L'adoption par la Chambre des représentants du Congrès américain d'un projet de loi sanctionnant les sociétés étrangères qui livrent des hydrocarbures en Iran est la dernière tentative de persuader Téhéran de renoncer à son programme nucléaire, a estimé mercredi Vladimir Sajine, expert de l'Institut russe de l'économie mondiale.
"Il est clair qu'il s'agit d'une réaction au refus iranien de faire des compromis. Mais les conséquences principales sont à prévoir à la fin de janvier 2010, lorsque les Six (médiateurs internationaux pour le dossier iranien) se réuniront pour discuter des sanctions concrètes. Je considère qu'ils adopteront des sanctions et que les Américains préviennent ainsi d'avance les Iraniens", a indiqué M.Sajine à RIA Novosti.
NOUVELLES SANCTIONS
Le nouveau document américain étend l'action de la loi qui permet de sanctionner les entreprises qui entendent investir plus de 20 millions de dollars dans le secteur énergétique iranien. Le Sénat américain doit aussi l'approuver pour que la loi soit promulguée.
La Russie n'est pas touchée par ces mesures. "Nos sociétés n'exportent pas d'essence vers l'Iran. Nous y réalisons des projets d'exploitation de gisements et cela nous pose des problèmes. Conformément à une loi américaine concernant l'Iran, nous sommes obligés de signer des contrats inférieurs à 20 millions de dollars, c'est une somme très modeste", a ajouté M.Sajine.
Les sanctions américaines peuvent porter un coup dur à l'économie iranienne. L'Iran est un producteur de pétrole, mais il est obligé d'importer plus de 40% de son essence par manque d'infrastructures de raffinage des hydrocarbures.
SITUATION POLITIQUE EN IRAN
Selon Nina Mamedova, chef du département Iran de l'Institut russe des études orientales, les nouvelles sanctions provoqueront une hausse des prix. Mais "cette pression" ne fera que rendre les dirigeants iraniens plus populaires dans leur pays. "Je crois que la tension ne nuira pas au gouvernement mais plutôt à l'opposition qui souhaite nouer des liens avec les Etats-Unis et modifier la politique extérieure iranienne. Les pressions exercées sur l'Iran démontreront que M.Ahmadinejad avait raison, qu'il défend la fierté nationale contre les Etats-Unis. Cela n'entraînera pas une crise économique, mais unira les Iraniens face aux méchants Américains qui ne leur donnent pas d'essence", a indiqué Mme Mamedova.
LA CHINE ET L'IRAN
Les Etats-Unis "oeuvrent depuis longtemps pour obtenir la réduction des livraisons d'hydrocarbures à Téhéran. En été dernier, ils ont notamment cessé de vendre de l'essence à deux sociétés - indienne et britannique - qui fournissaient de l'essence en Iran. Cela a réduit de 40% les exportations d'essence vers l'Iran, mais les sociétés chinoises ont complètement comblé ce déficit", a rappelé mercredi Vladimir Evseïev, expert de l'Iran à l'Institut russe de l'économie mondiale et des relations internationales.
"La Chine peut remplacer les Etats-Unis et d'autres pays sur le marché iranien. Si la Chine ne soutient pas les sanctions, ce sera inefficace. (…) Tout dépend de la Chine qui est en train de peser les pour et contre", à son avis.
La Chine, qui reçoit de Téhéran entre 11% et 14% de tout son pétrole importé, a des intérêts économiques en Iran. Selon les analystes politiques, Pékin a un mois pour réfléchir, la rencontre des Six médiateurs internationaux consacrée aux sanctions se tiendra fin janvier 2010.