L'Ossétie du Sud détruit les stéréotypes mais ne se reconstruit pas

© RIA Novosti . Mikhail Mokrushin / Accéder à la base multimédiaPrésidentielle en Ossétie du Sud
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La victoire à l'élection présidentielle en Ossétie du Sud de Leonid Tibilov est assez convaincante: 54% dans une république politiquement active c'est un bon résultat.

La victoire à l'élection présidentielle en Ossétie du Sud de Leonid Tibilov est assez convaincante: 54% dans une république politiquement active c'est un bon résultat. Cette fois la légitimité de l'élection n'est remise en doute par pratiquement personne. Le rival du gagnant qui a fait une très bonne prestation en obtenant plus de 42%, David Sanakoev, a également reconnu sa défaite.

D'ailleurs, Tibilov a déjà invité Sanakoev à faire partie de son équipe. Très prochainement Tibilov sera Président de la République d'Ossétie du Sud (ROS). Sachant que sa fonction sera écrite avec une lettre majuscule seulement en Russie et dans les pays d'Amérique latine qui ont reconnu la ROS.

Toutefois, un travail difficile attend l'équipe de Tibilov. "Tskhinvali est toujours en ruines, et on ne voit pas les résultats de la réhabilitation après l'attaque géorgienne de 2008. Au moins 900 habitants n'ont pas de logement décent, encore autant sont de facto des SDF dans d'autres communes de la république, a récemment annoncé Alexandre Brod, directeur du bureau de Moscou pour les droits de l'homme, qui s'est récemment rendu en Ossétie du Sud. Il n'y pas que des échecs – par exemple, la commune de Moskovski est déjà construite et fait bonne impression. Mais c'est un faible résultat comparé aux milliards investis par la Russie dans la réhabilitation de l'Ossétie du Sud et dont on a activement fait la publicité."

Les Ossètes sont choqués par l'inefficacité des investissements réalisés pour remettre en état la république. Ce facteur explique le vote de protestation en faveur d'Alla Djioïeva en automne 2011 – elle était considérée comme une alternative à l'entourage de l'ex-président Edouard Kokoïty.

Toutefois, à l'époque de Kokoïty, Tibilov ne bénéficiait pas non plus des faveurs de l'ancien président. Après l'arrivée de Kokoïty au pouvoir en 2002, Leonid Tibilov a été renvoyé de tous les postes importants: dans les années 90 Tibilov était directeur du KGB d'Ossétie du Sud, puis une figure clé dans un contingent militaire mixte assurant la paix et l'ordre sur la frontière non reconnue par Tbilissi entre l'Ossétie du Sud et la Géorgie.

C'est la raison pour laquelle beaucoup de personnes ayant voté en 2011 pour Djioïeva ont soutenu à l'élection présidentielle du 25 mars, puis au second tour, Leonid Tibilov.

L'Ossétie du Sud ne cesse d'étonner, car elle ne s'inscrit pas dans les stéréotypes ancrés dans la conscience de masse aussi bien en Russie, qu'à l'étranger. Les journaux occidentaux soulignent que Tibilov est un ancien du KGB soviétique, mais ils expliquent tout de même qu'on ne peut pas le qualifier de marionnette de Moscou et qu'il est associé dans la conscience publique au renouveau, et non au retour à l'époque du gouvernement de Kokoïty.

Quant à Moscou, il doit se résigner au fait que l'Ossétie du Sud est devenue un Etat indépendant. En effet, les Ossètes qui vivent sur le territoire de la ROS sont reconnaissants envers la Russie qui les a sauvés de la réintégration à la Géorgie de Mikhaïl Saakachvili, où ils avaient des raisons de craindre pour leur vie. La violence des combats de 2008 ne laissait aucun doute, mais auprès de certains partisans de Saakachvili.

Mais les habitants de la ROS rejettent la corruption et ne sont pas prêts à accepter n'importe quel dirigeant jouissant des sympathies de Moscou. La défaite à l'élection des héritiers de Kokoïty, puis celle d'Anatoli Bibilov ouvertement soutenu par le Kremlin lors du second tour de la présidentielle en 2011, ont clairement mis en évidence les dispositions du peuple.

En y regardant de plus près, le vote de protestation en Ossétie du Sud n'est pas seulement lié aux moments tragiques des dernières années. En 1990-1991 déjà, lorsque l'Union soviétique était sur le point de s'effondrer et que l'Ossétie du Sud s'est retrouvée annexée à la Géorgie dirigée par Zviad Gamsakhourdia, personne n'a demandé aux Ossètes et aux Abkhazes qui vivaient sur le territoire de la République socialiste soviétique de Géorgie s'ils étaient prêts à accepter de vivre dans une telle Géorgie. Moscou n'était pas non plus préoccupé par leur sort, la Russie avait d'autres priorités. Les Ossètes ont dû s'habituer à leur nouvelle vie et ne compter que sur

eux-mêmes.

Mais il existe une autre facette de cette réalité, dans laquelle l'Ossétie du Sud a dû vivre.

La république était incapable de se remettre sur pieds par ses propres moyens – contrairement à l'Abkhazie, elle n'a pratiquement aucun potentiel économique, elle ne possède pas d'infrastructure immobilière balnéaire ni aucune diaspora influente

en dehors de la Russie.

La réhabilitation de la république n'est possible que grâce à un compromis avec Moscou et sous réserve qu'une nouvelle guerre avec la Géorgie soit exclue. Tant que Mikhaïl Saakachvili se trouve au pouvoir en Géorgie, aucun dialogue n'est possible entre Moscou et Tbilissi, bien qu'une nouvelle guerre semble également impossible – une deuxième tentative ratée ne sera certainement pas pardonnée au président géorgien en exercice ni dans son pays, ni en dehors.

Au final, on assiste à une situation de "ni guerre, ni paix", très pratique pour les hommes politiques, mais insupportable pour les réfugiés et les gens dans la zone de conflit.

L'évolution de la situation nécessite d'importants changements dans la conscience de nombreux hommes politiques en dehors de la ROS – aussi bien à Moscou, qu'à Tbilissi et en Occident.

L’opinion de l’auteur ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction

 

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