Vous êtes à l’écoute de notre rubrique hebdomadaire « Gros plan sur l'Afrique ». Son auteur Alexei Grigoriev vous invite aujourd’hui à écouter son sujet « L’alliance des radicalistes islamiques menace l’Afrique de l’Ouest » et traditionnellement – un bref aperçu des événements « L’Afrique : les échos de la semaine ». L'auteur de la rubrique attend vos messages par e-mail yazon@ruvr.ru .
Les récents événements de la semaine dernière dans le Nord du Mali, les actes du groupe extrémiste « Boko Haram » au Nigeria, notamment deux grands attentats à Kano, capitale de la communauté musulmane du pays, et enfin, la tendance au rapprochement entre les extrémistes islamiques du Mali, du Nigeria, du Niger, du Tchad, du Burkina Faso, le danger de leur regain d’activité dans les pays voisins, tel est l’effet de la formation en Afrique de l’Ouest d’une sorte d’alliance des radicalistes islamiques, des djihaistes … La région Kidal dans le Nord-Est du Mali, territoire désertique de 260 mille kilomètres, soit près de la moitié du territoire de la France, devient pour la seconde fois depuis ces dix derniers jours le théâtre d’opérations armées déchaînées par le Mouvement national pour la libération Asawat, groupe radical des Touaregs. Les commandos du Mouvement ont entrepris le 17 janvier les tentatives armées de s’emparer des villes Aguelhok, Menaka et Tessalit à la frontière avec le Niger et l’Algérie. Ils ont attaqué jeudi encore deux villes Anderamboukane et Ler à la frontière avec le Niger. Selon les sources militaires, il n’ y a pas eu au moment de l’attaque contre Ler d’unités armées et les commandos ont pénétré dans la ville sans combat ayant hissé le drapeau du Mouvement. L’armée malienne a su affranchir la ville mais la situation dans le Nord du Mali demeure compliquée et imprévisible. L’ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de Russie au Mali Alexei Doulian en a parlé dans son interview téléphonique qu’il a accordée au correspondant de la Voix de la Russie le matin du 27 janvier.
La situation dans le Nord du Mali est compliquée. Elle a toujours été sérieuse mais ces derniers mois elle s’est aggravée après les événements libyens lorsque des milliers de réfugiés maliens, notamment les Touaregs ayant fait leur service dans l’armée de Kadhafi se sont précipités au Mali. Ils sont revenus avec leurs armes. Qui plus est, la dissémination d’armes dans la région, notamment dans le Nord du Mali, au Niger et sur d’autres territoires du Sahel échappe au contrôle.
Selon l’ambassadeur russe, le Mouvement national de libération Asawat formé par les clans belliqueux de Touaregs se prononçant pour la fondation de l’Etat indépendant Asawat. C’est une région habitée essentiellement par les Touaregs sur les territoires maliens, nigériens, algériens et libyens. Les Touaregs ont soulevé plus d’une fois par le passé les insurrections contre les autorités centrales des quatre pays. Une grande partie des Touaregs maliens ont signé en 2009 à Alger l’accord sur la réconciliation avec Bamako. Le document a été observé jusqu’à récemment, dit l’ambassadeur. Le regain d’activité d’Al-Qaïda au Maghreb islamique évincé d’Algérie dans les régions difficilement accessibles du Nord du Mali, du Niger et de Mauritanie a modifié le rapport des forces en faveur des islamistes radicaux. Cela a poussé le Mouvement national Asawat à rejoindre Al-Qaïda et à passer à l’emploi de la force contre les autorités de Bamako. Les exigences politiques du Mouvement sont vagues mais il insistera sur la fondation de l’Etat indépendant Asawat. Les autorités maliennes et des pays du Sahel ne le toléreront pas conscients du fait que la balkanisation de la région recèle la menace d’islamisme radical belliqueux.« Il convient de noter, dit Alexei Doulian, que les Maliens s’opposent à de tels changements et soutiennent le gouvernement central de Bamako et l’armée dans la lutte contre les islamistes. Le gouvernement essaie sans succès d’entrer en contact avec les commandos du Mouvement …»
« Il ne faut pas oublier, poursuit l’ambassadeur de Russie, que cela se produit en prévision des élections. Les forces politiques se font valoir. Les présidentielles doivent avoir lieu fin avril et les législatives – en juin. Ce sont les événements très sérieux et douloureux pour le Mali, vu l’aggravation de la situation dans le Nord du pays ».
Le président nigérien Mahamadou Issoufou a signalé récemment le danger des attaques des Touaregs en ouvrant à Agadez un « Forum paix et développement ». « Les rébellions récurrentes et l'insécurité résiduelle qui en découle toujours, le terrorisme qui gangrène la zone sahélo-saharienne, les trafics d'armes et de drogue qui ont semé l'insécurité, ont mis fin à l'âge d'or et freiné le développement économique et social de la zone », a-t-il déclaré. « L'insécurité, liée tout particulièrement aux conflits fratricides, tue non seulement l'économie d'un pays, mais le pays lui-même », a averti le chef de l'Etat. « Cessons de nous replier sur nos ethnies, sur nos régions, n'encourageons plus l'irrédentisme et unissons-nous ».
La Mission de l’ONU chargée d'évaluer l'impact de la crise libyenne au Sahel a souligné dan son rapport pubié à New York la menace croissante émanant du groupe terroriste Boko Haram avec Al-Qaïda au Maghreb islamique tant pour le Nigeria que pour l’ensemble de l’Afrique de l’Ouest, notamment pour les pays où prédominent les islamistes. Selon ce rapport, il existe des preuves suggérant que Boko Haram compte dans ses rangs des Tchadiens qui ont suivi un entraînement d'Aqmi. De son côté, le responsable de la lutte contre le terrorisme pour l'Union africaine, Francisco Caetano Jose Maderia, a mis en garde contre la possibilité que Boko Haram étende ses activités aux pays voisins et pénètre en Afrique centrale. Boko Haram, écrit Alexei Grigoriev, mérite un commentaire à part. Pour confirmer les menaces il convient de noter qu’une délégation nigériane a pris pour la première fois part à la conférence à huis clos dans la capitale mauritanienne des experts militaires et civils du Sahel et du Maghreb consacrée au danger d’Al-Qaïda. Il a pour la première fois été question des liens entre AQMI et Boko Haram. Autrement dit, cela traduit la formation de l’Alliance entre les radicalistes islamiques d’Afrique de l’Ouest. Si les autorités officielles des pays participant à la conférence n’agissent pas par anticipation, une telle alliance aura les chances d’étendre sa sphère d’influence. Les radicalistes islamiques n’acceptent pas les compromis et le prix de leur loyauté est très élevé. Ce sont des vies humaines, l’instabilité politique et sociale, de très grands moyens et enfin – les menaces à la souveraineté et à l’intégrité de ces pays de l’immense région africaine.