Une petite église blanche à coupole pyramidale, pouvant rentrer 500 personnes, était aujourd’hui remplie de croyants. Malgré un temps pluvieux et humide, des gens se tenaient durant plusieurs heures devant l’église. La forêt de Katyn, lieu du massacre dans les années 30 et 40 du siècle dernier sous le régime stalinien de citoyens de Pologne et de Russie, est vénérée tout particulièrement à Smolensk. Encore dans sa fonction de métropolite de Smolensk et de Kaliningrad le patriarche Cyrille soulevait à plusieurs reprises la question en vue de commémorer ici des innocents tués. Mais longtemps personne ne savait au juste quel genre de monument il fallait ériger, se rappelle le Patriarche Cyrille.
« Quand est venue l’idée de commémorer ces milliers de victimes innocentes, fusillées à Katyn, de nombreux proposaient d’élever ici un monument. Des esquisses ont été faites. Et on les concertait avec moi, en tant qu’archiprêtre de Smolensk. Aucun des projets ne rendait la vraie tragédie de ce lieu. Et alors j’ai demandé qu’une croix russe soit érigée en souvenir des croyants orthodoxes massacrés ici, dans l’espoir qu’à un certain moment on puisse construire une église commémorant toutes les victimes de Katyn. Je ne dirai pas que c’était facile. Je peux dire que c’était alors la plus difficile question qui ne trouvait pas longtemps sa solution sous diverses prétextes. Et même lorsque la première pierre a été posée dans ses fondations, il se trouvait des gens qui protestaient contre la construction d’un lieu de culte à cet endroit. Nous étions même obligés de déplacer le chantier. Et il s’est avéré que tout cela était bien providentiel ».
La fondation de l’église a eu lieu le 7 avril 2010. La cérémonie solennelle s’est déroulée en présence du Premier ministre à l’époque et aujourd’hui président Vladimir Poutine et du président du Conseil des ministres de Pologne Donald Tusk. Le projet de l’ensemble religieux a été conçu par l’architecte Dmitri Pchenitchnikov. Il est symbolique que l’église porte le nom de la Résurrection du Christ, poursuit le patriarche Cyrille.
« Cette église traduit notre foi en la victoire de Dieu sur le Diable. En la victoire du bien sur le mal. Car la Résurrection c’est le triomphe de la vérité sur le mensonge. En dépit de tous les efforts de cacher et de déformer la vérité sur le massacre de Katyn – ce Golgotha russe -, qui a englouti Russes et Polonais, la vérité a fini par jaillir. Et aujourd’hui dans cette majestueuse église avec les innocents tués nous glorifions Dieu ressuscité, dans l’espoir d’une Résurrection universelle. Katyn est la tombe commune pour des Polonais et des Russes, un endroit de peine partagée, de sentiment commun de tristesse. Rien n’unit autant les gens que la souffrance commune. Je suis persuadé que le temps est venu de reconnaître que Katyn est un horrible symbole de notre tragédie commune, et de tendre l’un à l’autre la main comme à ses propres sœurs et frères, ayant partagé cette douleur. Je crois qu’ici va commencer une nouvelle époque dans les rapports entre la Pologne et la Russie ».
Après la bénédiction de l’église et une liturgie divine servie en elle le patriarche Cyrille a visité le mémorial en compagnie de prêtres catholiques et des militaires polonais, ainsi que des représentants du clergé orthodoxe de la République de Pologne. Quand le dignitaire s’st approché des tombes de Polonais, on a entendu sonner à trois reprises la célèbre cloche de Katyn. Située en-dessous du niveau de la terre, elle sonne pour ceux qui s’y reposent, mais aussi sert d’avertissement aux générations qui viendront. /L