La Russie va mettre en service une station radar d’alerte avancée à Kaliningrad et doter les nouveaux missiles balistiques stratégiques russes «de systèmes capables de franchir le bouclier antimissile et de nouvelles ogives hautement efficaces», a annoncé le président russe Dmitri Medvedev.
Il faut rapeller que les autorités russes étaient au départ très sceptiques par rapport aux déclarations du prédécesseur de Barack Obama – George W. Bush – selon lesquelles le système ABM avait pour but de parer exclusivement la menace des missiles émanant des pays dits «voyous», avec l’Iran en tête. En revanche, le fait que la station radar, dont la construction était prévue en République Tchèque, serait capable de contrôler les forces de dissuasion russes dans la partie européenne de la Russie, ne suscitait aucun doute. Qui plus est, plusieurs pays de l'Europe de l'Est, et en premier lieu la Pologne, ont essayé de profiter des divergences entre la Russie et les Etats-Unis. Varsovie a annoncé la nécessité d’accueillir sur son territoire des batteries de missiles intercepteurs américains «Patriot» pour parer à d’éventuelles mesures russes en réaction au bouclier antimissile des Etats-Unis.
De ce fait, la décision du président Obama de renoncer au plan d’installer la station radar en République Tchèque et des missiles intercepteurs en Pologne semblait être l’un des éléments clés du «redémarrage» des rapports russo-américains, qui était annoncé par le nouveau maître de la Maison Blanche. La Russie a avancé une série de propositions, allant d’un aperçu commun des menaces de missile existantes et de la création d’un bouclier antimissile fonctionnant par secteurs, à la conception d’un système global capable de protéger toute la planète contre des missiles et diverses menaces pouvant provenir de l’Espace.
Infographie: Bouclier antimissile européen: la position russe
Néanmoins, toutes les initiatives de la Russie rencontraient une réaction polie, mais négative des Etats-Unis et de l’OTAN. Par ailleurs, Washington a conclu une série de nouveaux accords avec ses alliés européens. Ces derniers prévoient le déploiement des éléments mobiles du bouclier antimissile d’une nouvelle génération sur un vaste espace allant de la Pologne à la Roumanie et la Turquie, ainsi que leur embarquement sur des navires de guerre américains en Méditerranée. C’est-à-dire sur tout le périmètre occidental et méridional de la Russie, a précisé dans l’entretien avec le correspondant de Voix de la Russie le directeur du Centre russe des études politiques et sociales Vladimir Evséev.
«Je crois que la Russie doit concevoir son propre système de défense antimissile», explique-t-il. «Et en l'absence des garanties que le bouclier antimissile américain ne vise pas la Russie, il est en effet très difficile de parler d’une interaction réelle. Il faut, néanmoins, poursuivre le processus des négociations pour trouver de nouvelles solutions possibles, notamment sur le plan d’un échange rapide et véridique de l’information, très important au regard de la pratique militaire».
En annonçant des mesures militaires de rétorsion, la Russie appelle en même temps à ne pas faire monter la tension à ce propos. Selon l’Ambassadeur de Russie à l’Alliance nord-atlantique Dmitri Rogozine, le président Medvedev a donné l'instruction aux négociateurs de poursuivre les consultations avec les Etats-Unis sur leur bouclier antimissile tant que Washington n’aura pas passé le «point de non retour». En même temps, d’après Rogozine, la Russie n’admettrait pas de «nouvelle course aux armements».
