La Russie vue par la presse francophone le 28 juin

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Les Kirghizes réforment leur Constitution, Moscou méfiant/ L'étau du Kremlin se desserre autour de Khodorkovski/ Pour une nouvelle relation franco-russe

Le Point

Les Kirghizes réforment leur Constitution, Moscou méfiant

Les Kirghizes ont approuvé à une écrasante majorité une révision constitutionnelle instaurant la première démocratie parlementaire d'Asie centrale après une vague de violences ethniques qui a fragilisé la stabilité du pays.

Réagissant immédiatement au résultat du scrutin de dimanche, la Russie a émis des doutes sur la capacité du Kirghizistan, ancienne entité de l'empire soviétique, à assurer le fonctionnement d'une république parlementaire.

Selon les résultats officiels, portant sur le dépouillement de la quasi-totalité des bulletins à l'exception d'un des 2.319 bureaux de vote du pays, 90,6% des électeurs ont approuvé la nouvelle Constitution qui ouvre la voie à la tenue d'élections parlementaires en octobre.

Seuls huit pour cent des électeurs se sont prononcés contre la réforme dans un vote qui a mobilisé 69% des électeurs, rapporte la commission centrale des élections sur son site internet www.shailoo.gov.kg.

Les résultats définitifs devraient être connus dans deux ou trois jours, après la collecte de tous les bulletins.

L'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) s'est félicitée du bon déroulement et de la transparence des opérations de vote, tout en réclamant des améliorations pour les législatives à venir.Le Bureau pour les institutions démocratiques et les droits de l'homme de l'OSCE a salué la forte participation, malgré les violences ethniques qui ont fait 294 morts au moins et des centaines de milliers de réfugiés dans le Sud, début juin.

"Les citoyens kirghizes ont participé massivement au scrutin en faveur d'un avenir neuf, démocratique et pacifique", a déclaré Boris Frlec, chef de la mission d'observation.

Le représentant de l'Onu en Asie centrale, Miroslav Jenca, est, lui aussi, encouragé par le taux de participation et estime que le référendum constitue une étape importante dans la mise en place d'un gouvernement légitime, ont annoncé les Nations unies.

L'Onu a dépêché un avion chargé de couvertures polaires et d'aide humanitaire à Och et envisage de conseiller le gouvernement sur la tenue d'élections législatives.

MEDVEDEV SCEPTIQUE

Dès dimanche soir, quelques heures après la fermeture des bureaux de vote, la présidente par intérim, Roza Otounbaïeva, affirmait que la république d'Asie centrale était en marche vers une "véritable démocratie du peuple".

La réforme renforce la fonction de Premier ministre, qui récupérera une partie des prérogatives présidentielles.

Cette évolution des institutions, voulue par les nouvelles autorités mises sur pied après l'éviction du président Kourmanbek Bakiev, chassé par la rue en avril, est jugée essentielle par Roza Otounbaïeva pour rétablir la stabilité après la vague de violences communautaires.

Les Etats-Unis et la Russie, qui disposent tous deux d'une base militaire dans le pays, ont promis de soutenir un gouvernement fort pour prévenir la propagation de troubles en Asie centrale, région frontalière de l'Afghanistan.

"Nous espérons qu'il s'agit d'un véritable pas vers une gouvernance stable et démocratique", a dit un porte-parole du département américain d'Etat à Washington.

Mais le président russe, Dmitri Medvedev, a livré, lui, une analyse très tranchée, estimant que l'évolution institutionnelle menaçait jusqu'à l'existence des structures étatiques kirghizes.

"Je ne vois pas bien à quoi une république parlementaire peut ressembler et comment elle peut fonctionner au Kirghizistan", a déclaré le chef du Kremlin après le sommet du G20 à Toronto.

"Dans la situation actuelle, il existe tout un tas de scénarios pour le Kirghizistan, y compris le plus désagréable, conduisant à l'effondrement de l'Etat", a-t-il ajouté.

Ces déclarations contrastent avec le soutien exprimé par Moscou aux nouvelles autorités de Bichkek après la chute de Bakiev début avril.

DES POLICIERS DE L'OSCE DANS LE SUD ?

Dès l'issue du scrutin, Roza Otounbaïeva a indiqué que son gouvernement était favorable à l'envoi de policiers de l'OSCE dans le sud du pays, afin de maintenir la stabilité dans cette région où ont éclaté les violences.

Invoquant des questions de sécurité, l'organisation a refusé d'envoyer des observateurs à Och. Mais un responsable de l'Assemblée parlementaire de l'OSCE a soutenu la présence d'une force de police internationale.

Les violences ont suscité une profonde méfiance parmi les populations d'origine ouzbèke quant à la capacité des nouvelles autorités à assurer la sécurité et la stabilité du pays.

Roza Otounbaïeva est la première femme au pouvoir dans une République d'Asie centrale. Elle doit rester dans ses fonctions de présidente par intérim jusqu'à la fin 2011. Aux termes de la nouvelle Constitution, son successeur sera élu pour un mandat unique de six ans. Des élections législatives se tiendront en octobre. Chaque législature durera cinq ans.

Le Figaro

L'étau du Kremlin se desserre autour de Khodorkovski

Après les témoignages de deux proches de Poutine, l'ancien patron de Ioukos peut espérer une libération en 2011.

Mikhaïl Khodorkovski sera-t-il prochainement libéré ? Cette thèse prend de plus en plus de consistance à Moscou, alors que les charges pesant sur l'ancien patron de Ioukos s'amenuisent au fil des audiences judiciaires. La semaine dernière, deux anciens ministres ont implicitement témoigné en sa faveur, contribuant à discréditer le principal motif de l'inculpation : le détournement et la vente illégale de 350 millions de tonnes de pétrole, dont se serait rendu coupable Khodorkovski avec son associé, Platon Lebedev, entre 1998 et 2003. S'ils étaient avérés, ces faits pourraient lui coûter plus de vingt ans de prison, à ajouter aux six années qu'il purge depuis 2003. «Je n'ai jamais entendu parler d'un (tel) vol», a déclaré Viktor Khristenko, à l'époque vice- premier ministre chargé des questions d'Énergie. Son ancien collègue responsable de l'Économie, Guerman Gref, a émis des commentaires similaires.

Le fait même que ces deux hommes se soient présentés à la barre constituait déjà un succès pour la défense. Celle-ci dénonce le caractère «politique» du procès, motivé selon elle par la volonté, à l'époque, de Vladimir Poutine d'écarter un opposant politique. Viktor Khristenko siège toujours dans le gouvernement Poutine où il s'occupe du Commerce, tandis que Guerman Gref dirige Sberbank, l'une des plus importantes banques du pays, étroitement liée au Kremlin. Parallèlement, un autre tribunal moscovite vient de clore la procédure visant un ancien vice-président du groupe pétrolier, Vassili Aleksanian, aujourd'hui atteint du sida. Dans la sémiotique du pouvoir russe, ces initiatives témoigneraient d'un infléchissement de cap à l'égard du célèbre prisonnier. «Poutine et Medvedev ont compris que Khodorkovski ne constitue pas un problème politique ( intérieur, NDLR) », juge Konstantyn Remtchoukov, rédacteur en chef de Nezavissimaya Gazeta. Au contraire, plaident plusieurs experts, son maintien en prison nuit à l'image d'un pouvoir russe qui, depuis quelques mois, donne des signes d'ouverture.

Renoncer à la politique 

Si l'acte d'accusation devait s'effondrer comme un château de cartes, le tribunal pourrait être amené à prononcer un acquittement. L'ancien patron de Ioukos n'aurait plus que quelques mois à purger au titre de sa première condamnation, prononcée en 2005 - pour escroquerie et évasion fiscale - et sortirait alors en octobre 2011, six mois avant les élections présidentielles. «Tous les éléments objectifs plaident en faveur d'un tel scénario», estime un diplomate occidental.

En contrepartie, expliquent plusieurs sources, l'ancien oligarque devrait probablement renoncer à la politique, ce qui est loin d'être acquis. De plus, sa libération remettrait en cause d'autres intérêts adjacents, notamment pétroliers, et concentrés entre les mains d'Igor Setchin, actuel vice-premier ministre en charge de l'Énergie. «Khodorkovski en liberté, ce sera un mélange de Monte-Cristo et de Nelson Mandela», explique Evguéni Gontmakher, directeur du Centre de politique sociale et membre du comité de soutien au prisonnier. Autant de risques que le pouvoir russe dans son ensemble doit soigneusement soupeser.

Le Figaro

Pour une nouvelle relation franco-russe

Le président du fonds d'investissement Onexim Group appelle de ses voeux un renforcement de la coopération économique entre les deux
pays. Il existe un paradoxe franco-russe. Depuis Pierre le Grand, nos deux pays n'ont cessé de nouer des liens très étroits, aussi bien culturels que politiques. Diderot a été reçu à la cour de Catherine II, qui entretint par ailleurs une longue correspondance avec Voltaire, les grands romanciers russes du XIXe siècle ne juraient que par la littérature française, Diaghilev et ses ballets ont été ovationnés à Paris, tandis que l'alliance franco-russe soudait les deux pays à l'aube de la Première Guerre mondiale et que le groupe de chasse « Normandie-Niemen » était créé en 1942.

Il y a toujours eu de la part des Français un attrait prononcé pour la civilisation russe et, du côté russe, une fascination pour l'esprit et l'art de vivre français. Cet amour réciproque subsiste. Le mot paraîtra peut-être incongru dans la bouche d'un homme d'affaires, mais je crois qu'il n'est pas trop fort pour caractériser les liens profonds, anciens et puissants qui existent entre nos deux pays. L'Année France-Russie 2010 illustre, s'il en était besoin, la vivacité de ces liens : de l'exposition « Sainte Russie » au Louvre à celle des chefs-d'oeuvre du Musée Picasso au Musée Pushkin à Moscou, en passant par un voyage en « Sibérie inconnue ». « Sibérie inconnue »*, thème d'un festival où l'on découvrira que cette terre fut aussi le lieu de quêtes utopiques, religieuses et mystiques.

Nous savons donc entretenir des relations culturelles privilégiées, nous savons aussi faire de la politique ensemble, nous ne savons pas - ou mal, ou trop peu - faire des affaires ensemble. La coopération économique devrait pourtant être le prolongement naturel de nos affinités. Mais de ce point de vue, la Russie reste un partenaire trop secondaire pour la France. Tout se passe comme si la communauté française des affaires nourrissait à l'égard des Russes des réticences, voire des relents de soupçon d'un autre âge. Je voudrais simplement rappeler ici tout le chemin que la Russie a parcouru en moins de vingt ans. Nous sommes passés sans transition du régime communiste à la démocratie, et de l'économie planifiée au capitalisme. Nous avons fait un effort considérable, souvent chèrement payé par nos compatriotes, pour effacer trois quarts de siècle de notre histoire, bouleverser les institutions, réorganiser le pays, faire évoluer les mentalités. Quel autre peuple dans l'histoire moderne a connu une si profonde transformation en si peu de temps ? Je voudrais que nos amis français en soient bien conscients et qu'ils comprennent aussi que les choix de civilisation que nous avons faits sont irréversibles.

Mon propos n'est pas d'adresser un message politique : ce n'est ni mon rôle ni ma vocation. Mon propos est d'affirmer avec force que nous pouvons aller beaucoup plus loin dans la coopération économique entre la Russie et l'Europe, et plus particulièrement avec la France. Déjà quelques accords importants ont été passés entre nos deux pays. Onexim, le groupe que je dirige, a lui-même entrepris avec Dalkia, filiale de Veolia Environnement et Électricité de France, à la fin de l'année dernière, la création d'une entreprise franco-russe destinée à produire et distribuer de l'énergie thermique en Russie. Les Français et les Russes ont en commun un goût pour les sciences et un véritable savoir-faire technologique. Sachons-les marier au service de la recherche et de l'innovation particulièrement dans les domaines de la technologie, du développement durable et de l'efficience énergétique. Le Forum de Saint-Pétersbourg se penche actuellement sur les questions de la place de l'innovation dans nos sociétés et nos économies, et la présence de N. Sarkozy à l'initiative de D. Medvedev est de bon augure et un parfait exemple d'une collaboration franco-russe. Tout comme l'éducation supérieure pourrait en être un autre.

Voilà des siècles que nous nous lisons, que nous nous visitons, que nous nous comprenons. Ne nous renfermons pas dans le passé. Bâtissons l'avenir, ensemble !

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