencé à inquiéter les Saoudiens qui ont créé un Conseil rival qu’ils ont implanté au Caire. Et puis ça a commencé à exaspérer les Etats-Unis parce que chaque fois qu’ils voulaient influer sur cette opposition de salon, ils avaient besoin de passer par le Qatar ou la France. Donc Madame Clinton s’est obligée de détruire ce Conseil National. Et elle a convoqué une réunion où le Conseil national s’est fondu en une nouvelle instance – la Coalition Nationale qui, elle, est contrôlée par les Etats-Unis. Tout ça est une reprise en main par Washington.
Après la France s’est retrouvée dans une sorte d’engrenage où elle avait annoncé qu’elle reconnaissait l’opposition syrienne comme représentative. Dans sa conférence de presse le Président français avait annoncé qu’il reconnaissait cette opposition syrienne. Mais en même temps juste après il y a eu un recul de la part de son staff. En fait je crois que la chose n’est pas encore complètement stabilisée parce qu’il est évident qu’il y a un accord négocié entre les grandes puissances qui doit être mis en œuvre dans les prochaines semaines. La France serait dans une situation ridicule d’avoir reconnu une coalition nationale que tout le monde est en train de laisser tomber.
Ce n’est pas la première fois que cette technique est choisie. Certaines nations de l’OTAN avaient fait la même chose, on s’en souvient, pour la Libye et avant pour la Somalie. Chaque fois cela a été conçu comme la porte ouverte pour une opération internationale. On commence par saisir les ambassades. Puis on saisit tous les avoirs du peuple en question et on les met dans les mains d’une opposition fantoche qu’on manipule. Et ça, ça peut servir après de justification juridique à des opérations purement coloniales. »
Alors intervention militaire ou pas, la France s’est remise à sa politique impériale dont elle est passée maîtresse au cours du dix-neuvième siècle. Le plus triste que cette fois-ci elle le fait sous les auspices d’un gouvernement qui se dit socialiste. Mais il semble que les Syriens ne céderont pas facilement le terrain et que les tentatives effrénées des Américains et de l’élite française de faire régner le chaos dans la région qui risque de sombrer définitivement dans le paroxysme de la mort, se heurte à la résistance de Moscou qui ne l’entend pas de cette oreille. Moscou n’a pas besoin d’une guerre au Proche-Orient ni des caïds qui transforment le pourtour méditerranéen en nouvel Afghanistan. Dommage que le peuple français ait investi de la magistrature suprême une personne qui fait preuve d’une grasse ignorance des intérêts stratégiques de son propre pays. Et en attendant le même gouvernement n’a pas les moyens de payer les OPEX c’est-à-dire opérations extérieures à ses propres soldats qui mènent en suivant la consigne les guerres impériales à l’autre bout du monde. En attendant leurs femmes et enfants ne mangent pas à leur faim.