La croix gammée dans les pays Baltes : deux poids, deux mesures

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La semaine J. C'est ainsi que j'aurais qualifié cette semaine qui touche à sa fin et

La semaine J. C'est ainsi que j'aurais qualifié cette semaine qui touche à sa fin et qui a été successivement marquée par le débarquement, presque au sens littéral du terme, de trois évènements intrinsèquement liés : l'anniversaire de la rafle du Vel' d'Hiv, celui de la bataille de Stalingrad, enfin, la découverte sinistre des traces d'un certain Ladislaus Csizsik-Csatary … « un certain » pour nous, enfants de la modernité, mais un personnage plus que concret, apocalyptique pour ces 15 700 Juifs, enfants, femmes, hommes tous confondus dont la terre, indifférente au sort humain, a depuis longtemps absorbé les restes.

A bien y réfléchir, cependant, la terre, serait-elle si muette que ça ? A bien l'écouter, ne lui arrive-t-il jamais de crier vengeance ? Si, croyez-moi sur parole, cela lui arrive et ce simplement parce que ses états d'esprit ne sont que l'écho tonitruant des nôtres. Dénoncer M. Csizsik-Csatary, lui courir après au nom de cet instinct de justice qui nous travaille tous, est-ce que cela en vaut à présent la peine ? Oui, dans l'absolu. A condition d'aller jusqu'au bout des injonctions morales élémentaires qui procèdent de cet instinct. Car à quoi bon mettre la patte sur un vieux démon de 96 ans qui sous l'effet d'un coup de vent passager s'affalerait aussitôt, membres en pièces détachées ? Qui, mettant la main sur le cœur, jurerait sur la tête de ses ancêtres qu'il ignore tout de ce qu'on l'accuse se référant – on y a bien droit à près de 100 ans – à une amnésie incurable? S'il en retourne d'une question de principe, j'inciterais … non, que dis-je! … je sommerais l'UE de fourrer son long nez au fin fond des Pays Baltes, un petit monde singulièrement immunisé contre tout jugement de valeur comme s'il n'existait que dans l'imagination par trop comblée de nos puissances-modèles. Et pourtan t!

Commençons par le cas estonien. Ce pays aux dimensions réduites, membre à part entière de l'UE depuis le premier mai 2004, n'étant manifestement pas sujet aux cas de conscience, n'a pas froid aux yeux. Chaque année, le 14 juillet pour être précise, des défilés d'anciens combattants SS y sont organisés dans la plus grande liesse qui soit comme s'il s'agissait d'une fête nationale. Manquent plus que les lampions, feux d'artifice et bals en plein air. A ce rythme-là, je crains fort qu'on y vienne. L'état doit bien présenter ses raisons, rétorquerez-vous! Chose promise (on est politiquement responsableen Estonie!), chose faite. Je donne la parole à M. Urmas Reinselu, membre de l'Union Pro Patria et Res Respublica: « Les complices des nazis ont lutté au nom de la libération de leur pays (…), du statut d'indépendance qui lui avait été retiré tant sous l'occupation nazie que sous l'occupation soviétique ». Je coupe ici ma citation en vue de ne pas sombrer au-delà du raisonnable dans le contexte d'une absurdité qui, telle un oxymore, crève les yeux. La malice coupable de M. Reinselu lui octroie le droit souverain de rectifier l'histoire à l'aide d'un jonglage conceptuel sans précédent qui consiste à mettre le signe « égal » entre atrocités nazies et influence, fût-elle cent fois condamnable, soviétique ! Cette confusion extraordinaire a été juridiquement fixée le 14 février 2012 par l’Eesti Riigikogu qui est le Parlement monocaméral de la République d’Estonie. Pourtant, les faits parlent d'eux-mêmes, les contradictions se dissolvent comme par magie dès qu'elles transparaissent à la surface. Je vous renvoie à la réalité choquante des défilés Waffen-SS du 14 juillet (c'est chacun sa Bastille !), le dernier ayant eu lieu dans la ville de Kuressaare qui a assisté au XXème rassemblement des vétérans de la 20ème division estonienne SS. Selon la révélation solennelle de M. Reinsalu, ces individus ont risqué leur vie « en sauvant la dignité de notre peuple ». Je vous laisse, chers auditeurs, à vos considérations respectives sur la chose, tout commentaire supplémentaire m'apparaissant inutile. La réaction de Mr. Alexandre Lukashevitch, représentant du Ministère des Affaires étrangères de la Russie, se résume pour moi à un mot-clé tout à fait adapté à la situation donnée: les estoniens excellent dans l'art de la « mythopoétique ». La peste brune, pestilentielle, hyper-contagieuse, celle qu'a si brillement décrite Albert Camus, de façon à peine voilée, dans sa Peste, a beau tâcher de se redorer le blason, les SS et les collabos n'en demeureront pas moins ce qu'ils sont. Aucun mythe, aucune circonstance atténuante, aucun échappatoire féerique ne les arracheront à l'ubiquité des morts, aux souvenirs des victimes rescapées pour qui le passé, leur passé sera à tout jamais leur présent. Hélas, l'UE s'en soucie comme d'une guigne. En apparence…

Ce n'est pas que je tienne à épater la galerie en livrant des arguments pour le moins étourdissants, et néanmoins, je persiste à croire qu'il est des tabous bien délétères qu'il faudrait s'interdire de passer sous silence. Ainsi, tant qu'on y est, restons objectifs en accordant cette fois-ci la parole à Thierry Meyssan, fondateur du Réseau Voltaire (http://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9seau_Voltaire ), journaliste dont la franchise imbue de courage me rend admirative. Dans un article qui date certes de quelques années mais qui pour autant n'a pas perdu de son actualité, La présidente de la Lettonie réhabilite le nazisme, une mise au point tout à fait explicative est faite sur la personnalité de Mme. Vaira Vike-Freiberga, présidente de la République de Lettonie. Il s'avère que cette canadienne est liée par sa famille aux agents nazis des réseaux stay-behind de l'OTAN (!) par l'intermédiaire d'une « association clandestine destinée à la diaspora, Les Faucons de la rivière Daugava (Daugavas Vanagi) ». Pauvre femme, me direz-vous, devrait-on lui faire subir l'insupportable supplice des prises de responsabilité familiales ? Que non, vous répondrais-je sans l'ombre d'un doute, si ce n'était la solidarité flagrante de ce professeur de psychologie envers le crime sciemment perpétré par ses aïeux! Même histoire qu'en Estonie : défilés SS et collabos annuels à travers Riga. Mêmes arguments, mais en plus fin, plus ciblé: selon cette chère Mme Vike-Freiberga, il n'y aurait pas la moindre différence entre la mainmise allemande et soviétique en vertu du sens réel et essentiel du ¨Pacte Ribbentrop-Molotov – deux régimes totalitaires se sont parfaitement bien entendus, ergo, ils se valent. Point, à la ligne. Cette logique passerait presque, laissant bouche bée n'importe quel sophiste des plus avisés, si ce n'était, derechef, le témoignage écrasant des faits: les fameux défilés sur fond de campagne antistalinienne bizarrement métamorphosée en campagne russophobe farouche. M. Meyssan, ferré comme il est de ses quatre sabots sur toute l'histoire du XXème, rectifie le coup avec beaucoup d'adresse, indiquant que « Le Pacte Ribbentrop-Molotov est avant tout un prolongement des Accords de Munich (…) pour préciser les zones d'influence à l'Est après le partage de la Tchécoslovaquie entre l'Allemagne, la Pologne et la Hongrie (...) ». Je réitère maintenant ma question, mais sous une autre formulation : l'UE, couvre-t-elle à ses propres fins les fabulations gravissimes de deux Républiques qu'elle n'a pas hésitées à accueillir en son sein, de manière symbolique, le même jour ? Je laisse y répondre M. Meyssan: « Il ne s'agit pas (…) d'une répugnante provocation à usage interne, mais d'une stratégie internationale pilotée par l'OTAN, de gages délibérément donnés à des organisations clandestines que l'on tient à remercier pour leur contribution à la désoviétisation de l'Europe et qui sont déjà associées à divers gouvernements, surtout en Ukraine orange ». Le journaliste nous signale également l'existence de ces organisations durant toute la Guerre Froide, faits qui ont eu un bref retentissement en 1997.

Deux poids, deux mesures accolées de mises en scène cocasses, dont des jeux à cache-cache occasionnels avec de vieilles momies telles que Ladislaus Csizsik-Csatary font, c'est dans l'ordre des choses, parties. /L

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