Les queues aux bureaux de vote qui durent des heures et des heures sont devenues la carte de visite des élections de 2008. Les élections présidentielles vont effectivement de paires avec elles depuis longtemps. Egalement suite aux élections de 2004, des politologues et sociologues américains ont appelé à résoudre ce problème cependant rien n’a été fait. Au contraire, ces queues sont considérées comme un acte civil courageux de la part des électeurs.
Avec le système de vote électronique s’ajoutent beaucoup de sérieux soucis sérieux. Les États-Unis n’utilisent pas d’urnes-scanners, mais i-bulletins. Toutefois, les machines tombent souvent en panne. Cela a été le cas en 2004, mais aucune amélioration n’a été mise en place. Il est significatif que dans les États où les gens refusent de faire la queue, le système d’i-vote n’est pas implémenté. Ainsi nous trouvons le système des bulletins ordinaires à Manhattan et dans le New Jersey voisin les bulletins électroniques. Le taux des problèmes techniques y a atteint un niveau record. Il en résulte que les queues constituent les éléments d’un spectacle électoral : le vote se déguise en exploit. Pourtant là où les gens sont attachés à ne pas perdre leur temps, par exemple, au centre financier de New York, ils préfèrent ne pas prendre part à ce type de jeu.
Toutefois le problème principal reste le système de vote en lui-même. Le président américain n’est pas élu par un suffrage direct, mais par des grands électeurs, de surcroît en fonction de sa population chaque état pouvant en choisir un nombre différent. Cette modalité a déjà donné lieu à quelques incidents : en 2000 la majorité de la population a voté pour Albert Gore, alors que la plupart des grands électeurs avaient voté pour George Bush. La situation paraît complétement absurde. En fait cet incident est déjà le cinquième dans l’histoire des États-Unis.
Cet effet pervers implique que les Etats-Unis peuvent organiser les élections présidentielles seulement dans 4 ou 5 états dont le vote a un réel impact sur les résultats. Les autres états deviennent une simple formalité.
Les élections de 2000 ont causé un énorme scandale. Le destin des élections dépendait du décompte des voix dans un seul état, en Floride, en raison de très faible écart entre les candidats. Finalement, les républicains ont lancé à CNN de fausses informations sur la victoire de Bush en Floride. Le canal a divulgué cette nouvelle lors des émissions d’actualités. Bush s’est vu félicité y compris par les dirigeants étrangers et même par Gore qui s’est reconnu battu dans la bataille électorale. Du point de vue de la population le candidat du Texas est devenu le chef d’État légitime. Quand quelques heures plus tard la situation s’est éclaircie sur la victoire de Bush non confirmée en Floride et sur l’écart entre les deux rivaux de moins de 1 %, Gore a déclaré qu’il entendait réclamer un nouveau décompte des bulletins de vote. Plusieurs semaines après les élections le nom du nouveau président américain restait inconnu. Toutefois, la Cour Suprême a interdit inopinément un nouveau décompte ayant reconnu la victoire de Georges Bush sur Albert Gore.
Le croustillant de cette cocasse histoire s’accentue en raison du fait que le gouverneur de la Floride était le frère cadet du Président américain Jeb Bush.
Quatre ans plus tard l’ancien président américain Jimmy Carter, à la tête du Centre Carter créé par lui-même ayant pour l’activité le monitoring du processus électoral, a déclaré que Jeb Bush n’avait entrepris aucune mesure indispensable à la correction des dysfonctionnements du système électoral de la Floride. Carter a annoncé que cet état des choses était inadmissible aux États-Unis, le pays qui affiche sa démocratie en exemple dans le monde entier. Pourtant l’amertume de l’ancien président n’a pas été partagée par tout le monde, et les manipulations se sont poursuivies.
Toutefois le problème clé du système électoral porte un autre caractère. En effet ces élections sont très loin d’une vraie concurrence. Formellement, oui, la compétitivité politique existe, malgré un grand nombre de manipulations. Nonobstant cette concurrence se joue entre deux partis principaux élus qui noient les autres opposants aux approches lointaines de l’Olympe. Si vous aviez l’intention de participer à la vie politique, vous seriez obligé de vous inscrire dans l’une des deux colonnes. Les forces marginales sont radicalement écartées de la vie politique. Et il n’y a pas de problème à critiquer par exemple le Président du pays. Or, il est hors de question d’exiger des changements radicaux dans le système politique.
Quelques groupes d’élite s’alternent au volant de pouvoir, des joueurs alternatifs se voient paralysés. En fait au stade final la population peut s’exprimer et faire le choix seulement entre les deux candidats qui sont proposés et qui ont été dûment choisis et réfléchis. Finalement la population garde l’impression d’une participation active totale dans les décisions prises. Les gens croient qu’ils élisent vraiment un président et dirigent la politique. Ce qui est très loin de la réalité.