Les marins s'exerceront en commun à manoeuvrer ensemble, à parer les attaques aériennes et des menaces asymétriques, à organiser les télécommunications, à contrôler le trafic des navires marchands. Le groupe de coopération a été créé il y a 11 ans en vue de sauvegarder la paix dans la région. En 11 ans il n'a pas eu l'occasion d'intervenir. Alors ces manoeuvres sont-elles vraiement nécessaires? « Sans aucun doute », estime l'observateur militaire Viktor Litovkine:
Les Etats de la mer Noire apprennent à coopérer en mer, à sauver les navires en détresse, à manoeuvrer en commun, à parler la même langue navale et à obéir aux mêmes commandes. Chaque année un nouveau commandant des manoeuvres est nommé. Cette année c'est un Russe, le capitaine Youri Zemski. C'est lui qui donne des ordres, notamment aux équipages des navires de deux pays de l'OTAN : la Roumanie et la Bulgarie. Le bâtiment de débarquement russe Caesar Kounikov fait partie du groupe de coopération. J'espère que les manoeuvres se passeront des situations d'urgence bien que tout puisse se produire sur l'eau. L'année dernière lors des exercices semblables dans la Méditerranée il a fallu évacuer un marin d'un sous-marin britannique et le transporter à l'hôpital. La tempête était très forte et aucun navire otanais ne s'hasardait à se rapprocher du sous-marin. Seul le remorqueur russe Epron l'a fait malgré une menace réelle de collision ! Nos marins ont aidé l'Anglais et ont reçu ensuite une lettre de remerciement de la part de l'amiral américain commandant les manoeuvres.
Blackseafor réunit les marines de guerre des pays avec lesquels la Russie a de la peine à dialoguer. Notamment avec la Bulgarie dans le domaine énergétique. Avec la Géorgie, elle n'a même pas de relations diplomatiques. La coopération n'en souffre-t-elle pas ? Viktor Litovkine:
« Lorsque le malheur vient, personne ne compte les offenses réciproques. Si la maison est en flammes, les gens s'entraident. Le feu peut se propager, il ne demande pas si les voisins sont des amis ou des ennemis. Le groupe de coopération dans la mer Noire a été créé justement pour unir les efforts à des moments difficiles. Même si son intervention n'a pas été nécessaire jusqu'à présent, personne ne peut donner des garanties pour l'avenir. Il y a quelques année notre bathyscaphe a sombré dans le Kamtchatka, il a tout simplement été retenu par des filets de pêche à la profondeur de 60 m. Alors les Japonais, les Anglais et les Américains nous sont venus au secours. Personne n'a pensé aux relations tendues, tous se sont souciés de la vie des marins. On ne peut pas faire autrement en mer ».
Les potentiels militaires et navales des pays de la mer Noire ne sont pas de force égale. La flotte turque est considérée comme la plus puissante. La flotte russe la dépasse par le déplacement de l'ensemble de ses navires, mais elle est souvent critiquée pour son matériel périmé. Ainsi Blackseafor réunit des composantes inégales ? « L'approche arithmétique ne convient pas pour évaluer la puissance militaire d'une flotte, note Viktor Litovkine. La flotte russe de la mer Noire a derrière son dos les troupes stratégiques. Elle est l'unique flotte de la région à être armée de missiles de croisière supersoniques mer-mer. C'est à vous de juger qui est le plus puissant dans la mer Noire ». L'expert a ajouté que la marine de guerre Russe avait plus d'une fois participé aux manoeuvres de l'OTAN consacrées à la recherche et au sauvetage des sous-marins. En mai, des exercices conjoints, Pomor 2012, seront organisés avec la Norvège. Leur objectif : contrer une attaque hypothétique des extrémistes.
