Les fonctionnaires européens et la commission européenne : un peu de cohérence!

© RIA Novosti . Mikhail Klementiev / Accéder à la base multimédiaLe 25ème sommet Russie-UE
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Le 25ème sommet Russie-UE s’est déroulé à Rostov-sur-Don. Les journalistes et les diplomates sont habitués à la rencontre des représentants de l’Union Européenne avec le président russe qui a lieu tous les six mois, mais cette rencontre-ci est particulière.

 

Le 25ème sommet Russie-UE s’est déroulé à Rostov-sur-Don. Les journalistes et les diplomates sont habitués à la rencontre des représentants de l’Union Européenne avec le président russe qui a lieu tous les six mois, mais cette rencontre-ci est particulière. Pendant le déroulement même du sommet, le nouvel accord entre la Russie et l’Union Européenne pour la réadmission est entré en vigueur, permettant aux autorités européennes de renvoyer les immigrants illégaux issus des pays tiers sur le territoire de la Fédération de Russie. En outre, ce sommet est le premier après l’entrée en vigueur des dispositions du traité de Lisbonne concernant la réforme de l’UE. Pour cette raison, les négociations en cours étaient menées non seulement par José Manuel Barroso, le président de la commission européenne, mais aussi par Herman Van Rompuy, le président du conseil européen (la presse européenne, par souci de brièveté, le nomme souvent « le président européen », même si ce modeste fonctionnaire ne ressemble en rien au chef souverain d’une superpuissance).

La différence entre la commission européenne, le conseil européen et le conseil de l’Europe n’est pas simple à saisir, ce sont pourtant des organisations bien distinctes. Elles ne sont unies que par leur capacité à croitre et à se développer, en créant un « taillis » bureaucratique où se s’égarent les résolutions les meilleures. L’une de ces résolutions est la proposition de la Russie d’introduire un régime sans visas entre la Russie et l’UE. Comme l’a confirmé le président Dmitri Medvedev lors du sommet, la Russie est prête dès demain à instaurer un tel régime. Il a aussi suggéré de se mettre d’accord sur l’offre faite aux citoyens russes de pouvoir effectuer des visites de courte durée dans les pays-membres de l’UE sans visa. Cependant, cette proposition n’a pas rencontré d’enthousiasme réciproque de la part des dirigeants de l’UE. Ne parlons pas de nombreux facteurs indiquant sur les avantages d’une telle résolution : développement des contacts, croissance touristique (en premier lieu les touristes russes allant en Europe, ce qui serait profitable aux pays pauvres du Sud de la zone euro) etc. Ne parlons pas des « pour », parlons plutôt des « contre », mais sérieusement cette fois.

La peur d’une « vague d’immigrants pauvres venus de l’Est » a contribué au renforcement du régime de visa entre l’UE et ses voisins de l’Est. L’expérience a montré qu’aucune vague en provenance des pays slaves n’a afflué sur l’UE, et même après l’adhésion de la Pologne à l’UE et l’abolition de toutes les restrictions migratoires, si les Polonais partaient vers l’Ouest, ils le faisaient légalement pour des emplois bien déterminés, munis de l’argent nécessaire pour le voyage. Il n’y a pas eu de vague en provenance de la Biélorussie ou de l’Ukraine, or, par exemple, en Ukraine le visa Schengen polonais peut être obtenu gratuitement. Comme l’a remarqué Vladimir Tchijov, le représentant permanent de la Fédération de Russie près l’UE, « la vague d’immigration attendue par les européens n’est pas venue de l’Est mais du Sud ». Les gens fuient en direction de l’Espagne, de l’Italie, même des îles Canaries sur des canots gonflables en provenance des pays d’Afrique avec lesquels l’UE a un accord formel d’un régime... sans visa!

Si l’Union Européenne craint l’arrivée sur son territoire d’immigrants issus d’Asie Centrale, d’Afghanistan ou de Chine, il est possible d’identifier et de suivre le déplacement de telles personnes même sans visas, explique Timofeï Bordatchev, expert de l’UE et directeur du Centre des études européennes et internationales à l’École supérieure d’économie de Moscou. Chaque personne doit se présenter et s’enregistrer à une dizaine d’endroits, en réservant un vol, un hôtel etc. Et si jamais un immigrant illégal entré en UE par la frontière russe doit être expulsé, il suffira de le remettre aux garde-frontières russes, conformément au nouvel Accord de réadmission entré en vigueur à partir du 1er juin.

Il s’avère qu’aujourd’hui le visa est une formalité inutile, chère, permettant aux services consulaires, aux ambassades et aux entreprises qui y sont associées de gagner un peu d’argent. C’est la raison pour laquelle ils limitent les durées de séjour, refusant de délivrer des visas de longue durée aux personnes ayant fait preuve de viabilité financière et morale.

En prônant le régime sans visa entre la Russie et l’UE, Dmitri Medvedev se montre plus « euro-enthousiaste » que les fonctionnaires belges qui devraient être « euro-enthousiaste » dans leur fonction. Pourquoi la Russie (ainsi que la Biélorussie, l’Ukraine et les autres pays de la CEI) semble être moins « proche » de l’UE qu’une Albanie pauvre et islamisée ? À la différence de l’Albanie, la Russie n’aspire pas à adhérer à l’UE ou à l’OTAN. La Russie propose à l’UE un régime d’entrée pratiqué par l’UE avec une demi-centaine d’autres pays. Ce régime est simple. Il prévoit un séjour dans la zone Schengen d’une durée jusqu’à 3 mois tous les 6 mois.

Les propositions émises par la Russie quant aux visas est une vraie initiative de « partenariat et de modernisation » adoptée au sommet Russie-UE à Stockholm dès novembre de l’année dernière et rappelée à maintes reprises pendant le dernier sommet. La Russie ne cache pas avoir besoin, pour sa propre modernisation, des technologies et des spécialistes européens. Le fameux complexe scientifique Skolkovo est en train d’être créé précisément pour ces invités, que l’on est prêt à payer gracieusement et à libérer des épreuves consulaires. Il s’avère que la Russie est ouverte, et l’UE « hypercivilisée » est fermée. Le centre de réforme européenne (CER), par exemple, a n’a pas recommandé de fournir les technologies européennes aux projets dans lesquels participe l’État russe. Il serait intéressant de savoir où les auteurs de cette proposition ont pu observer en UE un pays dont l’État ne participe pas aux projets de haute technologie.

Le dernier sommet était le 25ème, mais les rencontres entre les chefs de la Russie et de l’UE n’ont toujours pas pris de caractère routinier. De nouveaux éléments perturbateurs apparaissent constamment, comme la guerre en Géorgie, le veto polonais contre les négociations sur un nouvel accord Russie-UE, les problèmes consécutifs sur le gazoduc Sibérie-Allemagne. La Russie est tenue pour responsable de tous ces problèmes par les fonctionnaires européens et la majorité de la presse qui se plaint qu’elle ne veut pas « faire partie de l’Europe », au lieu de reconnaître qu’en règle générale les deux parties sont responsables de tous ces problèmes en commun, et qu’il faut les résoudre ensemble, c’est-à-dire l’UE avec la Russie. C’est alors seulement que ces problèmes, qui en réalité font partie du cadre européen commun, pourront être résolus. La raison est simple. En réalité, la Russie fait partie de l’Europe depuis longtemps, que le veillent ou non les hommes politiques des capitales européennes, y compris Moscou, évidemment.

 

Ce texte n’engage que la responsabilité de l’auteur.

 

 

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