Tennessee Williams : prolongement des traditions du classique russe sur le sol américain

Tennessee Williams : prolongement des traditions du classique russe sur le sol américain
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« Nous sommes tous condamnés à une réclusion individuelle dans notre propre peau », - a relevé un jour le grand dramaturge, poète et écrivain Tennessee Williams. Ce classique de la littérature américaine de rayonnement international aurait eu 100 ans le 26 mars.

Pourtant, la phrase sur la solitude fatale ne s’étend pas du tout à l’œuvre de Tennessee Williams lui-même. Il a été de son vivant et reste presque trente ans après sa mort en 1983 le dramaturge dont les pièces ne quittent pratiquement jamais la scène. Pendant près d’un demi-siècle, depuis 1961, les pièces de Williams traduites en russe sont mises en scène en Russie. Cela a commencé par la première moscovite de sa pièce « Orphée descend aux enfers ». Le centenaire de la naissance du dramaturge est célébré à Moscou par ce drame dans une nouvelle mise en scène.

C’est encore à l’époque soviétique que les pièces de Tennessee étaient publiées dans la version russe et étaient si prisées des théâtres que l’éminent poète russe Evgueni Evtouchenko, après avoir rencontré le classique américain aux États-Unis, lui a proposé avec une pointe d’esprit de venir en URSS pour « récupérer les honoraires! » Williams a refusé. Certes, c’était l’époque ou l’attitude envers Tennessee Williams était, comme on dit «  très mitigée ». Les critiques russes l’accusaient publiquement du penchant pour le « biologisme », « la sensation et la cruauté » dont seraient imprégnés ses pièces qui étaient en revanche très bien accueillies par le public.

Détail intéressant, on explique souvent la consécration reçue par Tennessee Williams en Russie par son affinité avec Tchékhov et on évoque même le prolongement des traditions du classique russe sur le sol américain. Mieux encore, le prestigieux critique de théâtre Anatoli Smelianski pense « qu’il est même allé plus loin de Tchékhov vers la révélation des zones interdites et des secrets de la vie humaine ». Tchékhov était réellement une idole pour le jeune Tennessee Williams dont les « Notes de Trigorine » mises en scène en Russie s’inspirent de « La Mouette » de Tchékhov. Quand à la nouvelle de Tchékhov « Ma vie », elle a suggéré à Williams le sujet de son récit « La vigne ». Les critique relèvent aussi une certaine ressemblance au niveau des personnages dont les meilleurs sont des idéalistes nobles à la peau écorchée qui ne savent pas résister aux turpitudes de la vie.

Pourtant, l’œuvre de Tennessee Williams ne se réduit pas aux parallèles avec Tchékhov et il est « préférable de considérer son oeuvre à la lumière des traditions du théâtre américain ». C’est l’opinion exprimée dans une interview à la Voix de la Russie par Alexandre Livergant, traducteur de littérature anglo-américaine et rédacteur en chef de la revue « Lettres étrangères » de Moscou.

Je crois que tous les grands dramaturges du XXème siècle on puisé dans l’héritage du théâtre tchékhovien, - dit Alexandre Livergant. – Mais, en lisant Tennessee Williams, je n’ai pas vraiment décelé son influence. Après tout, chaque drame digne de ce nom doit se lire entre les lignes et fait une part belle à l’absurde. Il s’agit là des traits du théâtre du XXème siècle et Tchékhov n’est seul « en cause ». Tous les grands écrivains et dramaturges cherchent à pénétrer cherchent à pénétrer les secrets de l’âme humaine. D’un côté, Tennessee Williams possède sa spécificité mais, d’un autre côté il est ouvert sur le monde et su la modernité. Ses pièces comme « Le tramway nommé désir » et « La chatte sur un toit brûlant » sont parfaitement comprise et pas seulement par les Américains. Elles signifient également beaucoup pour le public russe d’autant plus qu’en Russie Tennessee Williams a eu la change d’être mis en scène et interprétés en Russie par les meilleurs réalisateurs et comédiens qui lui trouvaient bien des affinités avec les traditions théâtrales de souche nationale.

C’est surtout le cas de sa pièce « Le tramway nommé désir », ce chef-d’œuvre de Williams qu’on met le plus souvent en scène. On pourrait continuer les meilleures lectures des pièces du dramaturge américain par Anatoli Efros « L’été et la fumée », Lev Dodine « La rose tatouée » ou Henriette Yankovskaïa « La ménagerie de verre »… Qu’est-ce qui explique le caractère si attrayant et fascinant des drames de Tennessee Williams? On peut y répondre en citant l’historien de théâtre, le connaisseur et le traducteur de ses pièces Vitali Wulf : « En plus du sujet, on est fasciné par la pertinence des observations, la nature inédite des personnages et la capacité de ressentir la douleur humain comme la sienne propre. C’est pour cette raison que le caractère à la fois tragique et lyrique des pièces de ce grand Américain ne fascine et séduit tout le monde ».

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