La Russie vue par la presse francophone le 20 avril

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Katyn change la Russie/ Les finances publiques russes ne sont pas en si bon état/ Poutine, mal en point, se montre optimiste pour l'économie russe

Les Echos

Katyn change la Russie

Un endroit maudit comme Katyn peut-il se transformer en une cause d'espoir ? Espoir pour une Pologne globalement unie dans la dignité de son deuil, espoir pour les relations entre la Pologne et la Russie, espoir pour les relations de la Russie avec l'Europe et plus encore avec elle-même ?

En 1940, dans la forêt de Katyn, les Soviétiques, sous l'ordre de Staline, avaient délibérément choisi d'éliminer une partie des élites de la nation polonaise pour « affaiblir » à long terme un peuple voisin qu'ils voulaient avant tout contrôler. En 2010, c'est dans la forêt de Katyn que vient de disparaître une nouvelle fois derrière son président une partie de l'élite polonaise. Et si soixante-dix ans séparent les deux tragédies de Katyn, le temps écoulé est « subjectivement » beaucoup plus court que le temps réel. En effet, pendant plus de quarante ans, le régime soviétique a nié avoir massacré dans la forêt de Katyn plus de vingt-deux mille officiers et intellectuels polonais, imputant la responsabilité de ce crime à la « barbarie nazie ». Pendant toutes les années du régime communiste, de nombreux Polonais, surtout ceux appartenant aux élites du pays, savaient très bien ce qui s'était passé. Mais ils étaient contraints de garder cette vérité au fond d'eux-mêmes, pour ne pas contredire la « vérité officielle ». Katyn était ainsi une plaie démultipliée par le mensonge, la preuve douloureuse que la Pologne une fois de plus ne contrôlait pas son histoire.

Commémorer le passé pour l'exorciser et le dépasser, c'est ce qu'avaient fait dans une cérémonie commune les Premiers ministres russe et polonais, Vladimir Poutine et Donald Tusk, quelques jours avant la tragédie. Mais la Russie est allée, depuis, beaucoup plus loin dans « l'audace émotionnelle » et la confrontation à sa propre histoire. Le dimanche qui a suivi la catastrophe, 30 millions de Russes ont pu voir à la télévision « Katyn », le film du grand réalisateur polonais Andrzej Wajda, qui n'avait été auparavant montré que de manière confidentielle.

La tragédie de 2010 conduirat-elle à une forme de réconciliation historique entre la Russie et la Pologne, une réconciliation que le déni de vérité des Soviétiques sur « Katyn 1940 » rendait impossible ? Aujourd'hui, Moscou, en montrant le film de Wajda sur une chaîne de grande audience accepte enfin pleinement et sans retour possible sa responsabilité historique pour ce crime. Pour la première fois dans son histoire, Moscou semble faire preuve d'empathie pour la douleur de la nation polonaise. La Russie a décrété une journée de deuil national.

Au-delà de sa signification pour l'avenir des relations bilatérales entre Varsovie et Moscou, et au-delà entre Moscou et l'Union européenne, le geste symbolique des dirigeants russes peut avoir des conséquences importantes pour l'avenir de la Russie elle-même. Il faut se garder, certes, de rêver. Vladimir Poutine n'est pas un sentimental et son émotion est calculée. Et pourtant, admettre pleinement la responsabilité des services secrets soviétiques à Katyn, c'est ouvrir un chemin qui conduit directement à Staline lui-même, l'inspirateur du crime. Une Russie qui fait face à son histoire sera-t-elle la même demain ? En se réconciliant avec la Pologne sur son passé, la Russie décide-t-elle aussi de son futur politique sinon de sa géographie, se rapprochant ainsi de l'Union européenne et de ses valeurs, élargissant ainsi vers l'Est le concept clef de réconciliation ?

Certes il ne s'agit que d'un petit pas, en contradiction avec d'autres. Mais il s'est produit quelque chose de nouveau qui traduit peut-être une confiance grandissante de la Russie en elle-même. Depuis la signature du traité START II, elle se sent confortée dans son statut international. Depuis les dernières élections en Ukraine qui ont vu le succès du « candidat de Moscou », elle se sent confortée aussi dans son statut régional. Le 9 mai 2010 à l'occasion du 65 e anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale (sur le front de l'Est), Nicolas Sarkozy et Angela Merkel seront à Moscou à côté des dirigeants russes, et ceci n'est pas un petit symbole.

En Europe, la confiance grandirait-elle à l'Est au moment où elle décline au Sud ?

Le Monde

Les finances publiques russes ne sont pas en si bon état

La Russie va bientôt venir lever de l'argent sur le marché international des capitaux, et elle s'attend à ce que cette émission soit un franc succès. Il est probable que le taux d'intérêt accordé aux investisseurs soit modeste - de l'ordre de 5 % - car les finances du pays sont en apparence solides. En outre, le montant de la dette nationale détenue par les créanciers étrangers ne représente que 3 % du produit intérieur brut (PIB). Certes... mais les projections à plus long terme sont bien moins séduisantes.

Le problème, comme pour une grande partie de l'économie russe, c'est que les variables-clés sont les cours du pétrole et du gaz. La santé de l'Etat et du pays tout entier dépend beaucoup trop du revenu des hydrocarbures. Le secteur fournit environ la moitié des recettes budgétaires de l'Etat. Les dépenses publiques augmentant fortement, le besoin de financement de la Russie est désormais devenu extrêmement sensible aux fluctuations du prix du pétrole.

Avant que la crise économique n'éclate, la Russie enchaînait les exercices budgétaires excédentaires. Or, depuis 2007, les dépenses de l'Etat central exprimées en dollars ont progressé de 50 %, alors que les revenus tirés de l'impôt sont restés quasiment étales. D'après la banque russe Alfa, il suffisait que le baril se négocie à 34 dollars pour que le Kremlin équilibre son budget en 2007. Aujourd'hui, il lui faut un baril à 105 dollars, un prix bien supérieur au cours actuel de 86 dollars. La banque Renaissance Capital a calculé qu'avec un baril à 80 dollars, le déficit budgétaire russe atteindrait déjà 5 % du PIB.

Le résultat, c'est que le fonds de réserve russe, alimenté laborieusement par le produit des taxes pétrolières au fil des ans, arrivera à épuisement fin 2010. Il est vrai que la Russie dispose par ailleurs des 90 milliards de dollars consignés dans le National Wealth Fund, mais ce n'est jamais là que l'équivalent du déficit annuel de base du régime des retraites de l'Etat. Cette année, il faudra quasiment multiplier par deux les transferts budgétaires pour équilibrer ce compte. Ils s'élèveront alors à 4,5 % du PIB.

Le ministre des finances, Alexei Kudrin, reconnaît lui même que la Russie est engagée sur une pente dangereuse. Il a annoncé, début avril, que la dépense publique serait réduite de 20 % d'ici à 2015, et qu'elle resterait stable en termes réels jusqu'en 2020. Mais malgré ce discours volontariste, il faut s'attendre à voir les déficits chroniques s'installer.

Le Point

Poutine, mal en point, se montre optimiste pour l'économie russe

Vladimir Poutine a déclaré mardi l'économie russe en bonne santé, contrairement à lui-même, qui paraissait mal en point alors qu'il aime se montrer au mieux de sa forme.

La récession en Russie est surmontée, a-t-il dit d'une voix tremblante lors d'un discours devant la Douma d'Etat, interrompu par des quintes de toux.
Autre signe de cet état de faiblesse, la traditionnelle séance des questions-réponses avec les parlementaires n'a pas été émaillée des plaisanteries auxquelles le Premier ministre russe a habitué ses interlocuteurs.

Attendu de pied ferme par les milieux bancaires, Poutine a assuré que la croissance économique russe pourrait dépasser cette année la prévision officielle de 3,1%.

"Les résultats provisoires pour le premier trimestre nourrissent l'optimisme. Cela nous autorise à dire que la récession est finie, ce qui ne veut pas dire que la crise est terminée", a-t-il dit.

Poutine, dont les huit ans de présidence ont été marqués par un boom économique ininterrompu, a pris la direction du gouvernement quelques mois seulement avant que la crise financière ne frappe le monde.

L'ancien chef du KGB, qui ne pouvait remplir plus de deux mandats présidentiels successifs, a crédité son gouvernement d'avoir su éviter à son pays un effondrement comparable à la crise financière qu'il avait connue en 1998.

Les investisseurs guettaient dans son intervention de mardi des signes de la façon dont il envisage son avenir politique, mais il n'a fait aucune allusion à l'élection présidentielle de 2012.

Poutine a déclaré que l'Etat russe se devait d'être parcimonieux plutôt que d'accroître la pression fiscale.

Il a annoncé un objectif de réduction de 50% du déficit budgétaire d'ici à 2012, pour le ramener à 3,0 % du PIB, mais il est resté avare sur les chiffres.

Il n'a mentionné à aucun moment l'appréciation du rouble, dans lequel certains économistes voient un obstacle majeur à un retour sur le chemin de la croissance.

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