La région Kidal dans le Nord-Est du Mali, territoire désertique de 260 mille kilomètres, soit près de la moitié du territoire de la France, devient pour la seconde fois depuis ces dix derniers jours le théâtre d’opérations armées déchaînées par le Mouvement national pour la libération Asawat, groupe radical des Touaregs. Les commandos du Mouvement ont entrepris le 17 janvier les tentatives armées de s’emparer des villes Aguelhok, Menaka et Tessalit à la frontière avec le Niger et l’Algérie. Ils ont attaqué jeudi encore deux villes Anderamboukane et Ler à la frontière avec le Niger. Selon les sources militaires, il n’ y a pas eu au moment de l’attaque contre Ler d’unités armées et les commandos ont pénétré dans la ville sans combat ayant hissé le drapeau du Mouvement. L’armée malienne a su affranchir la ville mais la situation dans le Nord du Mali demeure compliquée et imprévisible. L’ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de Russie au Mali Alexei Doulian en a parlé dans son interview téléphonique qu’il a accordée à notre correspondant Igor Yazon le matin du 27 janvier.
«La situation dans le Nord du Mali est compliquée, - dit l’ambassadeur russe. - Elle a toujours été sérieuse mais ces derniers mois elle s’est aggravée après les événements libyens lorsque des milliers de réfugiés maliens, notamment les Touaregs ayant fait leur service dans l’armée de Kadhafi se sont précipités au Mali. Ils sont revenus avec leurs armes. Qui plus est, la dissémination d’armes dans la région, notamment dans le Nord du Mali, au Niger et sur d’autres territoires du Sahel échappe au contrôle».
Selon l’ambassadeur russe, le Mouvement national de libération Asawat formé par les clans belliqueux de Touaregs se prononçant pour la fondation de l’Etat indépendant Asawat. C’est une région habitée essentiellement par les Touaregs sur les territoires maliens, nigériens, algériens et libyens. Les Touaregs ont soulevé plus d’une fois par le passé les insurrections contre les autorités centrales des quatre pays. Une grande partie des Touaregs maliens ont signé en 2009 à Alger l’accord sur la réconciliation avec Bamako. Le document a été observé jusqu’à récemment, dit l’ambassadeur. Le regain d’activité d’Al-Qaïda au Maghreb islamique évincé d’Algérie dans les régions difficilement accessibles du Nord du Mali, du Niger et de Mauritanie a modifié le rapport des forces en faveur des islamistes radicaux. Cela a poussé le Mouvement national Asawat à rejoindre Al-Qaïda et à passer à l’emploi de la force contre les autorités de Bamako. Les exigences politiques du Mouvement sont vagues mais il insistera sur la fondation de l’Etat indépendant Asawat. Les autorités maliennes et des pays du Sahel ne le toléreront pas conscients du fait que la balkanisation de la région recèle la menace d’islamisme radical belliqueux. Il convient de noter, dit Alexei Doulian, que les Maliens s’opposent à de tels changements et soutiennent le gouvernement central de Bamako et l’armée dans la lutte contre les islamistes. Le gouvernement essaie sans succès d’entrer en contact avec les commandos du Mouvement …
«Il ne faut pas oublier, - poursuit l’ambassadeur de Russie, - que cela se produit en prévision des élections. Les forces politiques se font valoir. Les présidentielles doivent avoir lieu fin avril et les législatives – en juin. Ce sont les événements très sérieux et douloureux pour le Mali, vu l’aggravation de la situation dans le Nord du pays».
La Russie a entretenu les liens d’amitié avec le Mali depuis son accession à l’indépendance et ne saurait rester indifférente à l’évolution de la situation dans le pays, a dit l’ambassadeur Doulian. Les chefs des diplomaties malienne et russe ont signé en 2009 à Moscou le mémorandum sur le concours dans la lutte contre les menaces terroristes et le crime organisé. La séance du groupe russo-malien dans le cadre du respect du mémorandum s’est déroulée le 21 décembre à Bamako. Le directeur du département de nouveaux défis et menaces Ilia Rogatchev a représenté le ministère russe des AE à la séance. Le secrétaire général, le numéro 2 de la diplomatie malienne Mme Traoré et les leaders du Bureau malien pour la lutte contre le narcotrafic et les représentants de tous les départements maliens participant à la lutte antiterroriste ont représenté le Mali. Le dialogue sera poursuivi, a ajouté l’ambassadeur, et sera utile pour nos deux pays.