Le musée du Jouet de Serguiev Possad est une collection exceptionnelle de pièces très anciennes mais aussi contemporaines. Fondé en 1918 le musée est devenu le premier musée du jouet en Europe. Collecter, conserver et transmettre aux générations futures ces objets fragiles si chers aux enfants des générations passées et présentes: voici le but poursuivi par tous ceux qui sauvegardent et complètent ces collections uniques.
Le musée a été fondé par l'artiste et collectionneur Nikolaï Bartram (1873-1931). C'est lui qui a commencé à créer cette collection unique. Dans les années 1920 le musée est devenu l'un des musées les plus populaires de Moscou. Nikolaï Bartram a commencé sa collection au début des années 1910. C'est chez lui, dans un appartement situé au cercle des Jardins (Sadovoyé Koltso) que le musée du Jouet était initialement hébergé. Le 17 octobre 1918 le musée a déménagé au 8, boulevard Smolenskiy. C'était un hôtel particulier ayant appartenu avant la révolution à la veuve du chimiste Mikhaïl Lossev, citoyen d'honneur de Moscou et membre du Conseil d'Etat. Evdokiya Losseva était la deuxième épouse de Nikolaï Bartram.
En 1925 le musée a déménagé au 12/2 rue Kropotkinskaïa (actuellement rue Pretchistinka). Aujourd'hui ce bâtiment abrite le musée littéraire Pouchkine.
Au cours des années qui ont suivi le musée a accueilli les collections des œuvres de culture enfantine du palais Alexandrovskiy au Tsarskoïe Selo près de Saint-Pétersbourg, du palais Livadiyskiy, de l'école Stroganovskaïa ainsi que les collections privées.
Le musée du Jouet a participé à de nombreuses expositions. Au mois de mars et d'avril 1922 il a participé à l'Exposition artistique et industrielle nationale. En 1925 et 1926 il a accueilli le festival des guignols. Le musée a organisé les cours de fabrication de jouets formant 300 spécialistes par an. Des excellentes collections, les visites bien organisées, les méthodes novatrices de travail avec les enfants – tout cela a largement contribué à la popularité du musée. Dans les années 1920 le musée du Jouet était presque aussi populaire que la galerie Tretiakov. Nikolaï Bartram a été directeur du musée jusqu'à sa mort en 1931.
En 1931 le musée du Jouet a quitté Moscou pour la ville de la région moscovite, Zagorsk. C'est le nom qu'a reçu après la révolution Serguiev Possad, la ville liée à l'un des saints les plus populaires de Russie,Serge de Radonège. C'est la ville où se trouve la laure de la Trinité-Saint-Serge, l'un des plus importants monastères orthodoxes russes.
Au XIX siècle Serguiev Possad était considéré comme la « capitale du jouet russe » 80% de sa population étant liés à la production de jouets. Apparus à la fin du XVIII siècle, le jouet en bois était en relation étroite avec la culture urbaine en incarnant les images inspirées par la vie au ralenti de la province. Parmi les jouets transitionnels de Serguiev Possad, il y a les dames et les hussards taillés en bâtonnets de 20-40 cm de haut et méticuleusement peints, les « babioles chinoises » c'est-à-dire les figurines de 3 cm de hauteur représentant les marchands, les paysans, les moines, les ours ainsi que toutes sortes de cavaliers et soldats. Mais c'est laure de la Trinité-Saint-Serge qui dominait la vie de la ville en attirant les croyants de toute la Russie et qui s'est incarnée dans le premier jeu de construction russe, « Cathédrale de Sainte Trinité ».
Depuis 1980 le musée du Jouet se trouve dans un hôtel particulier surplombant l'étang Kelarskiy et hébergeant autrefois une école commerciale. Ce bâtiment en brique rouge reste l'une des curiosités de la ville.
C'est ici qu'habitent les jouets en toute sorte dont les jouets faits par les enfants, les œuvres artisanales et les jouets fabriqués par les professionnels.
Les jouets populaires du XIX et XX siècles constituent la collection la plus importante du musée. Il s'agit des jouets en argile, en bois, en paille, en tissu et en papier mâché.
Le jouet en argile russe est unique et extrêmement varié. Il existe beaucoup d'écoles et de traditions de fabrication de celui-ci. Le musée du Jouet présente les jouets en argile de Ryazan, de Kalouga, de Toula, de Koursk, d'Orlov, de Nijni Novgorod, de Lipetsk et de Vyatka.
Parmi les chefs d'œuvre d'art populaire il y a les jouets des artisans inconnus de province de Tambov datant du début du XX siècle. Les flûtiaux en forme de cerf et de canard, le jouet « Troïka » montrent le meilleur de l'art des potiers travaillant dans le respect des traditions populaires.
Le bois est une autre matière largement utilisée pour la fabrication des jouets. Les traditions russes du jouet en bois sont extrêmement riches. Les artisans russes affectionnent tout particulièrement les images de cheval, de bobonne et d'oiseau. Ces images archaïques se sont diversifiées par la suite : cheval à roulettes, dames et poupées russes, toutes sortes d'oiseau, poules et coqs. Dans la région de Volga et à proximité des grandes villes de Russie centrale le jouet en bois était appelé « le produit de bûchette » ou encore « le produit de hache ».
L'un des symboles du jouet en bois, le « troïka de Gorokhovets » est un exemple marquant de sculpture sur bois.
Le jouet russe est très musical. Le musée a une collection consacrée à des liens existants entre les traditions musicales, l'éducation et les jeux d'enfants.
Pour nos ancêtres le bruit produit par les objets fait main devait protéger contre le mal. Avant de devenir un jouet le flûtiau et le hochet étaient utilisés pour des rituels magiques.
Le musée du Jouet dispose de pièces uniques en provenance des villes anciennes de Russie – Tver, Radonege, Kolomna – et datant du XII-XVI siècles. C'est le hochet qui est devenu le premier objet à être utilisé comme jouet. Des matériaux très variés étaient employés pour sa fabrication : citrouilles séchées, capitules de pavot, coquilles, cailloux, etc. En Russie le hochet était en écorce du bouleau, en bois ou en argile.
Le flûtiau était pour le moins aussi populaire chez les enfants que le hochet. C'était le jouet musical le plus répandu dans toutes les cultures du monde. Il existe un grand nombre de variétés de flûtiau : cornes, pipeau, sifflet, « rossignol ».
Ce dernier représente un minuscule récipient en argile avec une tubulure creuse servant aussi de poignée. En remplissant le récipient avec de l'eau et en sifflant dans l'embouchure, on obtient des sifflements et des claquements ressemblant au chant de rossignol.
Le flûtiau russe est fabriqué en argile. Les formes utilisées par les artisans russes sont assez peu nombreuses : femme, oiseau, cheval, cavalier, ours. C'est dans les dimensions, les couleurs et l'ornement que réside l'originalité de chaque flûtiau.
Ayant des formes très variées le flûtiau en bois était largement répandu dans des cultures différentes du monde. Le musée du Jouet dispose des flûtiaux russes et yougoslaves, allemands et suisses, indiens, chinois et japonais.
Outre le hochet et le flûtiau, une cliquette était beaucoup utilisée dans les jouets russes. L'exemple typique d'un jouet à cliquette, c'est le tambour en bois monté sur une boîte. Lorsqu'on tourne la poignée une baguette touche des lamelles en bois qui émettent alors le bruit ressemblant au tambourinage.
Entre le tambour chinois et le tambour japonais il y a un instrument datant du début du XX siècle et fabriqué au Caucase. Il est composé de deux récipients communicants en forme de poire tendus de vésicule.
La collection de poupées en tissu est unique. Elle présente cette pièce particulière dans son évolution: différents types de poupées, poupées faites par les enfants et les adultes, par les artistes et les amateurs. La collection montre une multitude de procédés de fabrication de poupée en tissu.
Le musée dispose d'une pièce unique: une poupée de 1870 faite par une fille âgée de 6 ans du village de Plotino près de Novgorod.
La plupart de poupées ne sont pas datées, leurs auteurs sont inconnus tout comme leur provenance. Mais il y a des chefs d’œuvre incontestables tels que cette poupée très riche de 38 cm de hauteur en robe de soie cramoisie ornée de broderies et de perles.
La poupée en tissu a progressivement évoluée en devenant plus élaborée et en grandissant. Cela est surtout caractéristique pour des poupées fabriquées dans les villes.
La poupée représente le plus souvent la femme mais il en existe quelques-uns du sexe masculin. Le musée du Jouet dispose de plusieurs poupées représentant des garçons. On peut aussi y voir une poupée très originale à la limite du grotesque, représentant le chausseur et ayant appartenu jadis à un collectionneur privé.
La poupée russe a souvent des traits grossiers mais est toujours orientée vers les valeurs morales propres à la culture populaire russe.
Enfin, le musée du Jouet expose sa collection de poupées russes y compris la première matriochka du début du XX siècle.
Le musée du Jouet de Serguiev Possad offre ainsi une occasion de suivre l'évolution du jouet populaire russe étroitement lié à l'ensemble de la culture russe.