Dans son interview accordée aux directeurs des trois principales chaînes nationales russes, le premier ministre Vladimir Poutine a exposé les principaux postulats de son credo politique. Il a non seulement expliqué pourquoi il avait l’intention de revenir au Kremlin, mais a également fait comprendre qu’il considérait une autre issue de la présidentielle comme dangereuse pour le pays. Afin d’éviter ces risques, il est proposé aux électeurs de conclure un nouveau contrat avec les autorités qu’on pourrait intituler "Les voix en échange de la stabilité."
Des précédents historiques ont été également cités: le président américain Franklin Roosevelt (quatre mandats présidentiels et son New Deal, l’ancien chancelier allemand Helmut Kohl (16 ans à la tête de l’Allemagne) et le président français Charles de Gaulle.
Comme nous le savons, les pensées exprimées pendant une polémique paraissent plus convaincantes. Poutine a exposé ses propositions sous la forme de griefs envers ses opposants de gauche et de droite.
Premièrement, il a appelé les électeurs à ne pas se démotiver, en déclarant que l’issue de la présidentielle était loin d’être prédéterminée par l’accord de "roque" conclu entre lui et le président sortant Dmiri Medvedev.
Deuxièmement, Vladimir Poutine a rappelé aux partisans potentiels des communistes et de l’extrême-gauche que le parti communiste (PCUS) avait "mis en place les conditions nécessaire pour l’effondrement de l’Union soviétique" à son époque en instaurant le système de tickets de rationnement. Et pour cette raison (et ce message était destiné à toute l’opposition radicale) la position "ce ne sera pas pire" est irresponsable, car cela a conduit aux bouleversements à la fin des années 1980 et au début des années 1990.
Troisièmement, Poutine n’a pas épargné ses opposants de droite, les libéraux. Le premier ministre russe a fait preuve d’ironie quant au surnom que l'Occident lui a donné ("le faucon […] est un oiseau sympathique, mais, en fait, je suis un homme") et a promis de renforcer la "véritable démocratie directe", capable de renforcer le lien entre le peuple et le pouvoir, même si le parti Russie Unie demeure la principale force politique du pays.
Il convient de noter que dans ses dispositions fondamentales, le credo de Poutine coïncide avec celui de Medvedev. Evidemment, il y a des nuances, des particularités personnelles, chose dont Dmitri Medvedev a parlé deux semaines auparavant dans une interview accordée à ces mêmes directeurs des trois principales chaînes de TV russes.
Si le président parle des réformes progressives (par exemple, l’abaissement du seuil de 7% pour entrer à la Douma (chambre basse du parlement russe) à 5% en 2016), Poutine évoque la stabilisation et le renforcement du système politique existant. Si Medvedev dit vouloir voir un parlement russe représentatif de tout l'éventail des opinions publiques, Poutine souligne sa volonté de voir Russie Unie en tant que vainqueur.
L’expérience montre qu’il n’y a là aucune contradiction dramatique: le parlement peut très bien être polychrome et gérable. Mais le degré de cette polychromie est une autre question.
L’interview de Vladimir Poutine montre qu’aux législatives la lutte sera féroce, sans se faire de cadeaux. La principale force doit gagner. Et en tant que tête de liste du parti Russie Unie, Dmitri Medvedev devra s’impliquer complètement dans cette lutte. Medvedev en est parfaitement conscient. Ce n’est pas par hasard que samedi, lors de la réunion avec ses partisans, il a pour la première fois décrit aussi précisément son choix du parti au pouvoir: "Je suis la chair de la chair de Russie Unie."
Dans son interview, Vladimir Poutine s’est efforcé d’expliquer que le maintien du pouvoir n’était pas pour Russie Unie un but en soi. Il a plusieurs fois souligné que la victoire de Russie Unie permettrait à Medvedev en tant que nouveau premier ministre de former un "gouvernement stable et efficace", et cela coïncide avec l’emphase du discours du président prononcé samedi devant ses partisans.
Les deux leaders russes ont également des points de vue identiques sur deux autres points clés. Premièrement, Poutine a confirmé qu’il y a quatre ans il s’était entendu avec Medvedev pour proposer à la population russe la "reconfiguration du pouvoir", lorsque le mandat du président actuel arriverait à son terme. Deuxièmement, le président et le premier ministre ont la même attitude négative envers le "chassé-croisé ministériel", car ils ont répondu de manière très similaire aux accusations concernant le maintien en fonction des ministres impopulaires.
Et même s’il existe une différence, elle concerne seulement les nuances. En parlant de l’avenir, Dmitri Medvedev évoque un "grand gouvernement", qui comprendrait les représentants de divers milieux, tandis que Vladimir Poutine parle d’un cabinet "efficace", dont la création sera possible grâce à la victoire de Russie Unie.
Les opinions des deux leaders concernant la politique étrangère se rejoignent également. Dans l’interview, Poutine a adopté une position centriste sur cette question en déclarant qu’il continuerait à défendre les intérêts nationaux de la Russie sans accoler au pays "l’étiquette de superpuissance."
"Hier, aujourd’hui et demain nous avions et adopterons toujours une politique étrangère destinée à créer des conditions favorables au développement du pays. Cela signifie que nous voulons avoir des relations de bon voisinage et amicales avec tous nos partenaires", a déclaré Poutine en faisant remarquer que ses collègues ont toujours défendu "correctement" les intérêts de la Russie sur la scène internationale. Apparemment, Medvedev, qui a connu, en tant que président, la guerre russo-géorgienne en août 2008, le progrès dans les relations avec l’OTAN au sommet de Lisbonne et le redémarrage avec les Etats-Unis, pourrait souscrire à chacune de ces paroles.
Le format qui devient habituel de la communication entre les dirigeants russes et l’électorat par le biais d'un entretien avec les directeurs des trois chaînes de TV est en réalité très efficace pour le gouvernement. Toutefois, les questions des "patrons" de la télévision russe dans les deux interviews se réduisaient à une seule: pourquoi la situation ne peut-elle pas être différente en Russie? Medvedev et Poutine expliquent patiemment. La population écoute. L’Occident maugrée dans sa barbe.
Bien que cette question puisse être également posée à l’Union européenne et aux Etats-Unis. Car contrairement aux pays d’Europe de l’Est, l’Occident n’a pas proposé à la Russie de réelle perspective européenne et une intégration réelle, et non pas purement formelle, dans les institutions occidentales.
Toutefois, les électeurs russes doivent également eux-mêmes se poser des questions. C’est à eux qu’il appartient de décider si le "renouvellement substantiel du parlement dans le cadre de la fraction Russie Unie" prévu par Poutine aura lieu, ou si ce renouvellement suivra une autre voie. L’individu a toujours le choix. Et il n’est pas nécessaire d’écouter ou de lire les interviews des politiciens pour le savoir.
L’opinion de l’auteur ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction
Poutine explique son retour au Kremlin
17:08 18.10.2011 (Mis à jour: 16:05 05.10.2015)
© RIA Novosti . Aleksey Nikolskiy / Accéder à la base multimédiaInterview de Vladimir Poutine à la TV russe
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Dans son interview accordée aux directeurs des trois principales chaînes nationales russes, le premier ministre Vladimir Poutine a exposé les principaux postulats de son credo politique.