Russie-Pologne: éviter un crash des relations

© RIA Novosti . Alexei Nikolskiy / Accéder à la base multimédiaLe premier ministre Donald Tusk
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Dès avant la publication du rapport du Comité intergouvernemental de l’aviation (MAK) sur les causes du crash du Tu-154 transportant le président de la Pologne, il était clair qu’il ne satisferait pas la majeure partie de l’élite politique polonaise.

Dès avant la publication du rapport du Comité intergouvernemental de l’aviation (MAK) sur les causes du crash du Tu-154 transportant le président de la Pologne, il était clair qu’il ne satisferait pas la majeure partie de l’élite politique polonaise. Les partisans du défunt président Lech Kaczynski et de son frère Jaroslaw, qui a manqué le poste présidentiel de seulement 4% lors de la dernière élection, ne souhaitent pas abandonner la version selon laquelle le service russe de l’aéroport serait responsable. Pour ces gens, le rapport du MAK mettant l'accent sur le fait que les actions des pilotes subissant la pression de leur commandement étaient la cause du crash, a des allures de cadeau. Comme quoi, le "prorusse" premier ministre Donald Tusk appelait en vain la Pologne à coopérer avec les Russes, "vous voyez bien comme ils nous détestent."

Mercredi, en début d’après-midi, il était devenu clair que M. Kaczynski avait l’intention de jouer la partie précisément de cette manière. A l’issue de la conférence de presse du MAK, l’ancien premier ministre polonais (2005-2007) a baptisé le rapport de "recueil de spéculations", bien qu’il n’ait pas eu l’occasion de se familiariser avec son contenu. "Le premier ministre Tusk n’a accepté aucune de nos propositions visant à obtenir le droit d’enquêter par nos propres moyens. Et en voici les conséquences: le rapport qui rend responsables les pilotes polonais, de manière unilatérale", a déclaré M. Kaczynski.

Le premier ministre Tusk a interrompu son congé familial pendant la conférence de presse: en Pologne on ne peut pas ne pas tenir compte de l’avis d’une personne qui a manqué seulement de quelque pour cent la victoire à la présidentielle. Donald Tusk devra certainement se justifier, car toutes les remarques de Varsovie validées par le premier ministre polonais et envoyées à Moscou sur 150 pages en décembre, n’ont pas été prises en compte. Les compatriotes exigeront certainement de Donald Tusk qu'il impose vaillamment la prise en compte intégrale par la Russie des remarques polonaises.

Que le MAK l’ait voulu ou non, M. Kaczynski a réussi à parvenir à ses fins: bon gré mal gré, la discussion tourne du mauvais côté. La question "Comment est-ce arrivé? " est remplacée par "Qui est responsable? "

Cependant, la chef du MAK Tatiana Anodina et son collègue Alexeï Morozov, qui ont présenté les résultats de l’enquête du MAK, ont souligné que leur objectif ne consistait pas à désigner les responsables de la catastrophe. Les responsables doivent être identifiés par les enquêteurs. Dans le cas présent, il ne s’agissait que des causes du drame, autrement dit de questions purement techniques. Néanmoins, la politisation de l’enquête a commencé en Pologne et on ne peut rien y faire.

Le fait est que la catastrophe de Smolensk a résulté d’un concours de circonstances fatales. Si M.Kaczynski n’avait pas décidé de se rendre à Katyn malgré la volonté de Donald Tusk et en dépit de l’absence de l’invitation russe… Si le statut de sa visite et de son voyage n’avait pas été aussi flou (civil selon le MAK, militaire selon Jaroslaw Kaczynski)… S’il n’y avait pas eu de brouillard… Si l’aérodrome avait clairement refusé à l’équipage du Tu-154 le droit d’atterrir… et surtout, si la Russie et la Pologne avaient alors été en bons termes… Les catastrophes arrivent surtout lorsqu’un grand nombre de "si seulement" s’accumulent. Peu à peu on découvre un grand nombre de responsables mais il n’y a pas de "meurtrier" précis, bien que certains veuillent le trouver à tout prix.

En aucun cas il ne faut imposer la responsabilité selon le principe ethnique. "Les Polonais sont les responsables" est une réponse aussi stupide aux questions posées concernant la catastrophe que la réponse "la faute incombe aux Russes." Immédiatement après la catastrophe les Russes et les Polonais ont été à la hauteur. Les premiers sont venus avec des fleurs à l’ambassade de Pologne, les seconds ont en grand nombre proposé leur amitié aux "Moscovites" longtemps diabolisés. Il faut poursuivre sur cette lancée.

Certains voudront saper nos relations, en détériorant nos points de repère moraux, à l’instar de celui qui a déréglé l’altimètre de l’avion présidentiel (le nom de ce "héros" demeure inconnu). Certaines forces politiques en Pologne ont déjà commis des lâchetés inimaginables dans ce sens. On a entendu un grand nombre de légendes au sujet du brouillard artificiel créé autour de l’aérodrome, des instruments de bord sciemment sabotés par les Russes ou de la "beuverie organisée dans la tour de contrôle" (je cite Jaroslaw Kaczynski). Il serait erroné de réagir à cela de la même manière. Et réduire toutes les remarques polonaises aux caprices de M. Kaczynski également.

"Si les rapports sur la catastrophe ne prennent pas en compte le point de vue polonais ou le qualifie seulement "d’inacceptable", ce sera un mauvais signal qui désorientera l’opinion publique polonaise", estime le journaliste de Gazeta Wyborcza, Jaroslaw Kurski, qui lutte depuis plusieurs mois contre les théories du complot de la tragédie de Smolensk. Et on ne peut qu’acquiescer.

Certains diront: nous n’avons rien à faire de l’opinion publique polonaise!, et ils auront tort, comme à une époque le camarade Trotsky. La Russie ne rééduquera pas les partisans de M.Kaczynski, mais ils sont loin de représenter l'ensemble de la Pologne. La Russie devra encore se battre pour conquérir l’opinion de la véritable grande Pologne et rétablir de bonnes relations avec elle.



Ce texte n’engage pas la responsabilité de RIA Novosti

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