L’Union européenne, le G8 et le G20 se mettent au régime franco-hongrois

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A partir du 1er janvier 2011 et pendant l’année entière l’Europe, l’élitiste G8 et l’économique G20 pourront goûter à une cuisine française élaborée et savourer le piquant des plats hongrois.

A partir du 1er janvier 2011 et pendant l’année entière l’Europe, l’élitiste G8 et l’économique G20 pourront goûter à une cuisine française élaborée et savourer le piquant des plats hongrois. Le 1er janvier, la présidence tournante de l’Union europénne passera à la Hongrie, alors que la France adjoindra la présidence des élitistes sommets du G8 à celle du G20, qu'elle assume déjà depuis novembre 2010. Les deux sommets se dérouleront en automne à Nice, sur la Côte d’Azur.

Les Hongrois ont déjà promis d’inculquer à l’Europe le goût de leur célèbre goulache, des petits saucissons de Debrecen, d’apprendre aux Européens de danser le czardas et d’écouter la musique de Ferenc Liszt. En 2011, le grand compositeur aurait fêté son bicentenaire. On le considère en Hongrie comme un compositeur hongrois, bien que ce dernier évitait de s’exprimer en hongrois étant donné qu'il le maîtrisait très mal.

Les Français n’ont rien promis de tel. La France, comme Nicolas Sarkozy, est persuadée que le reste du monde devrait s'estimer heureux du fait que les Gaulois partagent avec lui leurs vins, leurs fromages, leurs parfums, leurs modes et leur galanterie. Et ils ont bien raison.

Le financement innovant de Nicolas Sarkozy

Le président de la République française a déjà exposé, en gros, l’agenda qu’il soumettrait au G20 et a expliqué ce qu’il attendait de ses membres. Le président hyperactif propose la réforme du système monétaire international, l’introduction de mesures plus strictes et concertées pour le contrôle des flux financiers internationaux, une régulation ferme des politiques économique et monétaire, la prise de mesures visant à stabiliser les prix des produits agricoles afin d’éviter des fluctuations trop brusques du prix des denrées alimentaires, l’introduction d’un "financement innovant" sous la forme d'une taxe internationale frappant les transactions financières importantes (une sorte de contribution mondiale de solidarité en faveur des pays pauvres ainsi que pour le développement de la médecine, la prévention des épidémies, le développement de l’éducation, etc…). Enfin, il souhaite transformer le G20 en un organisme permanent doté d'un secrétariat. Entre autres, les Gaulois, et Nicolas Sarkozy le premier, ont l’intention de renforcer la coopération entre le G20 et l’ONU. Le nouveau format, dit G192 a même été évoqué dans ce contexte (192 est le nombre des pays membres de l’ONU). Toutefois, cette idée paraît relever de la science-fiction.

L’agenda français est tellement exhaustif, ambitieux et lourd de conséquences radicales (d’ailleurs, comme toutes les initiatives du président Sarkozy) que le sommet de Nice pourrait déjà être qualifié de réussi, si 10% seulement des propositions françaises y sont adoptées.

Mais hélas, un tel résultat est peu probable. D’autant plus que les sommets du G20 sont des réunions facultatives, dont les décisions ne sont pas contraignantes. C’est le principe du volontariat qui domine et cela se traduit par une mémoire extrêmement courte concernant les décisions prises de manière concertées ou par une interprétation assez extensive de celles-ci.

Ainsi, les Etats-Unis n’ont pas cessé d’irriter l’Union européenne en faisant exactement le contraire de ce qu’ils avaient promis lors de l’avant-dernier sommet de Toronto et du dernier sommet de Seoul, où ils s’étaient pourtant engagés à prendre des mesures pour stabiliser le cours du dollar et à limiter leurs propres dépenses dans le but d’éviter une dépréciation artificielle de leur monnaie.

Washington recourt systématiquement à la planche à billets en émettant des dollars sans aucune couverture. La baisse du taux de change du dollar par rapport à l’euro renchérit d'autant les exportations européennes et inflige des pertes considérables aux économies des pays membres de l’Union européenne.

L’idée de Nicolas Sarkozy relative à un secrétariat permanent du G20 est très susceptible d'avoir du succès, sans pour autant que sa mise en œuvre ne soit garantie à 100%. Le président français est persuadé que c’est lui qui est à l’origine des sommets du G20 (la France a proposé de réunir les ministres des Finances du G20 dès 1999, au plus fort de la crise financière asiatique) et que de ce fait, le secrétariat devrait siéger à Paris. Les experts sont pourtant sceptiques quant à la viabilité de cet organisme encombrant comprenant des participants différents pour chacun des domaines considérés. Il n’est donc pas certain que tous les membres du G20 donneront leur accord pour institutionnaliser ce secrétariat. Des langues fielleuses prétendent même que le président français avance toutes ces idées seulement parce qu’il a déjà commencé sa campagne pour l’élection présidentielle de 2012. N’ayant pas obtenu de succès particuliers en matière de politique étrangère, il pourrait considérer l’institutionnalisation du G20 comme sa carte maîtresse.

A ce jour, les sommets du G20, excepté le sommet de Washington de 2008, se tenaient deux fois par an: à Londres et à Pittsburgh en 2009, à Toronto et à Seoul en 2010. A partir du sommet de Nice, ces réunions ne se tiendront plus qu’une fois par an.

Leur utilité sera, de toute façon, déterminée tant par la qualité des décisions entérinées que par leur mise en œuvre, ces deux composantes devenant de plus en plus problématiques. Un nombre croissant des experts économiques sont d'avis que les intérêts de l’Union européenne, des Etats-Unis et des pays émergents ne convergent pas vers un centre abstrait, mais au contraire, s’éloignent progressivement les uns des autres. Ce développement multi-vectoriel s’explique par les différences de potentiel entre ces Etats, par des points de vue divergents sur la façon de résoudre les problèmes internationaux et par de simples égoïsmes économiques nationaux. L’Europe (France, Allemagne) penche pour une réglementation stricte et une discipline budgétaire rigoureuse. Les Etats-Unis souhaitent "répartir entre tous" le prix de la crise financière qu’ils ont initiée. Ils injectent donc des dollars bon marché dans l’économie et les pays émergents refusent de comprendre pourquoi ils devraient considérer ces deux schémas comme des exemples à suivre. En effet, pourquoi?

Soit dit en passant, par rapport aux pays émergents et surtout les pays du groupe BRIC (le Brésil, l’Inde, la Russie et la Chine), certains économistes remettent ce sigle en question car ils estiment que la Russie n’a pas vraiment été incluse dans ce groupe sur une base "paritaire".

Selon le magazine britannique The Economist, la Russie y est rentrée surtout en raison du "hasard géographique" qui a voulu que le pays dispose de gisements de pétrole et de gaz gigantesques. La Russie ne peut pas se targuer d’un taux de croissance économique comparable à celui de l’Inde, de la Chine et même du Brésil. Une caractéristique peu flatteuse mais, hélas, assez juste.

En ce qui concerne l’accession de la Hongrie à la présidence tournante de l’Union européenne, ce poste a pratiquement perdu toute son importance après l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne (la nouvelle constitution européenne) au début de 2010. Le rôle du président peut aujourd'hui être comparé à celui d'un animateur, invité à une réunion de cadres d'une entreprise, alors que le directeur et les propriétaires de la société sont également présents.

Néanmoins, on dansera bel et bien le czardas au siège bruxellois de l’Union européenne.

Ce texte n'engage pas la responsabilité de RIA Novosti.

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