Bien avant la publication des résultats des élections, les autorités égyptiennes ont renforcé les mesures de sécurité. La police, l'armée et les forces d’intervention spéciales se trouvent dans un état d’alerte. Des blindés ont été déployés sur les routes à l’entrée du Caire. Des chars se trouvent près du bâtiment de la Commission centrale électorale. Les autorités craignaient des émeutes. Et elles risquent de survenir dans le cas de la victoire de n’importe quel des deux candidatas. L'ex-premier ministre Ahmed Shafik participait à la course électorale contre Mohammed Morsi. Chaque candidat bénéficiait d’un soutien solide du peuple, estime l'expert de l'Institut des Sciences Orientales de l’Académie des sciences de Russie Boris Dolgov.
« La société égyptienne reste partagée. Une majorité des électeurs soutient Morsi. Il s’agit des électeurs conservatifs, principalement originaires des provinces de l'Egypte, où l’infrastructure n’est pas développée et le niveau d’éducation de la population est assez bas. Quant à l’électorat de Shafik, il s’agit des personnes qui soutiennent la voie laïque du développement de l’Egypte ».
Avant les élections, les experts estimaient que les deux candidats ont des chances presque égales d’être élus. Leurs pronostics ne se sont pas avérés faux. Selon la Commission électorale centrale, Morsi a été soutenu par 13,23 millions d'électeurs, ce qui représente 51,7% du total des votes. Son rival Shafiq a remporté 12,35 millions de voix, soit 48,3%. Au total, presque 52% des Egyptiens se sont rendus aux urnes le 16 et le 17 juin, 8% de plus qu’au premier tour, qui a eu lieu en mai.
Chaque bulletin était donc important lors du décompte des résultats. La Commission centrale électorale était obligée de traiter de nombreuses plaintes après le scrutin, et n’a pas pu annoncer les résultats le 21 juin, comme cela était prévu. Ce retard a provoqué un mécontentement massif dans la société égyptienne. Des militants de l’islamiste Morsi ont occupé la place Tahrir au Caire, et les partisans de Shafiq ont fait de même à Nasr City, l’un des quartiers de la capitale du pays. Cette fois l'armée était déterminée à intervenir, et elle a fait comprendre aux personnes réunies que toutes les manifestations illégales seront sévèrement réprimées.
Il n’y a aucun doute que ces manifestations vont avoir lieu, mais pas immédiatement. En attendant, les partisans des idées de Morsi célèbrent bruyamment leur victoire, avec des feux d'artifice et les tambours. Ils se rendront bientôt compte qu'il n'y a pas de quoi se réjouir, estime Boris Dolgov.
« Le Conseil suprême des forces armées a repris les fonctions législatives, et en conformité avec ces fonctions, il a fortement limité les pouvoirs du président. Morsi ne sera pas le vrai maître de l'Egypte. Le pouvoir réel restera dans les mains du Conseil suprême des forces armées. Et lorsque ceux qui soutiennent Morsi, verront que le président n’a pas vraiment de pouvoir, il risque d’y avoir des protestations contre les militaires ».
Ingénieur de profession, Mohamed Morsi a fait ses études aux États-Unis. Il possède une expérience de travail au parlement, car il a été élu plusieurs fois en tant que candidat indépendant, encore sous Hosni Moubarak. Morsi promet de réformer les institutions corrompues du pouvoir, mettre l'Etat « sur la base de l'Islam », et élargir l’utilisation de la charia. Selon la Déclaration constitutionnelle (Constitution provisoire) de l'Egypte, qui a été déclarée par les militaires après le soulèvement populaire en 2011, le président est élu pour un mandat de quatre ans. /G.