Le 2 août en Russie est la journée nationale des troupes aéroportées. Depuis le premier débarquement effectué lors des exercices près de Voronej en 1930, les troupes aéroportées russes ont écrit de nombreuses pages de gloire en passant par des actes héroïques lors de la a Grande guerre patriotique, les campagnes afghane et caucasienne.
La première question concerne la réforme des forces armées russes. Quelle sera la mission des troupes aéroportées dans l'armée après la réforme ?
Les troupes conservent le statut de réserve du Commandement suprême dont la mission principale est de protéger les intérêts de la Russie et de sa population aussi bien sur le territoire national qu'à l'étranger. Les troupes aéroportées rempliront leurs missions dans les zones de responsabilité des commandements stratégiques interarmées, de manière autonome ou en faisant partie des unités de l'armée de terre. Ses missions sont les suivantes : couverture des flancs et des failles dans les dispositifs de l'armée de terre, lutte contre les troupes aéroportées tactiques de l'ennemi, débarquement dans les lignes arrières et sur les flancs de l'ennemi, et accomplissement de toute mission nécessitant une grande mobilité et une rapidité de déploiement, surtout lors de conflits locaux.
Lors de la réforme, de quelle manière la structure et le nombre du personnel des troupes aéroportées ont-ils changé ? Comment se fera le recrutement au sein des troupes aéroportées ?
Lors de la réforme 26 unités militaires ont été dissoutes, cela concerne en majorité des unités de soutien dont les fonctions seront sous la responsabilité des structures de commandement interarmées stratégique et de structures civiles. Ces dernières seront chargées de la défense des bases de stockage, des services de blanchisserie à 85% et de restauration à 40%. Au 1er décembre, nous planifions de transférer sous la responsabilité des organisations civiles la restauration intégrale pour les armées, mais cela soulève un certain nombre de questions. Les unités des troupes aéroportées sont principalement basées dans les chefs-lieux régionaux où nous pouvons, sans aucun problème, trouver des entrepreneurs civils compétents. Toutefois, ils ne pourront pas résoudre le problème de restauration sur le terrain et, compte tenu de la spécificité des troupes aéroportées, c'est particulièrement important.
Nous chercherons un compromis, les troupes aéroportées doivent conserver des spécialistes et des équipements susceptibles d’assurer l’approvisionnement des troupes loin de leur base.
Les troupes aéroportées comptent 35 000 personnes dans leurs rangs. Lors de la réforme, le personnel officier des troupes aéroportées a été réduit de 40%. À l'heure actuelle, près de 4 000 officiers sont en service, dont près de 400 à occuper des postes de sergent, en raison du manque de sergents de carrière et de la réduction du corps des officiers. De plus, près de 7 000 soldats sous contrat servent dans les troupes aéroportées à des postes de militaires du rang et de sergent, tous les autres étant des militaires appelés.
À terme, le nombre de contractuels devrait doubler. Ainsi, nous prévoyons de recruter des contractuels pour tous les postes de commandement subalternes et de spécialistes, autrement dit des postes nécessitants plus de personnel et une meilleure préparation et formation. Le manque de contractuels est lié actuellement, entre autre, à la faible rémunération : 12-18 000 roubles par mois (300-450€ par mois). En tenant compte des primes et des départs en opérations extérieures (OPEX) ils pourraient gagner jusqu'à 18-25 000 roubles par mois (450-625€ par mois). À partir de 2012, le salaire d'un sergent ne devrait pas être inférieur à 30 000 roubles par mois, et tenant compte des primes et des OPEX, près de 40-45 000. Un tel salaire dépasserait de loin le salaire moyen dans les régions et permettrait d'attirer plus de personnel avec une meilleure préparation.
En fait, ce serait le renouveau du corps de sous-officiers qui constituait autrefois l'épine dorsale de l'armée. Nous voudrions avoir dans nos rangs des officiers et des sergents hautement qualifiés et bien préparés, des soldats d'élite, aussi bien des contractuels que des appelés, capable d'agir avec audace et initiative.
Dans quelle mesure la panoplie d'armement actuelle correspond aux missions des troupes aéroportées ? Que prévoit-on d'y ajouter ?
Le taux d’équipements modernes des troupes aéroportées constitue à l'heure actuelle 7%. Néanmoins, nous maintenons les équipements disponibles en état de fonctionnement et ils sont capables de remplir leurs missions. Actuellement, nous mettons en œuvre un programme de modernisation partielle, ce qui permettrait dans les prochaines années d'accroître les capacités des troupes avec les équipements actuels de 10%. Nous achetons des systèmes de contrôle automatique, des systèmes de débarquement et du contrôle d'atterrissage, des dispositifs de reconnaissance, de surveillance, de navigation et de transmissions. On pourrait citer notamment le système de contrôle automatique Polet-M (commandement de vol) qui assure le maintien sans interruption de la chaîne de commandement entre l'état-major des troupes aéroportées et l'état-major du bataillon, en réduisant considérablement la chaîne de commandement dans l’armée.
Les achats d'équipements actuels ne répondent pas tout à fait à nos objectifs. Le réarmement des armées devrait être réalisé dans le cadre du nouveau programme gouvernemental de réarmement. Cela concerne les véhicules blindés de débarquement des troupes BMD-4M à canons coaxiaux de 30 et de 100 mm, basés sur le modèle existant du véhicule blindé de transport de troupe Rakouchka (coquille). Nous devons également moderniser la défense antiaérienne et les capacités antichars des forces armées. Pour cette dernière tâche, il est prévu d'acquérir des véhicules supplémentaires Sprout (pieuvre) équipés d'un canon/lanceur de 125 mm.
Certains médias ont déclaré que les achats des Sprouts sont suspendus et n'auront pas de suite.
Cette information est erronée. Les troupes aéroportées ont besoin de ce véhicule. Il doit faire l'objet d'améliorations et sera acheté en série.
Comment peut-on évaluer l'état actuel de l'aviation de transport militaire (VTA) ?
À l'heure actuelle, la VTA a trouvé le juste milieu en maintenant la capacité de combat de ses unités tout en évitant d’user son équipement. Actuellement, nous pouvons faire débarquer un régiment, une division à terme, et assurer son soutien. La VTA doit intégrer de nouveaux appareils. Plus particulièrement, le programme gouvernemental de réarmement prévoir l'achat de 40 appareils An-70, la reprise de la production des appareils Rouslan avec 20 appareils de ce type pour l'armée de l'air russe, ainsi que la projection en provenance de Tachkent et la reprise de la production à Oulianovsk de l'avion principal de la VTA, l’Il-76, connu dans sa nouvelle version en tant qu'Il-476.
Il existe des unités d’assaut dans d'autres armées. Peut-on comparer les troupes aéroportées russes avec leurs homologues étrangères ?
Les opérations militaires constituent le critère principal de comparaison. Aujourd'hui nous pouvons voir comment les demi-basmatch (bandits contre-révolutionnaires) en Afghanistan effraient la grande coalition des premières puissances de l'Occident, qui ne s'y risque pas en dehors des « zones vertes » sous contrôle. À son époque, les forces et les troupes aéroportées soviétiques, avec des équipements bien moins avancés, remplissaient leurs missions en Afghanistan, en y agissant là où il le fallait et quand il le fallait.
Or, l'OTAN montre actuellement son incapacité à remplir ses missions, il suffit de rappeler que le trafic de stupéfiants sur le territoire russe en provenance d'Afghanistan a augmenté de 40 fois bien que l'enraiement de la production de drogues ait été l'une des missions principales de toute la campagne.
Les armées occidentales peuvent être un exemple en matière d'équipements individuels des militaires, plus particulièrement en termes de moyens de surveillance, de contrôle, de transmission et de navigation. Nous avons des lacunes dans ces domaines. À l'heure actuelle, nous acquérons de nouveaux équipements, y compris des systèmes d'imagerie thermique, des nouveaux fusils de précision, ainsi que des moyens de positionnement. Avec l'introduction du système GLONASS (système global de positionnement par satellite), nos capacités à cet égard ont fortement augmenté.
Par ailleurs, la Russie demeure le leader dans bien des domaines. Par exemple, nous possédons les meilleurs véhicules blindés légers de débarquement aérien dans le monde. Nous sommes les seuls à être capables à faire débarquer des véhicules avec leur équipage, ce qui réduit considérablement le temps de préparation au combat.
Dans l'ensemble, le commandement des troupes aéroportées suit la situation au sein des armées étrangères et ne constate pas de déficiences apparentes dans ses propres rangs qui nécessiteraient une intervention immédiate des chefs. Les troupes aéroportées russes demeurent parmi les premières au monde. Nous sommes toujours disponibles pour un déploiement immédiat et l'accomplissement de missions militaires aussi bien sur le territoire national qu'à l'étranger.
Propos recueillis par Ilia Kramnik
