Le 10 août 2010, à l’initiative du président du Venezuela Hugo Chavez, à Santa-Marta (Colombie) s’est déroulée une rencontre avec le nouveau président colombien Juan Manuel Santos, entré en fonctions quelques jours auparavant. Les principaux objectifs de la rencontre étaient le rétablissement des relations diplomatiques et la recherche de solutions aux problèmes existant dans les relations entre les deux pays.
1. Comment évaluez-vous les résultats de la rencontre d’hier entre les présidents vénézuélien et colombien ? Que pensez-vous des perspectives de normalisation des relations entre ces deux pays?
La rencontre entre les présidents, comme attendu, s’est conclue de façon positive. Chavez et Santos ont convenu de débuter la normalisation des relations après avoir traité des problèmes clés dans les relations entre leurs pays. L’un des résultats des plus importants a été la promesse de Hugo Chavez de restreindre les activités des guérilleros colombiens sur le territoire du Venezuela, qui est l’une des raisons principales de la rupture des relations depuis le 22 juillet, lorsque le représentant colombien à l’Organisation des États Américains avait présenté des vidéos montrant l’activité de la guérilla colombienne au Venezuela. Chavez avait déclaré que c’était un montage et avait rapidement rompu les relations en menaçant de cesser les approvisionnements en pétrole des États-Unis. Ce fut l’acte final des relations tendues entre les présidents Chavez et Uribe. Le nouveau président Santos, considéré comme héritier d’Alvaro Uribe, avait promis de poursuivre sa politique visant à assurer la sécurité de la démocratie en Colombie et à lutter contre le mouvement de la guérilla qui avait toujours soutenu Hugo Chavez. Néanmoins, compte tenu des résultats de la rencontre informelle entre les deux présidents, il paraît clair que les deux parties aspirent à des relations constructives de bon voisinage. Cependant, on ne peut être convaincu que la confrontation est terminée pour de bon. La raison foncière des désaccords est la différence de types de régime en vigueur au Venezuela et en Colombie. En Colombie, les institutions démocratiques se développent constamment, l’opposition se sent en liberté, la presse et l’économie sont libres. Au Venezuela, la politique d’édification du « socialisme du XXIème siècle » a été annoncée, avec toutes les conséquences qui en découlent. Une autre raison importante de la confrontation concerne la possibilité offerte par la Colombie aux États-Unis d’utiliser des bases militaires sur son territoire pour lutter contre le trafic des stupéfiants. Chavez considère cette situation comme une menace pour les intérêts nationaux du Venezuela.
2. Avec la normalisation à terme des relations avec la Colombie, quel genre de relations le Venezuela établirait avec les États-Unis ?
Aux yeux du Venezuela, les États-Unis représentent le principal ennemi qui, selon Caracas, constitue un obstacle à la construction d’un monde multipolaire. Sur ce terrain, le Venezuela a établi de très bonnes relations avec la Russie qui soutient également la coexistence dans un monde multipolaire. Dans ce contexte, la confrontation du Venezuela avec les États-Unis est inévitable. Néanmoins, malgré l’hostilité, Caracas ne souhaite pas rompre les relations avec Washington. Les approvisionnements en pétrole et en produits pétroliers en provenance du Venezuela constituent 11% des importations américaines d’hydrocarbures. Cela rapporte beaucoup de revenus au trésor du Venezuela. Selon la majorité des analystes, la rupture des relations avec les États-Unis et, par conséquent, la cessation des approvisionnements en pétrole équivaudrait à tuer la poule aux œufs d’or. La dernière fois une telle menace est apparue le 22 juillet, lorsque Chavez avait rompu ses relations avec la Colombie et avait menacé les États-Unis de cesser l’approvisionnement en pétrole. Mais d’un point de vue objectif, une telle situation est peu susceptible de se produire dans un avenir proche. Quoi qu’on en dise, le bénéfice tiré de la vente du pétrole aux États-Unis, malgré les livraisons importantes dans d’autres pays, plus particulièrement en Chine, reste un facteur déterminant.
3. Comment se traduira l’amélioration des relations entre Caracas et Bogota sur les liens entre le Venezuela et la Russie?
Cela n’aura aucun impact sur les relations avec la Russie. En tout cas aucun impact négatif. Chavez a toujours eu de bonnes relations stables avec Moscou. Cet automne, le président du Venezuela s’apprête à se rendre en visite à Moscou. Les deux pays maintiennent une coopération active dans les secteurs militaire et technique, et économique. À court terme, il ne semble pas y avoir d’obstacles qui pourraient se traduire négativement sur les relations entre la Russie et le Venezuela.