La Russie vue par la presse francophone le 17 juin

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Russes et Américains, partenaires plutôt que rivaux/ Europe-Russie : une nouvelle occasion pour un vrai partenariat stratégique/ Moscou se méfie du piège kirghiz

Courrier International

Russes et Américains, partenaires plutôt que rivaux

La situation semblant s'apaiser au Kirghizistan, le ministre de la Défense kirghiz a indiqué que le pays reviendrait sur sa demande d'envoi d'une force internationale de maintien de la paix. Mais les autorités américaines estiment qu'il est difficile de prévoir le retour de la stabilité. Le gouvernement kirghiz avait à l'origine demandé l'aide de Moscou, mais les Russes avaient fait savoir qu'ils ne souhaitaient pas intervenir seuls.

Là est la surprise : le gouvernement américain estiment que si les violences se poursuivent, le mieux serait que la Russie intervienne avec d'autres partenaires régionaux. Cette force pourrait être issue de l'Organisation du traité de sécurité collective (OTSC), une alliance d'anciennes républiques soviétiques. Cela pourrait être aussi une "coalition de bonnes volontés", composée de soldats turcs, russes, kazakhs et d'autres Etats voisins.

Les Etats-Unis et la Russie sont en contact étroit depuis l'aggravation [la semaine dernière] de la crise au Kirghizistan. Aux Nations unies, les deux pays ont travaillé de concert pour exposer lundi dernier les principes d'une action collective, au cas où celle-ci deviendrait nécessaire. Ce qu'il y a de nouveau dans ce partenariat, c'est qu'il oppose un démenti à l'idée erronée que les deux pays sont enfermés dans un "grand jeu" pour la suprématie en Asie centrale.Il est plus logique de penser que la Russie et les Etats-Unis sont des alliés naturels dans la région. Après tout, ils ont les mêmes ennemis : les groupes musulmans extrémistes et les organisations criminelles qui menacent la stabilité de la région. Barack Obama défend cette position depuis son arrivée au pouvoir, en janvier 2009, et, chaque fois ou presque qu'il a rencontré le président russe Dimitri Medvedev, il a évoqué avec lui le Kirghizistan et la nécessité d'éviter de s'y affronter.

Avec le  soutien discret de Moscou, un gouvernement provisoire a renversé le président en avril dernier et donné le pouvoir à la majorité kirghize, qui domine le nord du pays. A la surprise de Moscou comme de Washington, le nouveau gouvernement n'a pas été en mesure d'empêcher les foules kirghizes de s'en prendre à la minorité ouzbèke du sud, qui détient l'essentiel du pouvoir économique.

Le Kirghizistan est important pour les  Etats-Unis car il lui fournit une base aérienne à Manas, devenue le principal point de transit pour l'acheminement de troupes et de matériel en Afghanistan.

La base de Manas a longtemps inquiété les Russes, mais avec le nouvel esprit de "partenariat pragmatique" qui prévaut actuellement, selon l'expression du général David Petraeus (le commandant des forces américaines en Irak et en Afghanistan), ils ont fini par conclure qu'ils avaient quelque chose à gagner d'un succès américain en Afghanistan. Après tout, ils ne souhaitent pas que l'insurrection musulmane se propage au nord.
Abandonner le "grand jeu" au profit de la coopération en Asie centrale, voilà un changement bienvenu par rapport à il y a quelques années. Si ce mode de collaboration russo-américaine pouvait s'étendre à la question de l'Iran, on pourrait peut-être voir le début d'un système de "sécurité collective" digne de ce nom.

Le Monde

Europe-Russie : une nouvelle occasion pour un vrai partenariat stratégique

A l'approche du vingtième anniversaire de l'effondrement de l'URSS, les relations entre Moscou et l'Occident connaissent une spectaculaire embellie après plusieurs années de tensions et d'incompréhensions débouchant sur la crise paroxysmique de l'été 2008 en Géorgie.

Côté européen, le sommet Union européenne-Russie qui s'est tenu du 31 mai au 1er juin à Rostov-sur-le-Don, dans le Caucase, s'il n'a donné lieu à aucune percée diplomatique, a toutefois permis de discuter de sujets résolument tournés vers l'avenir - partenariat pour la modernisation et suppression des visas notamment.

La normalisation russo-polonaise en cours, initiée par le Kremlin bien avant la tragédie de Smolensk, atténue l'un des principaux obstacles à l'approfondissement du partenariat Europe-Russie, à savoir les divisions entre anciens et nouveaux membres de l'Union européenne sur l'attitude à adopter vis-à-vis de l'est du continent.

Les évolutions consécutives à l'élection de Viktor Ianoukovitch en Ukraine, pays au coeur des divergences entre Moscou et l'Europe sur leur "voisinage commun", vont dans le même sens, en clarifiant l'équilibre des priorités diplomatiques de Kiev. Il en va de même de l'effacement relatif des Etats-Unis en Europe, qui contribue sans doute à détendre les esprits en Russie tout en constituant pour les Européens à la fois un défi et une opportunité d'assumer pleinement leurs responsabilités continentales dans une relation politiquement plus directe avec Moscou.

Le fait que, initialement peu réceptive, la Russie ait finalement reconnu la sincérité de la politique d'ouverture de l'administration Obama facilite les choses. Après les rendez-vous manqués de 1992 et de l'automne 2001, une nouvelle occasion s'offre donc aux Russes et aux Européens de reconstruire un partenariat fructueux. Dans leur effort pour y parvenir, ils seront, certes, motivés par des considérations plutôt réactives tenant aux bouleversements de la scène internationale.

Côté européen, la crise a précipité la prise de conscience de nouveaux rapports de forces à l'échelle mondiale face auxquels la "carte russe" retrouve un certain attrait. Côté russe, même si la Russie ne sort pas si mal en point de la crise (sa dette publique ne dépasse pas 10 % du PIB, ce qui lui ouvre d'importantes marges de manoeuvre pour la suite), celle-ci a mis en relief les failles (économiques, démographiques, militaires et même sociales) de son projet de puissance, et confirmé le doute quant à sa capacité à se maintenir comme pôle d'influence autonome sur l'échiquier mondial à moyen terme.

Dans ce contexte, marqué en outre par la troublante vitalité du voisin chinois, l'idée s'affirme chez les stratèges russes qu'un arrimage solide au reste du continent européen serait in fine la seule option pour éviter que la Russie ne perde son rang.

Les nouvelles réalités géopolitiques devraient donc naturellement contribuer à une forme de réunification du continent. Mais pas seulement elles. Des aspects plus inédits et plus positifs peuvent aussi donner du souffle à la nouvelle tentative qui s'engage de donner corps au partenariat russo-européen. Pour la première fois, l'UE semble vouloir établir son lien à la Russie en prenant en compte les besoins et les attentes que celle-ci affiche comme prioritaires.

C'est l'objet du Partenariat pour la modernisation, proposé par l'UE comme une réponse à l'article marquant du président Dmitri Medvedev "Russie en avant !" publié sur le site du Kremlin et celui du journal moscovite en ligne Gazeta.ru, lucide constat des blocages de l'effort national de modernisation économique et de revitalisation du tissu social.

Les désaccords sont bien là, notamment parce que les Européens tracent un lien entre aspects économiques et technologiques, et dimensions politiques - tandis que Moscou parle d'échanges technologiques et de projets d'innovation conjoints, et rejette les échanges vagues sur les valeurs. Pourtant, dans son article, Dmitri Medvedev estime que "la Russie peut se développer selon une voie démocratique" et atteindre un "niveau plus élevé de civilisation".

Le président russe a ainsi lancé un débat qui se prolonge, ce qui est bon signe, sur la question de savoir quel modèle de construction politique serait le plus favorable au dépassement des pesanteurs nationales.

Rien n'assure que les évolutions internes de la Russie permettront d'avancer sur cette voie d'une tension de l'un vers les attentes de l'autre, ni que les Européens seront suffisamment visionnaires pour s'y engager. Il semble pourtant essentiel d'essayer.

Le Quotidien de la Réunion et de l'Océan Indien

Moscou se méfie du piège kirghiz

Appelée à venir en aide au Kirghizstan, la Russie agit avec une extrême prudence dans cette ex-république soviétique en proie à de sanglantes violences interethniques pour éviter de s’impliquer dans un conflit aux conséquences imprévisibles.

En proie à de sanglantes violences interethniques, qui ont déjà fait au moins 187 morts, le Kirghizstan a fait appel en premier lieu, deux jours après le début des troubles, à l’aide militaire russe pour rétablir l’ordre. Mais la Russie a rejeté cette demande.

Selon les analystes, pour la Russie, son influence au Kirghizstan a un prix et pourrait s’avérer être un cadeau empoisonné. En effet, aussi bien une intervention militaire qu’une implication moindre dans le conflit pourraient avoir de grandes répercussions dans les années à venir.

« La Russie est très prudente concernant l’envoi de ses troupes en Asie », souligne Konstantin Zatouline, député et directeur de l’Institut des pays de la CEI (Communauté des Etats Indépendants, 11 ex-républiques soviétiques).

Le précédent afghan

Selon lui, l’intervention désastreuse en Afghanistan à l’époque soviétique a appris à la Russie à ne plus s’impliquer dans de tels scénarios.
« Des groupes rivaux en Afghanistan ont fait appel à nous à la fin des années 1970. Ce que nous avons eu comme résultat fut une guerre de plusieurs années qui a détruit de nombreuses vies », a-t-il ajouté.

Outre le traumatisme lié à la guerre en Afghanistan, la Russie ne désire pas s’impliquer dans un conflit régional.

« La Russie ne veut pas être accusée d’interférer directement au Kirghizstan en raison de la possibilité de propagation du conflit dans la région, qui impliquerait alors certainement l’Ouzbékistan et le Tadjikistan », estime Chris Weafer, analyste à la banque d’investissement Ouralsib à Moscou.

« La dernière chose dont le pays a besoin est d’être accusé de prendre partie dans la région ou d’être impliqué dans un autre scénario géorgien », a-t-il ajouté, faisant référence à la guerre éclair entre la Russie et la Géorgie de 2008, qui avait porté un coup aux relations de Moscou avec l’Occident.

D’après les analystes, dans la vallée de Ferghana, lieu des récentes émeutes, le mélange entre une animosité historique et des rivalités interethniques a le potentiel de déstabiliser l’Asie Centrale toute entière.

Ces problèmes trouvent leur racine dans l’époque stalinienne, lorsque la région fut divisée de manière arbitraire entre l’Ouzbékistan, le Kirghizstan et le Tadjikistan.

Dans cette région stratégique, notamment pour l’accès à l’Afghanistan, le Kremlin, d’abord mécontent de l’attitude du président déchu Kourmanbek Bakiev qui avait accepté le maintien d’une base militaire américaine, a réservé dans un premier temps un accueil plutôt chaleureux au gouvernement kirghiz intérimaire.

Mais très vite, les autorités russes, désenchantées, ont semblé prendre leurs distances vis-à-vis du gouvernement à Bichkek, arrivé au pouvoir après les émeutes en avril qui ont fait chuter le régime de Bakiev

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