Les autorités européennes et américaines devraient prendre des mesures urgentes pour stabiliser leurs économies faute de quoi une nouvelle crise globale est inévitable, déclare le président de la Banque mondiale.« Nous assistons à la naissance de la tempête tandis que suite aux derniers événements aux Etats-Unis et en Europe il y a beaucoup d’acteurs sur le marché qui ont perdu confiance en politique économique d’un nombre d’Etats du monde, constate Robert Zoellick. Mais si pour la majorité d’habitants de notre planète la crise économique est une vraie catastrophe, il y en a ceux qui réussissent à en profiter ».
La crise de 2008 a montré qu’à la différence des représentants de l’« économie réelle », les financiers savent faire de l’argent sur la récession. Qui plus est, ils sont même capables de déclencher cette dernière. Le nom de Bernard Madoff, le fondateur d’une société d’investissements du même nom, est toujours sur toutes les lèvres. En dressant la liste des meilleurs escrocs financiers de l’année 2008 le magazine « Forbes » lui a attribué la première place. L’effondrement de la pyramide financière de Madoff est alors devenu l’une des causes du grand choc. Les autres ont su en profiter. C’est le cas du fameux Georges Soros qui, en pleine crise, a rajouté deux milliards de dollars à ses 11 milliards de fortune. C’est aussi le cas du financier Andrew Beal qui a tiré 4,5 milliards du rachat des papiers monétaires.
Certains banquiers russes ne sont pas restés les bras croisés en voyant approcher la crise globale. Les autorités russes enquêtent actuellement sur leurs spéculations financières. L’un d’eux, c’est Andreï Borodine, l’ancien directeur de la banque « Bank Moskvi » ayant appartenu au gouvernement moscovite. Aujourd’hui M. Borodine se trouve à Londres et fait l’objet du mandat d’arrêt international. Il est accusé d’abus de fonctions ayant causé à l’Etat le préjudice de plusieurs milliards de dollars. Borodine a mis en place des schémas ingénieux pour accorder des crédits à des sociétés affilées pour la plupart à lui-même. Les sociétés en question n’ont jamais payé. Elles n’avaient tout simplement pas d’argent leurs actifs étant fortement inférieurs au montant des prêts. Et puis il y a eu la crise. Pourtant la direction de la banque n’a jamais hésité à se faire grassement payer même dans la période la plus difficile, celle d’après la crise. Les directeurs ont encaissé des millions de dollars en guise de dividendes, bonus et compensations – pour ne pas trop ressentir la pression des problèmes de l’économie mondiale…
Les actifs de la « Bank Moskvi » ont été acheté par la banque russe « VTB ». Le président adjoint de la banque « VTB », Andreï Poutchkov raconte :
« Les prêts ont été accordés à des sociétés n’ayant aucune activité courante, qui n’avaient pas de salariés à l’exception du directeur qui remplissait aussi les fonctions de comptable en chef, à des sociétés dont les fondateurs étaient soit des non-résidents, soit des personnes physiques qui n’avaient souvent même pas d’idée de ce qu’ils figuraient comme fondateurs de ces sociétés-là ».
Le montant des prêts accordés dépasse 3 milliards de dollars. L’action pénale engagée à son encontre n’a cependant pas empêché M. Borodine à faire partie du top-100 d’hommes d’affaires russes ayant plus d’un milliard de dollars de fortune. A noter qu’en 2009 sa fortune était deux fois moins importante. Il paraît que les deux années écoulées depuis lui ont permis de bien profiter des possibilités qui s’offraient à lui en tant que membre de l’équipe de l’ex-maire de Moscou, Youri Loujkov.
Un autre banquier russe, Serguei Pougatchev, le propriétaire de la banque « Mejprombank » qui a fait faillite, est aussi dans le viseur de la justice. La direction de cette banque est accusée d’« actes illicites lors de la procédure de la mise en faillite » et de « faillite délibérée ». Les créanciers de cette banque, jadis l’une des plus grandes en Russie, ont subi le préjudice qui se chiffre par plus d’un milliard de dollars, dit le porte-parole du Comité d’enquête de Russie, Vladimir Markine :
« Suite aux agissements illicites et aux violations de la législation régissant les activités des établissements de crédit, de la part des dirigeants et des fondateurs de la « Mejprombank » les créanciers de celle-ci ont subi le préjudice s’élevant à plus de 34 milliards de roubles ».
L’enquête sur l’éventuelle soustraction des fonds alloués par la Banque centrale russe en 2008, a été lancée il y a six mois. Mais ce n’est qu’aujourd’hui qu’on voit l’ampleur des dégâts. L’Etat a alloué des fonds pour soutenir les entreprises du secteur réel de l’économie mais où est cet argent maintenant ? Les enquêteurs supposent qu’une partie de cet argent avait été transférée à l’étranger.
Dès 2009 le contrôle effectué par la Banque de Russie a montré que la « Mejprombank » n’avait dépensé que 7% des fonds empruntés pour financer des entreprises industrielles y compris celles appartenant à M. Pougatchev et faisant partie du groupe « Ob’edinennaya promychlennaya korporatsia » qui, comme il s’avère aujourd’hui, n’avaient pas besoin de financement. Quant à la structure du droit de propriété sur les principaux actifs du groupe, elle était loin d’être transparente. Des personnes morales enregistrées dans les zones offshores n’étaient que des personnes interposées alors que c’est M. Pougatchev et les membres de sa famille qui étaient les vrais propriétaires de la « Mejprombank ».
Tout cela a éveillé les soupçons de la Banque de Russie dès 2005. L’organisation financière de Pougatchev n’a même pas pu intégrer le système d’assurance des fonds, souligne le président de l’Association des banques russe, Gareguine Tossunyan :
« La Banque centrale russe avait des doutes concernant la « Mejprombank » depuis longtemps. Il n’était pas tout à fait clair qui étaient les bénéficiaires, les destinataires du prêt. On soupçonnait que tout mène à un même et seul emprunteur. Au final, ces soupçons se sont confirmés. Cela est devenu évident après le retrait de la licence. La banque était sur toutes les lèvres, elle créait des problèmes pour l’organisme de régulation. Elle était connue sur le marché pour son penchant à l’aventurisme c’est-à-dire lorsque de grosses sommes d’argent sont investies dans de grands projets. Mais en même temps le lien entre tous ces projets et les mêmes et seuls bénéficiaires était beaucoup trop évident ».
Depuis le banquier Pougatchev a perdu une partie de son argent. Mais il lui en reste beaucoup : une compagnie pharmaceutique américaine, le quotidien « France Soir », une participation au bureau d’étude Soukhoï, un terrain de dizaines d’hectares dans la région de Leningrad, des biens immobiliers en Europe et deux avions Falcon-2000.
Le liquidateur judiciaire de la « Mejprombank », essaye à faire Pougatchev payer de ses fonds personnels. Une demande en justice a ainsi été introduite contre la chaîne « Hediard » appartenant à Pougatchev. Mais la chaîne se trouve au bord de la faillite. L’ex-banquier en fuite veut apparemment faire profil bas alors qu’il n’y a pas très longtemps, en 2010, Sergueï Pougatchev faisait partie du top-10 britannique des milliardaires.