En fait, le lien avec l’étoile du Kremlin n’est pas seulement géographique. Tout d’abord, les participants sont, pour la plupart, les artistes-peintres des années 1960, période soviétique du «dégel» après la mort de Staline, sont liés avec le Kremlin et le Manège par une longue et scandaleuse histoire.
«L’année qui commence bientôt, c’est le cinquantenaire d’un événement triste – lorsque le dirigeant de l’URSS de cette époque Nikita Khrouchtchev avait expulsé, en public, ces artistes-peintres du Manège», précise Irina Melechkovitch, superviseur du projet, dans une interview à Voix de la Russie. «C’est une espèce de jalon lié à la politique officielle de l’époque soviétique à l’égard des avant-gardistes. Mais cette exposition, qui n’est pas vraiment consacrée à Noël, reste tout de même liée avec cette fête. L’étoile du Kremlin, c’est aussi l’étoile de Bethléem qui annonce au monde la bonne nouvelle. C’est un mélange éclectique, certes, mais on n’y peut rien, c’est lié avec notre histoire…»
Une excursion dans l'histoire
Grâce aux œuvres exposées au centre du Manège, on peut apprendre aussi l’histoire de l’apparition des étoiles rouges symboliques sur les tours du Kremlin. Leur auteur, c’est le célèbre peintre Fedor Fedorovski. Il avait calculé les dimensions, la forme et le matériel de base – le verre de rubis. Il avait proposé que les étoiles pivotent et que leurs facettes scintillent. Fedorovski était, avant tout, un artiste théâtral, il a travaillé pendant plus de 30 ans au Bolchoï. Les beaux décors de Fedorovski étaient toujours très appréciés du public. C’est lui qui avait conçu le rideau de ce théâtre célèbre. A l’exposition, on peut voir ses esquisses pour l’opéra «Sadko».
Le célèbre peintre moderne Mikhaïl Chemiakine présente à l’exposition ses illustrations pour la nouvelle de Hoffman «Le petit Zahès». Des personnages surréalistes recrées par le peintre évoquent l’atmosphère grotesque d’un carnaval. Une autre artiste, Katia Medvedeva, présente un étrange portrait, réalisé dans la technique du collage, du célèbre styliste italien Gianni Versace. Il ressemble en même temps à un Pierrot triste, aussi bien qu’à Napoléon, dont le chapeau triangulaire est orné …d’une étoile à cinq rayons.
Et, enfin, l’étoile de Bethléem! Elle scintille dans les dessins de Tatiana Nazarenko, membre de l’Académie de la peinture. Elle a fait son tableau «Noël» après une visite dans la Terre Sainte. «C’est le lieu qui m’a soufflé l’idée de cette œuvre», dit-elle à Voix de la Russie. «Je suis allée à Jérusalem, dans les lieux bibliques. Cela m’a énormément impressionné. On pouvait voir la vallée que la Sainte Famille avait traversée pendant l’exode vers l’Egypte. Ces sujets n’ont rien de nouveau mais pour moi, ils le sont, car je m’attaque rarement à des thèmes religieux».
A l’exposition, tous les sujets ne sont pas aussi sérieux. Parfois, ils sont gais. Par exemple, sur le tableau «Une promenade en hiver», nous voyons une femme qui promène en laisse un oiseau fantastique aussi gros qu’une vache. Serait-ce un oiseau qui apporte le bonheur? Le peintre Ilya Kabakov propose aussi une métaphore… sur une étiquette pour le vin: un tourbillon de plumes blanches faisant un tunnel qui mène dans le vide… On peut supposer que celui qui a bu de ce vin est emporté par les anges ailés.