Existe-t-il un rapport entre le dioxyde de carbone et le climat?
Il ne fait aucun doute que le gaz carbonique atmosphérique influe sur le climat et le processus du réchauffement global mais son impact n’est pas aussi catastrophique qu’on le pense généralement. C’est la conclusion à laquelle ont abouti Andreas Schmittner et ses collègues de l’Université d’Oregon (USA). Les calculs du scientifique ont été publiés par le magazine Science à la veille de la conférence de l’ONU sur le climat qui s’est tenue en Afrique du Sud. Les spécialistes venus de 191 pays y ont discuté jusqu’au 9 décembre des mesures à prendre pour réduire les émissions du CO2 et d’autres GES qui ont atteint ces derniers temps un niveau record.
Schmittner a suivi l’évolution du climat sur notre planète durant 21.000 ans, c’est-à-dire depuis le pic de la dernière époque de glaciation. Il a pris comme point de départ la composition de l’atmosphère préexistante dont on pouvait juger d’après les carottes de glace extraites des calottes du Groenland et d’Antarctide. Le niveau du CO2 était alors inférieur de seulement un tiers par rapport à celui du début de la révolution industrielle. Les chercheurs ont également pris en compte les valeurs de température mesurées dans les différents points du globe grâce notamment aux fossiles.
L’équipe de Schmittner a compilé toutes les données en introduisant des coefficients correcteurs pour réduire au minimum la marge d’erreur en tenant, par exemple, compte du fait qu’en périodes de glaciation plus d’énergie solaire incidente était réfléchie vers l’espace.
Les scientifiques ont finalement mis au pont un modèle dynamique du climat et une carte globale des variations de température de la mer et de la terre. Il en ont tiré une conclusion importante à savoir qu’au pic de glaciation la température moyenne de la Terre n’était inférieure à celle mesurée aujourd’hui que de 2,2⁰. Il en découlait également que le doublement de la concentration du CO2 ne provoquerait qu’une augmentation de température de l’ordre de 2,4⁰ ce qui est aux alentours de la limite inférieure d’ailleurs fort imprécise de 2 à 4⁰, donnée par l’ONU. Cela signifie que la sensibilité du climat au gaz carbonique doit être au-dessous des prévisions. Les quantités prodigieuses des combustibles fossiles qu’on brûle actuellement, justifient-elles vraiment les scénarios alarmistes?
Les estimations de Schmittner correspondent à ce qu’on sait déjà et ne changent rien en substance, - pense Alexandre Guinzbourg, directeur adjoint de l’Institut de physique de l’atmosphère.
«Il est parfaitement naturel que les valeurs peuvent varier suivant les critères qu’on choisit si bien que cet article ne constitue pas du tout un événement scientifique», dit-il. «Il s’agit d’un travail utile qui précise les paramètres du système climatique mais ne donne lieu à aucune sensation ou révision des autres conceptions du réchauffement climatique. Si les chercheurs américains affirment que nous nous trouvons un peu plus près de la limite inférieure du flou généralisé, cela ne réfute en aucune façon les résultats des études antérieures».
«Alexandre Guinzbourg fait en même temps état de la qualité et de l’intérêt de ce travail. Il est difficile d’affirmer que la publication ait paru en prévision du forum climatique de Durban bien qu’il existe mille façons d’attirer l’attention sur cet événement», a ajouté le scientifique.
Quant aux participants du forum, ils n’ont aucun doute sur le danger du CO2 en qualité de gaz responsable de l’effet de serre. Ce qui es en jeu, c’est le sort du Protocole de Kyoto entré en vigueur en 2005. La durée des engagements de réduction des émissions des GES expire cette année et il faudra soit les prolonger, soit adopter un nouveau document. Le problème majeur réside dans le fait que ce ne sont plus les pays industrialisés mais émergents qui sont les principaux pollueurs. Et s’ils ont signé le Protocole de Kyoto, ils ne veulent en revanche prendre aucun engagement. La Chine occupe solidement la première place en termes d’émission des GES et lutter contre le changement climatique sans elle, n’a aucun sens. Le forum de Durban est appelé à faire un pas vers l’élaboration du calendrier de réalisation d’un nouvel accord supposant une même responsabilité juridique pour l’ensemble des grandes économies du monde.
Sauver les souris et les cosmonautes
L’action combinée de deux produits bien connus à savoir une protéine spéciale et une substance antibiotique, peut sauver les êtres humains même en cas des doses de radiation létales. C’est la conclusion à laquelle ont abouti les biologistes de l’école de médecine de Harvard après les expériences sur les souris, la raison pour laquelle une étude plus poussée s’impose. La méthode pourrait éventuellement être appliquée sur les décontamineurs engagés sur les centrales nucléaires accidentées ou pendant les voyages spatiaux de grande durée comme la mission vers Mars.
Les doses élevées de radiation altèrent avant tout les cellules capables de se reproduire rapidement. Elles tapissent notamment les parois de l’intestin avec ses trous microscopiques par lesquels les bactéries nocives pénètrent facilement dans les vaisseaux sanguins et sont véhiculées dans tout l’organisme avec le flux sanguin. Il faut dont utiliser les antibiotiques pour éviter la septicémie. De cette façon, on sait depuis longtemps que nonobstant toutes les contre-indications, les antibiotiques aident dans une certaine mesure l’organisme à lutter contre les conséquences de l’irradiation.
Mais, d’un autre côté, les scientifiques savent qu’il existe la protéine BPI (bactericidal/permeability-increasing protein) qui joue son rôle dans la réponse immunitaire de l’intestin aux bactéries nocives. Le mécanisme de son action n’est pas bien étudié. Les biologistes de Harvard ont établi qu’il existe un rapport direct entre la radiation et la quantité de BPI après avoir examiné 48 patients ayant reçu une faible dose de radiation dans la cadre de préparation de greffe de moelle osseuse. Si le niveau de cette protéine a chuté des dizaines de fois par rapport à la norme chez certains sujets, on n’en a identifié en revanche aucune trace chez d’autres.
Le rapport une fois établi, on pouvait passer aux expériences. Les biologistes ont pris trois groupes de souris qui ont reçu une dose de radiation létale. Presque toutes les souris du premier groupe témoin ont péri un mois plus tard. Les animaux du deuxième groupe traités à l’antibiotique fluoroquinolone au large éventail d’action, ont donné un taux de survie de 40%. Ce taux était de 80% dans le troisième groupe traité à la BPI et à la fluoroquinolone. Les résultats obtenus présentent un grand intérêts et cette méthode pourrait rendre de précieux services au décontamineurs de Fukushima, estime Elena Bourlakova, vice-directrice de l’Institut de physique biochimique. «Je pense que les liquidateurs-décontamineurs de la centrale de Fukushima pourrait en profiter. De moment que certains d’entre eux ont reçu une dose quasiment létale je préférerais en tant que biologiste le traitement par ces produits. Il en est de même des malades atteints du cancer dans un stade avancé quand il y va de la vie ou de la mort. Certains cherchent à convaincre le monde que Fukushima était juste un accident mineur, que les doses reçues était minimes et sans danger et j’en passe. C’est le genre de discours qu’il faut éviter parce qu’une une étude très poussée s’impose», dit-elle.
Les travaux de décontamination des centrales nucléaires accidentées ne sont pas la seule source d’irradiation. L’absence d’une bonne protection contre la radiation constitue toujours un obstacle pour le vol piloté vers Mars, pourtant techniquement possible depuis les années 1970. Le rayonnement galactique atténué par les traces de l’atmosphère et le champ magnétique en orbite circumterrestre, est particulièrement dangereux dans l’espace interplanétaire. La double thérapie proposée pourrait donc protéger les cosmonautes lors des missions interplanétaires mais il faut bien calculer la dose, poursuit Elena Bourlakova. «Les cosmonautes constituent un cas à part. Si vous administrez un médicament très efficace, il faut espacer ses prises pour éviter les effets toxiques. Mais l’administrer trop rarement peut affaiblir l’effet protecteur. A son tour, l’administration d’une grande dose peut provoquer de graves ennuis parce que de nombreux produits sont assez toxiques».
Les auteurs de la double thérapie font état d’un détail important : les deux produits ne sont efficaces que s’ils sont administrés un jour après l’irradiation au plus tard. Il faudrait donc se prémunir contre les incidents radioactifs et constituer des stocks de BPI étant donné que les antibiotiques sont toujours sous la main.
On peut rappeler que les scientifiques soviétiques créaient également des produits qui ont permis de sauver des milliers de gens ayant reçu la dose létale et notamment les décontamineurs de Tchernobyl, mais ils avaient cet inconvénient qu’il fallait faire une injection toutes les trois heures. D’ailleurs, encore plus tôt, en 1947, quand plusieurs pays étaient engagés dans la course aux armes nucléaires, l’URSS possédait déjà un bon produit antiradiation sous le nom d’ASD (antiseptique-stimulant de Dorogov). Il était fabriqué à base de grenouilles. On peut se demander pourquoi il a été si longtemps classifié et peu utilisé. L’ASD est progressivement réintégré dans la pratique médicale. En outre, un vaccin unique permettant de combattre les très grandes doses de radiation a été crée cette année dans le centre de recherches biomédicales de Vladikavkaz.
Les innovations engagent l’avenir
La reprise de la production des technologies de pointe sur la base des recherches et des dossiers scientifiques est la tâche de loin la plus importante pour la Russie, - a déclaré le prix Nobel de physique Jaurès Alferov à la première conférence des experts de Skolkovo. Il a également cerné les sources du renouveau de la science russe et les objectifs de son développement.
Selon Jaurès Alferov, une bonne tendance se manifeste depuis quelques années en Russie à savoir que les scientifiques et surtout les investisseurs ne craignent plus les projets innovants dont la demande ne cesse de croître. Si on fait un rapprochement avec l’histoire du 20e siècle, on peut en tirer la conclusion que la science russe est à la veille d’une nouvelle avancée, estime le prix Nobel russe.
«Je pense au projet nucléaire soviétique qui était la réponse à un autre projet innovant réussi. Celui de Manhattan. De mon point de vue, ces deux projets comptent parmi les meilleures réalisations scientifiques du 20e siècle. Ils ont servi non seulement à développer les systèmes d’armement mais ont donné naissance à un foisonnement des technologies nouvelles et des recherches scientifiques».
Le centre de Skolkovo est aujourd’hui un véritable moteur des innovations en Russie. Jaurès Alferov y occupe le poste de vice-président du Conseil scientifique consultatif en charge de sélection des projets patronnés et financés par Skolkovo. Le Conseil se compose d’éminent scientifiques russes et étrangers qui se montrent tous optimistes en ce qui concerne le développement de la science en Russie, précise Jaurès Alferov.
«Nos collègues étrangers entrent dans le Conseil scientifique de Skolkovo dans la proportion de 40%. Je voudrais souligner que les réunions précédentes du Conseil ont montré que nous sommes tous intéressés à la promotion de la science en Russie qui doit se doter de nombreux centres de recherches dont Skolkovo. Je répète toujours que Skolkovo est plus qu’un site, c’est l’expression d’une certaine idéologie qui a pour vocation de soutenir et de faire aboutir les projets scientifiques et technologiques».
Le prix Nobel russe a également ajouté que face à une multiplication rapide du nombre de projets innovants, il importe de se définir à temps quant à la voie magistrale du développement de la science. Il convient de financer en priorité les projets les plus intéressant et aboutissant sur des applications pratiques. Ces projets concernent aujourd’hui la physique, la médecine, les technologies IT et, bien évidemment, la production d’énergie.
Une université flottante
La décision de créer une «université flottante» a été prise à Arkhangelsk pour former des spécialistes de l’Arctique. Les étudiants du nouvel établissement seront basés sur le navire-laboratoire «Professeur Moltchanov» où ils pourront à la fois étudier la théorie et s’initier à l’Arctique pour la sentir «au bout des doigts» comme disent les pédagogues.
Ce projet pilote est réalisé grâce au concours de l’Université de l’Arctique (SAFU) et de la division nord du Service météorologique national. Le nouvel établissement ouvrira ses portes au début de l’été prochain. Le navire-laboratoire sillonnera durant un mois les eaux des mers Blanche et de Barents. La première expédition en haute mer réunira 25 étudiants de SAFU et des chercheurs du service météo et de l’Institut de recherches d’Arctique et d’Antarctique. Alexandre Gouriev qui dirige le département science de SAFU a parlé à notre radio du programme prévu des recherches scientifiques. «Les recherches porteront surtout sur l’hydrographie, c’est-à-dire sur l’étude des courants marins et des glaces bien que le bateau ne soit pas conçu pour naviguer dans les hautes latitudes. Un autre volet concerne l’étude de la zone côtière de la mer Blanche y compris l’archipel Solovetski et le Spitzberg pour se documenter sur l’état de pollution de ce territoire et sa diversité biologique», explique-t-il.
Les étudiants pourront profiter de ce voyage pour s’initier aux rigueurs du climat arctique, s’enrichir d’une expérience précieuse et apporter leur contribution à l’étude de l’Arctique. L’expédition a ceci de particulier qu’elle marque la reprise des recherches dans cette région après une interruption de plus de dix ans, précise Vladimir Chevtcheko, chargé de recherche à l’Institut d’océanologie. «Les navires russes naviguaient régulièrement le long de cette ligne dans le sens sud-nord déjà au début de 20e siècle pour mesurer les paramètres hydrologiques dont la température, la salinité etc. C’était ce qu’on appelait «la coupe séculaire de la mer de Barents » qui suit approximativement le degré 40 de longitude est. Il s’agit des mesures régulières prises tout au long des dizaines d’années. Le monde entier est actuellement préoccupé par le réchauffement global. Or, il faut connaitre les variations de températures depuis un siècle pour faire les conclusions statistiquement fiables. Une raison de plus pour reprendre ce travail».
Le navire-laboratoire «Professeur Moltchanov» qui porte le nom du météorologiste russe Pavel Moltchanov, inventeur de la première sonde radio au monde, sera la base permanente de «l’université flottante». Ne se rendront en Arctique que ceux qui ont réellement décidé de se consacrer à l’exploration de cette région. Le recrutement se fera sur concours parmi les étudiants en fin d’études universitaires et les boursiers de thèse et sera précédé d’un stage de formation sur la côte.