Nous proposons à votre attention notre rubrique hebdomadaire « Encore un pas dans la lutte contre le terrorisme au Maghreb et au Sahel » et traditionnellement un bref aperçu des événements dans les pays maghrébins.
La capitale algérienne, écrit Alexei Grigoriev, est, semble-t-il, à l'avant-garde de la lutte antiterroriste au Maghreb et au Sahel. Les ministres des AE d'Algérie, de Burkina Faso, de Libye, du Mali, de Mauritanie, du Niger et du Tchad réunis il y a moins d'un mois à Alger ont déterminé les principes de formation d'un front commun de lutte contre le terrorisme et le crime organisé dans ces régions. Ce fut la première réunion dans un tel format et c'est pour ça, probablement, ce qui n'a pas laissé indifférents Washington et Paris. Le président français Nicolas Sarkozy a abordé pendant sa récente visite d'Etat en Amérique le problème du terrorisme au Sahel aux pourparlers avec son homologue américain Barack Obama. Selon les sources officielles, les deux chefs d'Etat suivent de près l'évolution dans cette région infestée par Al Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). Les deux présidents veulent aussi profiter de leur rencontre de Washington pour doper leur coopération dans la lutte contre le terrorisme islamique dans les pays africains du Sahel.
Dès le retour du president à Paris ses proches ont declaré : «Les Américains constatent qu'on connaît la région et veulent qu'on y joigne nos forces » (fin de citation). La réunion des chefs des services spéciaux des Sept du Maghreb et du Sahel tenue cette semaine à Alger est parfaitement logique. Le Maghreb, en premier lieu l'Algérie, ont été il y a plusieurs années à l'épicentre de la lutte contre les groupes radicaux islamiques. Ces groupes ont été évincés, grâce aux opérations efficaces de l'armée et des forces de sécurité algérienne, des régions densément peuplées dans le Sud du pays, au Sahara. Ils n'étaient pas écrasés et ont formé en été 2006 l'Al-Qaïda au Maghreb islamique. Les pays du Sahel, avant tout le Mali, le Niger et le Tchad ont constitué, de ce fait, le rempart des fondamentalistes. Ce groupe a intensifié ses attaques en Mauritanie faisant partie du Maghreb. Les terroristes se sont déplacés et il a fallu réunir les efforts des quatres pays avec l'Algérie dotée d'un potentiel militaire et d'expérience de lutte antiterroriste beaucoup plus important. L'Algérie joue le rôle principal dans la formation d'un front antiterroriste commun, notamment au Sahel. Le Maroc est resté à l'écart de cette lutte. Rabat attribue ce fait aux divergences de longue date avec l'Algérie à cause du soutien du Front POLISARIO dans le conflit autour du Sahara occidental. Quoi qu'il en soit, Rabat s'est montré mécontent que l'Algérie n'avait pas invité le Maroc aux réunions des Sept. Les terroristes profitent sans doute des divergences entre ces deux grands pays de la région et déploient leurs activités dans le dénommé « triangle gris » du Sahara et du Sahel ou se croisent les régions frontalières d'Algérie, du Mali et de Mauritanie. Les délégués à la récente réunion à Alger ont réussi à régler le conflit diplomatique entre les trois pays surgi après la décision du gouvernement malien de mettre en liberté quatre commandos d'Al-Qaïda en échange de la libération de l'otage français Pierre Carmatte. Nouakchott et Alger ont même révoqué leurs ambassadeurs ayant réaffirmé qu'au lieu du marchandage avec les terroristes, il fallait employer la force. Pour reprendre l'expression d'un délégué à la réunion, « nous avons crevé l'abcès ». « Le passé est le passé, avançons maintenant la main dans la main », a lancé un responsable libyen. L'axe Bamako-Nouakchott-Alger devrait donc mieux fonctionner, et les sept pays présents à la rencontre d'Alger explorent au moins deux pistes : la création d'un grand fichier où vont figurer groupes terroristes, bandes de criminels et trafiquants de tout poil à traquer dans la zone, ensuite la rapidité en matière de partage d'informations. Autrement dit, les Sept ont fait un pas important vers la formation d'une stratégie commune de lutte contre l'insécurité dans la zone. Dans la bande sahélo-saharienne l'information est capitale pour la lutte contre le terrorisme et le crime organisé. Les groupes qui écument cette vaste zone sont très mobiles, très organisés et lourdement armés. Ainsi, les rapports de confiance entre les services de sécurité des sept pays de la region constituent un pas important vers l'échange de données sur les manoeuvres et le déplacement des groupes de commandos sur leur territoire et le passage des frontières. Selon certains experts, les efforts conjoints tombent bien à propos vu le danger de rapprochement de l'AQMI avec les groupes d'extrémistes islamiques en Somalie, notamment avec Ach-Chabab, le groupe le plus actif lié via le Yémen au terroriste numéro un Ossama Ben Laden lui prêtant le concours financier. Un danger encore plus sérieux a surgi sur le flanc Ouest du front antiterroriste commun : le regain d'activité du radicalisme et de l'extrémisme islamique dans les Etats musulmans du Nigéria attenant aux pays du Sahel. Il convient de rappeler dans ce contexte les propos du président sénégalais Abdoulaye Wade ayant dit au récent sommet de l'UA à Addis-Abeba que seuls les efforts réunis de tous les pays concernés, notamment non africains, permettraient de prévenir la transformation de plusieurs régions du continent en un « désert terroriste ».