Le Maroc propose son amitié à l'Algérie

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Le début de cette semaine aurait pu marquer le début de désamorçage des tensions entre le Maroc et l'Algérie, écrit notre commentateur Alexeï Grigoriev.

Le début de cette semaine aurait pu marquer le début de désamorçage des tensions entre le Maroc et l'Algérie, écrit notre commentateur Alexeï Grigoriev. C'était l'espoir nourri par le ministre marocain des Affaires étrangères, Saad Eddine Othmani, qui s'est rendu pour une visite de deux jours dans l'Algérie voisine. Première visite étrangère du nouveau chef de la diplomatie marocaine, ce voyage est d'autant plus emblématique que le choix était tombé sur l'Algérie. Il l'est aussi parce que le dernière visite du ministre marocain des Affaires étrangères en Algérie date de 2003 ce qui est peu normal pour deux pays ayant la frontière commune. C'est pourquoi le but affiché de cette visite – la recherche des voies de normaliser la situation afin d'établir des rapports de bon voisinage – revêtait une importance énorme.

Pendant plus de deux décennies, les relations entre le Maroc et l'Algérie ressemblaient plutôt à une «guerre froide». Cette «guerre» avait bien ses raisons. L’Algérie soupçonnait le Maroc de soutenir les partis islamistes.  En 1992 ces derniers ont remporté les élections législatives ce qui a déclenché une guerre civile qui a eu des répercussions économiques et humanitaires pour tout le pays. En 1994 la frontière entre les deux Etats a été fermée. Quant au Maroc, il évoquait la « piste algérienne » dans l'attentat de l'hôtel Atlas Asni à Marrakech. L’Algérie n'a toujours pas déverrouillé sa frontière avec le Maroc alors que ce dernier propose régulièrement de débloquer cette situation. Et pourtant, le grief le plus sérieux présenté par Rabat à Alger, est toujours là depuis ces quarante dernières années. Il s'agit du soutien politique et militaire au Front Polisario opposé au Maroc pour le contrôle du Sahara occidental. Rabat considère ce territoire comme sa province de sud et toute évocation de cette annexion en violation du droit international et, en premier lieu, des décisions prises par les Nations unies, irrite le royaume.

Il faut dire que les dirigeants de tous les niveaux tant marocains qu'algériens manifestaient à chaque bonne occasion leur volonté de normaliser les relations entre les deux pays en proposant à tout recommencer à zéro. Mais on a aussi entendu d'autres paroles qui trahissait plutôt l'état de la «guerre froide». Celle-ci battait son plein, surtout dans les médias. La presse marocaine et algérienne sautait à chaque occasion pour dénoncer les mauvaises intentions de l'autre partie ce qui ne faisait qu’alourdir le climat d'hostilité. Les relations tendues entre le Maroc et l'Algérie se répercutaient, bien évidemment, sur la situation générale au Maghreb. Ainsi, l'Union du Maghreb arabe (UMA) formée par les cinq pays du grand Maghreb, fut quasiment paralysée.

Ces derniers mois on observe pourtant un certain réchauffement des relations entre les deux pays. Difficile à dire s'il y a un lien avec le «printemps arabe» qui a secoué toute l'Afrique du nord. Le Maroc et l'Algérie ont réussi à éviter le pire leurs dirigeants mettant à temps le cap sur les réformes économiques et sociales. Pourtant, à la différence de l'Algérie qui a su préserver le caractère laïque de la branche législative, les islamistes modérés du Parti de la Justice et du Développement ont remporté les élections de novembre dernier au Maroc. L'actuel chef de la diplomatie marocaine est, d'ailleurs, l'une des figures de proue de ce parti de majorité. En juillet dernier, le roi du Maroc, Mohammed VI, a appelé de nouveau au rapprochement avec l'Algérie en insistant sur l'importance de la réouverture des frontières. Dès son arrivée à Alger, le ministre Saad Eddine Othmani a également fait part à son homologue algérien, Mourad Medelci,  d'une «volonté commune» de tirer avantage de la conjoncture pour «insuffler une nouvelle dynamique» aux relations entre les deux pays. «Cette  dynamique devait se concrétiser par «des programmes de travail sur le terrain» en vue «d'approfondir davantage» les relations bilatérales. Mourad Medelci, a souligné à son tour que cette visite permettrait de «raffermir les liens de fraternité et de coopération qui unissent les deux peuples frères». Lors des négociations les deux ministres ont  «examine les voies et moyens susceptibles de relancer l'Union du Maghreb arabe en réorganisant certaines de ses institutions et de ses mécanismes en vue d'une meilleure efficacité». La rencontre avec le chef de l'Etat algérien au cours de laquelle le ministre marocain a remis à Abdelaziz Bouteflika la lettre du roi du Maroc, s'est déroulée dans le même climat de confiance. Le contenu de la lettre et les détails des négociations n'ont pas été révélés à la presse. On ignore donc si les parties ont enterré la hache de guerre et désamorcé les tensions entre les deux pays. Il semblerait cependant que les espérances de la délégation marocaine étaient plus grandes. Si les parties ont trouvé un accord sur l'Union du Maghreb arabe, la proposition marocaine de rouvrir la frontière est restée sans réponse. Les parties n'ont pas avancé non plus dans le dossier du Sahara occidental. Comme l'a dit sur la chaîne télé France 24 la spécialiste du Maghreb, Khadija Mohsen-Finan, «Il  est trop tôt pour parler de réconciliation entre l’Algérie et le Maroc. […] Le nouveau pouvoir marocain s’est dit «allons sans complexes frapper à la porte du voisin algérien, on verra s’il nous dit oui ou s’il nous dit non». De son côté, le président algérien Bouteflika pourra toujours dire «je suis ouvert, je les ai reçus». Mais rien n’indique qu’une détente est en cours», a-t-elle conclu.

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