Qui a tué Piotr Stolypine ?

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La personnalité de Piotr Stolypine attire l’attention de nombreux spécialistes, et pas seulement des historiens. Cela est lié à sa vie et les circonstances tragiques de sa mort.

La vie

L’inscription sur le premier monument à Stolypine, inauguré avant la Première Guerre mondiale à Kiev mentionne qu’il est né en 1862 à Moscou. En vérité, le grand réformateur russe est né le 14 avril 1862 à Dresde, en Allemagne.

 

L’hypothèse de la naissance de Stolypine à Moscou pourrait être liée avant tout avec son appartenance à une célèbre famille noble, qui possédait des domaines importants dans les environs de Moscou. Le jeune Piotr a passé son enfance dans la résidence de Serednikovo, célèbre pendant la période soviétique pour son lien avec le poète russe Mikhaïl Lermontov. Le propriétaire de la résidence, le grand-père de Stolypine, était le frère de la grand-mère du poète. C’est pourquoi Stolypine a un lien de parenté avec Lermontov, étant son cousin éloigné. Mais ils appartenaient à des générations différentes, car Lermontov a été tué dans un duel 20 ans avant la naissance de Stolypine.

Le monument érigé en l’honneur de Stolypine à Kiev n’évoque pas la ville de Saint-Pétersbourg, qui est la plus liée à ses activités en tant que personnalité politique de la Russie tsariste. Saint-Pétersbourg était la capitale de la bureaucratie et du gouvernement à cette époque. Toutefois avant son arrivée au sein du gouvernement, Stolypine n’avait rien d’un bureaucrate. Diplômé du Département des sciences de l’Université de Saint-Pétersbourg (il a eu pour examinateur le célèbre chimiste Dmirti Mendeleev, qui lui a mis la meilleure note à l’examen final), il est parti dans sa propriété lithuanienne de Kolnobergé, qu’il a transformé en un modèle l'agriculture avec l’utilisation du système de rotation des cultures. Il était pendant très longtemps le maréchal de la noblesse dans l’ouyezd où il résidait, puis dans la province. C’est grâce à ces postes qu’il a reçu l’expérience de gestion administrative et de relations publiques qui lui ont servi plus tard dans sa carrière. À l'âge de 40 ans, il intègre le pouvoir exécutif, devenant gouverneur de la ville de Grodno, et ensuite de Saratov. Il revient très vite à Saint-Pétersbourg presque en tant que ministre, ayant évité de justesse un attentat préparé contre lui dans sa datcha par des terroristes. Stolypine n’a pas été blessé par l’explosion dans sa résidence d’été, mais la fille et le fils du ministre ont eu des blessures. Sa fille Natalia a été grièvement blessée, et les médecins parlaient même de l’amputation possible des deux jambes, mais ont réussi à éviter l’opération. Saint-Pétersbourg n'était pas une ville où Stolypine se sentait bien. Il la quittait volontiers pour s’enfuir dans son domaine préféré de Kolnobergé.

Autre détail important : Stolypine est né à Dresde, où sa mère était en visite familiale. En tant que noble, Stolypine, comme de nombreux autres représentants de l’élite russe, ne se séparait jamais de la culture européenne. Il se rendait souvent en Allemagne et en Suisse. D’ailleurs, dans ses discours à la Douma et au Conseil d'Etat, Stolypine faisait souvent référence à l'expérience des pays occidentaux modernes.


La mort

De nos jours, les historiens remettent toujours en cause la version officielle de la mort de Stolypine. Selon l’enquête policière, il est mort des mains d’un terroriste. Est-ce que ce premier-ministre réformateur pourrait être la victime d’un complot des forces réactionnaires du gouvernement ? Car juste avant sa mort, ses relations avec les forces de l’opposition se sont fortement dégradées. Ou alors le tueur de Stolypine Dmitri Bogrov était un agent secret de la police ? Un autre argument, qui peut faire penser qu’il s’agit d’un complot contre Stolypine, c’est que ce sont les policiers qui ont donné à Bogrov un billet pour le théâtre, où l’attentat contre Stolypine a été commis.

En réalité, il n’y a pas de preuves de l'implication de la police, ni des milieux aristocratiques dans l’assassinat de Stolypine. Et même si l’enquête officielle est mise en doute, à cause du manque de professionnalisme des enquêteurs, organiser un complot avec un si grand nombre de personnes serait impossible. Quelqu'un aurait brisé le silence, avant ou après la Révolution bolchévique. Car le général Pavel Kourlov, l’adjoint de Stolypine, qui figurait comme l’un des suspects principaux dans cette affaire, a été interrogé non pas à l’époque tsariste, mais sous le Gouvernement Provisoire. Et après avoir émigré à l’étranger, il a publié ses mémoires.

Le fait que le nom de Bogrov figure dans l’affaire, cela peut avoir une explication. En tant qu’agent de la police, il s'est porté volontaire pour identifier les terroristes dangereux qui auraient pu planifier un attentat contre le Tsar russe, qui se trouvait au théâtre ce jour là. La biographie et le mode de vie de Bogrov ne correspondaient pas à l'image d'un criminel désespéré, prêt à faire une tentative de meurtre sans avoir la possibilité de s’échapper. Ce jeune homme avec de bonnes manières, originaire d’une famille riche, assistant d’un avocat avec un diplôme universitaire, ne ressemblait pas du tout à un tueur professionnel. Toutefois, les arguments rationnels ont peu de chances de convaincre les partisans de la « théorie du complot », comme c'est le cas avec d'autres grands crimes (notamment l’assassinat de John F. Kennedy). On a souvent tendance à vouloir trouver des énigmes et des sensations là, où il n’y en a pas. Surtout lorsqu’il s’agit du sort des célèbres personnalités historiques comme Piotr Stolypine.

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