La Russie possède une expérience unique pour la production des brise-glaces. Les navires de cette catégorie étaient fabriqués uniquement en URSS et en Russie. Les brise-glaces nucléaires ont été toutes produites sur une seule usine : le chantier naval de la mer Baltique, située à Saint-Pétersbourg. Les brise-glaces fluviaux « Vaïgatch » et « Taïmyr » ont été construits sur le chantier naval de Wärtsilä en Finlande, mais ensuite transférés sur le chantier naval de la Baltique, où des réacteurs nucléaires étaient installés sur ces navires. En tout 10 brise-glaces nucléaires ont été construits. Actuellement, six brise-glaces nucléaires sont exploités en Russie : « Russia », « Taïmyr », « Union Soviétique », « Vaïgatch », « Iamal » et « 50 ans de la Victoire ». Quatre brise-glaces sur six correspondent à la classe « Arctique ». Deux brise-glaces à propulsion nucléaire – « Taïmyr » et « Vaïgatch », ont été construits spécialement pour les eaux non profondes : leur tirant d’eau représente 8,1 m (11 m pour la classe « Arctique »).
Le brise-glace « 50 ans de la Victoire » est le plus récent de la flotte. Il a été mis en service en 2007, alors que sa conception remonte à 1989 et la mise à l’eau – à décembre 1993. La construction ultérieure du navire a été suspendue à cause du manque de financement, et elle n’a pu reprendre qu’en 2003. Actuellement, il s’agit du brise-glace le plus puissant du monde. Il reçoit toute l'énergie de l'installation nucléaire génératrice de vapeur, située au milieu du brise-glace. Cette installation est constituée de deux systèmes distincts qui possèdent des réacteurs nucléaires à eau pressurisée de type OK-900. La turbine à vapeur se compose de deux générateurs de turbine séparés avec une capacité de 37.500 chevaux chacun. Cette énergie est transformée par cinq générateurs à turbine d'une capacité de 2000 kW chacun. Le générateur diesel d’une capacité de 1000 kW et deux générateurs diesel de secours de 200 kW chacun représentent une source alternative d’électricité.
La plupart des brise-glace ont été construits à l'époque soviétique, et leur période d’exploitation va bientôt se terminer. En 2018, les brise-glace « Russie » et « Taïmyr » auront déjà atteint la limite de leur période d’exploitation. En 2020, ils seront rejoints par le brise-glace « Union Soviétique » et « Vaïgatch ». Tous ces brise-glaces ont déjà passé la procédure de remplacement des générateurs de vapeur et leur durée d’exploitation a été étendue jusqu'à 175.000 heures.
Le gouvernement russe est bien conscient de ce risque. En 2010, dans son discours consacré au développement de la péninsule de Iamal, à Ekaterinbourg, Vladimir Poutine a déclaré qu’au moins trois nouveaux brise-glaces seront construits pendant la période 2012-2020. Le chef de l’agence atomique russe Rosatom SergueïKirienko a déclaré que la filiale du consortium Atomflot, qui possède tous les brise-glaces, va commander d’ici à 2016 trois brise-glaces nucléaires de nouvelle génération. La durée moyenne de la construction d’un brise-glace à propulsion nucléaire est de 8 ans, alors que sa durée d’exploitation représente environ 25 ans, avec une possibilité d’être prolongé. Selon les estimations du ministère des Transports, la Russie devrait construire au moins six brise-glaces.
Certains problèmes ont surgi à cause du fait que l’usine de la mer Baltique s’est retrouvée dans des mains des investisseurs privés sans scrupules. La société faisait partie de la « Corporation industrielle unie », qui, à son tour, appartenait à la Banque Industrielle Internationale de l'ex-sénateur Sergueï Pougatchev, qui n’a jamais voulu développer l’entreprise. En 2011, la banque a fait faillite, et la Banque centrale de Russie a hérité de 88% des actions du chantier naval de la Baltique en guise de garantie pour le prêt. En septembre 2011,le contrôle de l’usine a été transféré à la « Corporation navale unie ». En juillet 2012, la Corporation a acheté l’usine à la Banque centrale pour 224,3 millions de roubles. Cela signifie que l’activité industrielle va reprendre sur ce site très rapidement, et de nouveaux brise-glaces nucléaires seront construits.
Après que société publique soit devenue le propriétaire officiel du chantier naval, il a été décidé de procéder à la constructiond’un nouveau brise-glace à propulsion nucléaire. Le 29 juin 2012, un décret du gouvernement de la Fédération de Russie « Sur la mise en œuvre des investissements publics dans la construction d’un brise-glace universel » a été publié officiellement. Selon ce document, le cabinet des ministres doit ordonner la mise en œuvre des investissements budgétaires 2012-2017 sur le compte des assignations budgétaires du budget fédéral pour la construction d’un nouveau de brise-glace universel de 60 mW de puissance avec une mise en service prévue pour 2017. C’est Atomfot qui se présente en client public du chantier naval. 1,2 milliards de dollars ont été alloués pour la construction de ce nouveau brise-glace. Le financement s’ouvre en 2012 et se poursuivra pendant six ans jusqu'à ce que le brise-glace soit mis en exploitation. La descente du bateau sur l'eau est prévue pour novembre 2015, tandis que les essais en mer devraient commencer en août 2017, et les tests sur glace - en novembre 2017. Les brise-glaces de nouvelle génération devraient avoir un tirant d’eau à deux configurations, ce qui signifie qu’ils doivent être en mesure de changer de tirant d’eau en fonction de la profondeur.
Ainsi, la Russie est prête à faire un nouveau pas pour consolider sa domination absolue dans ce segment de la construction navale.