L’industrie touristique russe va connaître des changements. Dès cette année, 62,5 millions d’euros du budget seront alloués au développement du tourisme dans six régions du pays. Et dans les sept prochaines années, plus de 7,5 milliards d’euros seront dépensés pour l’infrastructure touristique. Les représentants de l’industrie touristique avertissent qu’il s’agit d’une mesure sérieuse de la part de l’Etat, mais que sans le règlement des problèmes des transports et des services à la hauteur de l'objectif assigné, l’argent pourrait être dépensé en vain.
L’effort de créer une image positive
Aujourd’hui, la Russie fait partie des outsiders en termes d’investissements dans l’industrie touristique. Selon le classement du Forum économique mondial (FEM), la Russie occupe seulement la 91e position en termes de dépenses pour le développement du tourisme. Mais la situation semble changer. Prochainement, le gouvernement russe examinera un programme fédéral de développement du tourisme pour 2011-2018. Le chef de l’Agence fédéral russe du tourisme Alexandre Radkov en a parlé.
Le fonctionnaire a expliqué que plus de 7,5 milliards d’euros seraient dépensés pour mettre en œuvre ce programme, dont 2,4 milliards du budget fédéral, et le reste devrait être investi par les régions et les investisseurs privés.
"Il s’agit du premier programme de ce genre mis en œuvre au niveau de l’Etat, a expliqué à RIA Novosti Iouri Barzykine, vice-président de l’Union russe de l’industrie touristique (RST). Il a pour objectif la création et la promotion du produit touristique compétitif, le développement de l’infrastructure touristique et la création d’emplois."
Le vice-président de la RST, en se référant aux informations de la Banque centrale de Russie, a souligné que les Russes qui étaient partis à l’étranger en 2010 (tourisme, affaires, études, etc.) ont exporté du pays environ 26,5 milliards de dollars, et les étrangers venus en Russie ont apporté seulement 8,9 milliards de dollars. La différence est très importante: 17,6 milliards de dollars. "Et cet indice augmente chaque année", a déclaré Iouri Barzykine. Selon le ministère russe du Sport et du Tourisme, le nombre de Russes partis en vacances à l’étranger en 2010 a augmenté de 32% par rapport à 2009, en dépassant 12 millions de personnes. Mais seulement 2,4 millions d’étrangers sont venus se reposer en Russie.
L’Etat espère renverser cette tendance. "La mise en œuvre du programme devrait contribuer à la croissance du flux touristique, à l’augmentation des services touristiques payants et au développement de l’image positive des régions russes", déclare Iouri Barzykine.
Un appât pour les investisseurs
La Russie possède effectivement un potentiel susceptible d'attirer les touristes. Selon l’évaluation des experts du FEM, la Russie occupe la 5e place dans le monde en termes de ressources touristiques naturelles, et la 9e place en termes de sites du patrimoine culturel.
Selon le vice-président de la RST, les premiers 62,5 millions d’euros dans le cadre du programme pour le développement touristique seront alloués dès cette année. Ils serviront à créer sept pôles touristiques prioritaires dans six régions russes: Ivanovo, Pskov, Riazan, Rostov, Iaroslavl et dans l'Altaï.
"Dans le cadre du programme, l’argent servira à construire des routes, des voies de communications, des systèmes de distribution d’eau et des réseaux électriques. Les investisseurs doivent arriver sur un terrain déjà aménagé où ils pourront créer des sites d’infrastructure touristique", explique Alexandre Radkov.
Toutefois, il faut tenir compte de la spécificité du climat et de la géographie de la Russie. Il est plus difficile de faire un business touristique rentable en Russie que dans les pays où il fait chaud toute l’année. Ainsi, dans la majorité des régions il n’est tout simplement pas rentable de construire des hôtels en bord de plage avec le même niveau de service que sur les rives des pays chauds.
Selon le fonctionnaire, cela explique en partie le coût élevé des hôtels russes situés sur les côtes. La seconde raison est l’absence de la concurrence. Et ici la Russie compte sur les investisseurs qui n’auront pas peur d’investir dans la création d’une infrastructure de qualité qui contribuera au développement de la concurrence.
"On parle beaucoup du potentiel touristique du Caucase du Nord, mais on ne peut pas développer seulement les sports de montagne et essayer de faire chausser les skis à tout le monde. Le touriste doit avoir la possibilité de se baigner, d’aller à la montagne, de suivre des cures de remise en forme, etc.", explique Iouri Barzykine.
Les transports gâchent tout
Toutefois, l’infrastructure touristique de qualité avec des hôtels économiques et des conditions permettant de se divertir et de se ressourcer ne réglera pas tous les problèmes. Les coûts des services de transport et, surtout, des billets d’avion sont un sérieux obstacle.
Selon les prévisions de l’Organisation mondiale du tourisme (OMT), à terme la Russie pourrait accueillir jusqu’à 40 millions de touristes étrangers par an. "Mais ce miracle ne s’accomplira pas, déclare Iouri Barzykine. Il faut évaluer la situation objectivement. Il conviendra de beaucoup travailler pour augmenter le flux touristique." "Le flux touristique augmentera lorsque des conditions de transport correctes seront créées. Aujourd’hui, une semaine de vacances en Turquie avec la formule "tout compris" pourrait revenir moins chère qu’un billet d’avion aller en Russie", déclare la doyenne de la faculté des technologies d’affaires dans le tourisme de l’Université Nouvelle de Russie Natalia Morozova.
"Les dépenses pour les transports peuvent atteindre jusqu’à 40% du coût du produit touristique", affirme Iouri Barzykine. Apparemment, il ne faut pas s’attendre à des progrès concrets dans le règlement de ce problème. "L’Etat doit soutenir les compagnies aériennes low-cost et développer les transports économiques", estime le représentant de l’industrie touristique.
Le système de formation du personnel pour le secteur touristique claudique également en Russie. Selon Alexandre Radkov, la Russie manque de personnel qualifié, par exemple des femmes de ménage et des barmans.
Selon Natalia Morozova, le problème est dû au fait que les étudiants n’ont pas toujours la possibilité de suivre une formation pratique. Les employeurs doivent également être intéressés par la bonne formation du personnel, estime Natalia Morozova.
L’opinion de l’auteur ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction