Les Russes en Slovaquie: ne pas oublier l’histoire

© Sputnik . Alexander SmotrovBratislava
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La visite du président russe Dmitri Medvedev en Slovaquie et en République tchèque constitue pour les citoyens des pays de l’ancien Pacte de Varsovie la première possibilité de mieux connaître le chef de l’État russe et de savoir quel est son avis.

La visite du président russe Dmitri Medvedev en Slovaquie et en République tchèque constitue pour les citoyens des pays de l’ancien Pacte de Varsovie la première possibilité de mieux connaître le chef de l’État russe et de savoir quel est son avis.

Cela est d’autant plus important que c’est avec les pays de cette région que la Russie connaît ces dernières années des querelles concernant le présent et le passé. Le fait que le président russe ait décidé de commencer par la Slovaquie les 6 et 7 avril est symbolique. En effet, ce pays, de même que la République tchèque et l’Autriche, fut la première victime de l’expansionnisme hitlérien.

La création, en 1939, de la « Première République Slovaque » indépendante de nom et imposée aux Slovaques par les hitlériens n’était qu’un trompe-l’œil. Les dirigeants de cette "république" avaient beau se qualifier de chrétiens et se targuer d’avoir accédé à la "souveraineté", il n’y avait rien de chrétien et de souverain dans leur collaboration avec les hitlériens. Les soldats soviétiques surent le degré réel de sympathie des Slovaques pour les nazis en août 1944 lorsque les Slovaques entreprirent, parallèlement à l’insurrection de Varsovie, de se débarrasser eux-mêmes de l’occupation allemande. Malheureusement, leur insurrection devait échouer, mais les survivants de la Résistance slovaque rejoignirent les troupes de l’Armée Rouge qui lançait une offensive sur Bratislava où ils entrèrent, ensemble, voila 65 ans.

Les statistiques soviétiques évaluent les pertes essuyées par l’Armée rouge lors de la libération de l’ancienne Tchécoslovaquie à 140000 hommes, dont au moins 60000 furent tués en Slovaquie. Les Slovaques ne l’ont pas oublié. A la différence de la République tchèque et de la Pologne, presque tous les monuments érigés en Slovaquie aux combattants soviétiques ont été conservés, on peut voir à Bratislava les plaques commémoratives désignant les lieux des combats les plus cruels. Les historiens et les journalistes locaux estiment de façon unanime que les soldats soviétiques ont apporté à la terre de Slovaquie la seule chose qu’ils pouvaient: l’affranchir du joug nazi. Ils ne pouvaient pas apporter une solution à tous les problèmes, à savoir prospérité économique et liberté totale, puisque ces bienfaits n’existaient alors pas dans leur pays, mais ils ont apporté la délivrance de la plus grande menace qui planait alors sur l’Europe: la domination prolongée du nazisme. Aujourd’hui, on oublie souvent l’alternative à notre victoire commune. Pour ne pas oublier, je voudrais citer les livres d’historiens occidentaux nullement susceptibles de vouloir "réhabiliter" le bolchevisme.

« Hitler a toujours affirmé que les Slaves, en tant que population de race inférieure, devaient procurer aux Allemands l’espace vital et des ressources naturelles dans l’Est … Ce sujet était cher au cœur de nombreux Allemands. Ce mythe rappelant les croisades fut utilisé en vue de justifier des cruautés plus terribles que n’importe autre mythe de l’histoire ». C’est ce qu’on lit dans la Brève histoire du monde de John Morris Roberts, l’un des historiens britanniques les plus prestigieux.Il est à remarquer qu’en réfléchissant à ses plans relatifs aux peuples de l’Est, Hitler avait toujours parlé des Slaves comme d’un seul tout, sans faire de distinctions entre les Slovaques, les Russes, les Polonais ou les Ukrainiens. Inutile de présenter ces plans en détail, ils sont bien connus et ne sont pas contestés par les historiens. Le calcul jusqu’à 100, la lecture dans les limites de la compréhension des panneaux routiers, la vaccination forcée pour que les Slaves n’infectent pas la race allemande "supérieure" et un peu de religion en guise de consolation. Ça, c’était pour les vivants, mais, à la moindre résistance, il était prévu de liquider une immense partie de la population. La deuxième moitié du XXème siècle, malgré toutes ses imperfections, les difficultés, voire malgré ses tragédies, est incommensurablement meilleure que la perspective prévue pour les Slaves par le führer.

C’est dans cette optique qu’il convient de considérer les événements d’il y a 65 ans. Bien entendu, la liberté ne vint pas d’emblée. Mais, comme l’a écrit l’historien américain Erich Goldhagen, « si, sous le pouvoir des nazis, on pouvait écrire sur la porte de l’Europe la sentence de Dante "Abandonne toute espérance", même le plus grand pessimiste n’aurait jamais laissé cette inscription sur la porte du monde communiste ». Les sociétés russe, slovaque, polonaise et d’autres sociétés de l’Europe de l’Est se sont avérées capables de se réformer elles-mêmes. Même si ce n’était pas tout de suite, en fin de compte cela a eu lieu. La Russie a été parmi les premiers à reconnaître le nouvel État slovaque indépendant né en 1993. Le chiffre d’affaires des échanges commerciaux entre nos pays a atteint ces dernières années 5,5 milliards de dollars US et la Russie a salué l’adhésion de la Slovaquie à l’Union européenne, dans le cadre de laquelle nous continuons à entretenir une coopération économique et culturelle.

Ce texte n’engage que la responsabilité de l’auteur.

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