La seconde mort de Egor Gaïdar

© RIA Novosti . Vladimir Fedorenko / Accéder à la base multimédiaEgor Gaïdar
Egor Gaïdar - Sputnik Afrique
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L’annonce de la mort survenue hier mercredi 15 décembre de Egor Gaïdar ressemble à un non-événement. Il est vrai qu’à la suite de la crise de 1998, nombre des idées défendues, parfois avec talent, souvent avec beaucoup d’obstination et parfois avec mauvaise foi par Gaïdar ont disparu de la scène politique en Russie. Si l’on se souvient de lui, c’est certainement pour le résultat, plus que discutable, des réformes qu’il a impulsées.

L’annonce de la mort survenue hier mercredi 15 décembre de Egor Gaïdar ressemble à un non-événement. Il est vrai qu’à la suite de la crise de 1998, nombre des idées défendues, parfois avec talent, souvent avec beaucoup d’obstination et parfois avec mauvaise foi par Gaïdar ont disparu de la scène politique en Russie. Si l’on se souvient de lui, c’est certainement pour le résultat, plus que discutable, des réformes qu’il a impulsées.

Il prétendait avoir mis fin au soviétisme, mais le système soviétique était bel et bien mort avant qu’il ne vienne au pouvoir.

Pourtant, le cas de Gaïdar est assez emblématique de la « Révolution Générationnelle » qui emporta la Perestroïka à la fin des années 1980 et au début des années 1990. Gaïdar était entré dans la politique russe protégé par le nom de son père et de son grand-père. Il en tirait une certaine gloire, du moins en 1988 et 1989. Ses connaissances économiques étaient plus que sommaires. L’auteur de ces lignes fut effaré par des conceptions économiques à peine dignes d’un étudiant de première année. Elles se combinaient cependant ce trait qui n’était pas sans rappeler les jeunes staliniens du début des années trente, prêts à faire le bonheur de l’humanité fut-il dans son sang.

Il se jeta avec enthousiasme dans la lutte politique, porté justement par ce mouvement générationnel dont il reste, avec Anatoly Tchoubaïs, certainement le représentant le mieux connu.

Son nom reste associé largement aux réformes de 1992 et des années qui suivirent. Son dédain alors affiché pour les institutions – mais on doit lui reconnaître qu’il su évoluer – le conduisit à la grande catastrophe économique de 1992 et 1993. Son libéralisme aurait pu être estimable, s’il ne s’était accompagné d’une obstination dangereuse dans l’erreur, qui souvent conduisit le pays au bord de l’abîme et de la guerre civile.

Il fut haï par les uns et adulé par les autres. Mais les premiers furent de loin plus nombreux que les seconds. Il n’en avait cure, persuadé que la politique économique était une science exacte et ne se décidait pas de manière démocratique. En ceci, il était bien l’héritier de ce que le régime communiste avait produit de pire, le scientisme combiné à l’autoritarisme. Il avait simplement remplacé le marxisme-léninisme stalinien par la pensée de l’école de Chicago. Sa connaissance de la théorie économique était trop courte pour saisir les contradictions qui minaient ceux qu’il appelait ses maîtres. Sa certitude d’avoir raison, envers et contre tous, le conduisit à refuser toute alternative et le mena à une impasse intellectuelle.

Il ne su pas voir cependant que son œuvre portait en elle-même sa condamnation. Il fut surpris par la crise de 1998 mais plus encore par le changement politique que représenta l’arrivée de Vladimir Poutine au pouvoir, et la marginalisation des forces libérales qui s’en suivit. En ceci, cette crise a correspondu à la mort idéologique de Egor Gaïdar.

Il est frappant que là où il cherchait des soutiens et des alliés, essentiellement dans la politique économique de Reagan aux Etats-Unis et de Thatcher en Grande-Bretagne, nous sommes aujourd’hui enclin à voir des échecs historiques. C’est bien dans l’évolution économique de ces deux pays à cette époque que se trouvent les racines de la crise de 2007-2008, dite encore crise des « subprimes ».

Cette crise fait écho à celle de 1998 en Russie et montre les limites de l’ultra-libéralisme qu’il a défendu.

Les idées auxquelles Gaïdar avait attaché son nom ont été largement discrédité par la manière dont il les a appliquées et par leurs résultats. Elles correspondaient au contexte idéologique des années 1980 mais elles n’ont probablement plus leur place dans le monde issu de la crise de 1998, ou un Stiglitz et un Krugman ont eu le prix Nobel.

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