Mouammar Kadhafi se dit prêt à se mettre à la table des négociations avec les insurgés, lit-on dans la lettre qu’il a adressée au Congrès des États-Unis. La médiation directe des États-Unis est la condition principale qu le colonel pose pour le début du dialogue avec l’opposition.
La lettre du leader de la Jamahiriya libyenne aux autorités américaines a été publiée par plusieurs médias américains simultanément. Dans son message Kadhafi appelle à « arrêter les destructions et à entamer les négociations en vue d’un règlement pacifique en Libye ». Il demande aussi aux États-Unis qu’il appelle « le grand pays démocratique » d’aider à « déterminer l’avenir du peuple libyen ». Les experts disent être surtout intéressés par deux question à savoir : pourquoi Kadhafi a décidé d’engager le dialogue avec l’opposition et pourquoi il attache un si grande importance au soutien des États-Unis.
En répondant à chacune de ces questions, ils déclarent d’un commun accord qu’il cherche à préserver non plus le pouvoir mais sa vie. La situation se trouve dans une impasse et s’il n »engage pas le dialogue avec l’opposition et les forces de l’OTAN, il sera tout simplement éliminé dans les jours qui viennent, a déclaré dans son interview à la Voix de la Russie le président de l’Institut du Proche-Orient Evgueni Satanovski.
Kadhafi n’a pu gagner à sa cause ni la Chine, ni la Russie, ni l’Inde qu’il cherchait à s’allier à coups, par exemple, de contrats pétroliers exclusifs. Il a fini par bien comprendre qu’il ne pourra pas venir à bout de l’OTAN militairement. Le secrétaire général de l’Alliance Fogh Rasmussen avait nettement déclaré que l’OTAN avait l’intention de mener une opération militaire à long terme et qu’une opération terrestre n’était pas à exclure. Kadhafi a compris qu’il devait choisir entre « la mort héroïque » et le repli au Sahara et une guérilla pendant un temps indéfini avec en fin de compte la même « mort héroïque ». A la veille le chef du Pentagone Robert Gates a critiqué ceux des pays de l’OTAN qui avaient voté pour l’opération militaire mais n’y participent pas. Kadhafi profite de cette division pour attiser la situation en s’adressant non pas à l’ensemble des pays de l’OTAN ou du moins à ses leaders, mais seulement aux États-Unis, - pense le politologue Sergueï Karaganov
Les opérations militaires de l’OTAN en Libye se poursuivent depuis plusieurs mois, les résultats se font attendre et la légitimité de cette guerre est en chute libre. Kadhafi se trouve dans une situation très difficile et cherche évidemment une sortie en essayant en même temps de diviser la coalition.
Les experts pensent en même temps que les États-Unis sont moins intéressés à la poursuite de la guerre que les autres pays de l’OTAN. Alors, si quelqu’un voulait faire cesser les hostilités dans les plus brefs délais, ce serait précisément Washington.
Kadhafi raisonne bien en se disant qu’Obama vient de s’engager dans la campagne électorale et qu’on ne cesse de lui demander : pourquoi les États-Unis font-ils la guerre en Libye? Obama retire ses troupes d’Afghanistan et de l’Irak et dépense en même temps un argent fou pour la campagne dont l’Amérique n’a que faire même du point de vue de ses intérêts pétroliers. En fait, c’est l’Italie qui consomme 30% du pétrole libyen, talonnée par la France (10%) et l’Allemagne (10%), alors que les États-Unis n’en consomment pas du tout.
Ajoutons que les autorités américaines n’ont pas encore réagi à la lettre de Kadhafi. Seul Marc Toner, directeur adjoint du service de presse du Département d’État a confirmé devant les journalistes que l’administration était au courant de la missive. Les experts doutent que les États-Unis acceptent de jouer le jeu de Kadhafi et que vraisemblablement Washington se tiendra à la position antérieure à savoir que le colonel doit partir le plus vite au lieu de chercher à se maintenir au pouvoir.