Conformément à la Constitution moldave et aux recommandations de la Commission de Venise du Conseil de l'Europe (la Commission européenne pour la démocratie par le droit), le parlement actuel doit être dissout après le 16 juin. La date des élections législatives anticipées devra être annoncée en même temps.
Cette décision doit être prise par le président moldave par intérim Mihai Ghimpu. Mais ce-dernier n'en a aucune envie. D'ailleurs, la majorité des députés n’ont pas l’intention de quitter les postes auxquels ils se sont habitués, c’est pourquoi ils s'y opposent avec acharnement. La dissolution du parlement, plus exactement, la date précise de cet événement, ne s'inscrivent même pas dans leur conscience. Surtout chez leur chef, le président du parlement et, en même temps, président intérimaire du pays. Les fonctionnaires européens ont dû intervenir. Mais cela n'a amené Ghimpu qu’à déclarer que le parlement serait dissout … à telle date.
La date de cet événement, de même que celle des élections anticipées reste un "secret d'Etat". L'opposition en la personne du Parti des communistes (PCRM) en appelle vainement aux structures européennes en leur demandant d'influer d'une manière ou d'une autre sur le président par intérim, rien n'a bougé.
D'une manière générale, le parlement moldave actuel et son chef constituent un phénomène unique en son genre et étonnant, probablement pas seulement dans la vie politique moldave actuelle. Il a été formé à l'issue des élections anticipées du 29 juillet 2009, lorsque les fractions de l'opposition qui constituent aujourd'hui la majorité parlementaire – l'Alliance "Pour l'intégration européenne" – ont fait échouer à deux reprises l'élection du président. En fin de compte, l'ancien parlement a été dissout.
La victoire facile remportée sur les communistes a également déterminé le style de travail du nouvel organe législatif: en 9 mois et demi d’activité, seulement 47 séances ont eu lieu, à peu près une par semaine. Le nombre de réunions reportées est égal au nombre de celles qui se sont tenues.
Les explications ne tiennent pas debout, mais elles sont conformes à la logique de leurs auteurs: les députés ne peuvent pas assister à toutes les réunions plénières, car ils doivent s'occuper aussi de politique étrangère.
"Lorsqu'une délégation parlementaire se rend à Strasbourg, Paris ou Bruxelles, c'est un voyage forcé, nous ne pouvons pas sacrifier la politique étrangère aux réunions plénières", a déclaré Anna Gutsu, députée du Parti libéral dirigé par Ghimpu, à la télévision.
Or, les communistes estiment que les membres de l'Alliance ne participent pas aux réunions plénières à cause des divergences au sein de la coalition libérale-démocrate. Et leurs affirmations ont des raisons valables.
Selon les déclarations préalables, la dissolution réelle du parlement n'aura lieu qu'en septembre prochain. Plus ce temps approche et plus il est plus difficile aux partis de l’Alliance (le Parti libéral, le Parti libéral-démocrate, le Parti démocrate et "Notre Moldavie") de dissimuler les graves contradictions internes.
Par exemple, le président du Parti démocrate Marian Lupu s’est prononcé contre la soi-disant "commission Ghimpu" constituée en vue d'étudier le passé communiste totalitaire à l'initiative du président par intérim et dirigeant du Parti libéral. Selon Marian Lupu, cette initiative divise les citoyens du pays en "nôtres" et "autres".
"Le Parti démocrate de Moldavie ne veut pas perdre son temps en scandales publics et devenir un instrument d’ambitions personnelles de certains hommes politiques", a-t-il déclaré. Le premier ministre Vladimir Filat, président du Parti libéral-démocrate, et Dorin Chirtoaca, le neveu de Ghimpu, son adjoint dans le parti et maire de Chisinau, s’accusent aussi mutuellement.
Plus la Moldavie se rapproche des législatives et de la présidentielle et plus les exemples de ce genre deviennent nombreux.
Il convient, par ailleurs, de citer un autre détail: depuis le 5 mars, 43 députés communistes boycottent les réunions du parlement. Par conséquent, lorsque l’un de leurs 58 opposants se rend quelque part ou tout simplement ne vient pas à l'organe législatif, le quorum nécessaire au travail fait défaut.
Bref, le 16 juin, date insignifiante dans la vie politique moldave, marquera probablement le compte à rebours de l'organe législatif le plus impuissant dans l'histoire de la Moldavie souveraine.
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