La saga de l'"Election présidentielle en Ossétie du Sud" qui dure depuis novembre dernier entre dans la dernière ligne droite. Et voici ce qui est intéressant: le drame s'est avéré utile. Après un marathon de six mois, un compromis devrait être trouvé entre les forces politiques rivales dans la république.
Et même si le monde occidental ne reconnaît pas ce pays, il a commencé à prendre la République d'Ossétie du Sud (ROS) plus au sérieux et à la considérer avec plus de respect. L'incertitude qui accompagnait cette élection depuis son faux départ de l'année dernière a joué le rôle si précieux dans le monde contemporain de suspense électoral. Au final, 50 observateurs occidentaux sont venus assister à au scrutin de dimanche dernier – un résultat incroyable pour un Etat non reconnu de l'espace postsoviétique.
Pour commencer, parlons de la stabilité et du compromis. Il est déjà évident que les résultats du second tour qui se tiendra le 8 avril ne seront pas contestés. Tous les candidats, ainsi que les observateurs étrangers reconnaissent la validité du premier tour.
Le favori de la course s'est également démarqué. Il s'agit de Leonid Tibilov, qui a obtenu 42,5% des voix au premier tour. Son résultat a déjà été reconnu par deux outsiders du premier tour – l'ancien ambassadeur d'Ossétie du Sud en Russie Dmitri Medoïev et le leader du parti communiste sud-ossète Stanislav Kotchiev.
Le médaillé d'argent, David Sanakoïev, délégué aux droits de l'homme, a beaucoup de retard sur Leonid Tibilov avec 24,58% des voix. Mais le plus important ce n'est pas le leadership évident de M. Tibilov, mais le fait qu'il ne soit pas considéré comme associé à l'ancien président de la ROS Edouard Kokoïty.
Même si pendant l'administration de Lioudvig Tchibirov, premier président de l'Ossétie du Sud qui avait fait sécession avec la Géorgie, Leonid Tibilov était président du KGB (Comité pour la sécurité de l'Etat) sud-ossète, lorsque Kokoïty s'est imposé face à Tchibirov en 2001, le favori actuel de la course présidentielle a perdu pratiquement tous ses postes. La cause de sa destitution (lorsque Kokoïty est arrivé en 2001, Tibilov, qui travaillait au parlement dans une commission de contrôle mixte dans la zone du conflit osséto-géorgien, avait même temporairement renoncé à ses fonctions publiques au profit du secteur bancaire) pouvait résider dans les différends avec Kokoïty. Ou tout était probablement plus simple: l'ex-directeur du KGB local a misé sur le mauvais cheval en restant loyal envers son ancien patron.
Aujourd'hui, cela n'a plus d'importance. L'essentiel, selon nos sources en Ossétie du Sud, est que les milieux d'affaires mécontentés par Kokoïty et qui misaient l'année dernière sur l'exclusion de la course d'Alla Djioïeva, ne considèrent pas Leonid Tibilov comme un "homme du passé." Selon certaines informations, ils l'auraient même soutenu.
En ce qui concerne les sympathies de Moscou, cette fois elles étaient exprimées avec beaucoup de prudence et ont été plus ou moins réparties entre les quatre candidats, seulement avec une légère préférence pour Dmitri Medoïev. Tous ces facteurs ont contribué à créer une atmosphère plus calme lors de l'élection, et favorable aux compromis.
Quant à Alla Djioïeva, dont la victoire annulée au second tour de l'élection de l'année dernière ne s'est pas couronnée par son investiture, ses sacrifices n'auront pas été vains. Comme convenu dans l'accord de décembre conclu entre elle et Edouard Kokoïty, en échange de l'abandon de sa candidature, le procureur général Teïmouraz Khougaïev a été limogé avant les élections à la demande de Djioïeva et de ses partisans.
Il était considéré comme un ennemi personnel de l'homme d'affaires Dzambolat Tedeïev qui était derrière Alla Djioïeva. C'est probablement la raison pour laquelle Djioïeva, qui vient de sortir de l'hôpital, n'organise pas encore d'actions de protestation.
Tedeïev est perçu par les observateurs locaux comme une figure controversée. Il faut reconnaître son courage – entraîneur principal de l'équipe de Russie de lutte libre, individu indépendant qui fonce tête baissée, interdit par Kokoïty de participation à l'élection présidentielle, il n'a pas été autorisé à pénétrer sur le territoire de son pays d'origine, l'Ossétie du Sud (Tedeïev a déclaré aux journalistes que l'avion à bord duquel il se trouvait avait été redirigé sur Moscou en plein vol).
Toutefois, l'atmosphère de clan qui entourait Tedeïev, ainsi que l'opacité de ses accords avec Djioïeva ont suscité des doutes et des craintes: la république ne retournera-t-elle pas dans le passé marqué par des conflits? Après tout, aujourd'hui l'ancienne autonomie géorgienne n'a pas besoin de faire la guerre, comme en 1991 ou en 2008, mais de procéder à un travail calme pour réparer les dommages subis pendant la guerre de 2008.
De toute évidence, les électeurs et les milieux d'affaires sud-ossètes ont pensé que Tibilov, proche de la soixantaine, coopérerait plus calmement et raisonnablement avec le premier ministre locale Vadim Brovtsev mis en place par Moscou. Ce dernier a assumé les fonctions de président par intérim, et dans ces circonstances il a plutôt bien géré la crise.
Maintenant, parlons de la reconnaissance de l'élection à l'étranger. Bien sûr, la Géorgie ne l'a pas reconnue. De même que les alliés occidentaux de Tbilissi. Ils continuent de parler d'occupation et de marionnettes. Toutefois, en échange des milliards alloués par Moscou, la Russie est en droit d'exiger de contrôler la manière dont est dépensé l'argent envoyé – Brovtsev est appelé à jouer ce rôle de "contrôleur comptable." Mais par la suite, ce sera une gestion autonome.
Il convient de noter un élément important. L'électeur sud-ossète a pour la seconde fois depuis l'indépendance fait preuve de sa nature indomptable en remplaçant non seulement le président, mais toute son équipe. D'ailleurs, les deux fois cela s'est fait sans coups de feu et sans coup d'Etat, mais par le biais des élections, même si elles ne sont pas encore irréprochables.
C'était probablement la cause de la venue des observateurs internationaux dans la république, reconnue dans le monde, hormis le Kremlin, seulement par Hugo Chavez et Daniel Ortega, respectivement présidents du Venezuela et du Nicaragua. Tandis que la Géorgie, qui a des patrons plus importants, devra encore faire pour la première fois l'expérience du changement de président par la voie électorale, sans manifestations ni révolutions.
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