Les ambitieux plans de la Russie de diversification de livraison du gaz en Europe se concrétisent. A la fin de la semaine dernière, les autorisations nécessaires pour construire le gazoduc Nord Stream passant par le fond de la mer Baltique en Allemagne ont été reçues des pays de l'Europe du Nord.
Le 10 novembre, le président russe Dmitri Medvedev et le chancelier autrichien Werner Faymann ont débattu de l'élaboration d'un accord sur un projet encore plus grandiose: celui de gazoduc South Stream. De plus, on a appris que la Slovénie avait l'intention de signer avec la Russie dans les prochains jours un accord sur le passage du gazoduc South Stream par son territoire.
Le projet de gazoduc South Stream prévoit des livraisons de gaz russe par la mer Noire en Europe du Sud et en Europe centrale. Ses principaux participants sont Gazprom russe et le consortium italien ENI. Conformément aux ententes récemment intervenues entre la Russie et la Turquie, le tronçon sous-marin de la mer Noire du gazoduc traversera les zones économiques exclusives russe et turque.
Il n'est pas exclu qu'à cause de la position de la Bulgarie exigeant une révision des anciens accords russo-bulgares dans le domaine du pétrole et du gaz, le tronçon de la mer Noire de South Stream passe de la cote russe jusqu'à la cote turque, et non bulgare, comme cela était prévu.
Ensuite, South Stream empruntera deux voies : via la Grèce et le fond de la mer Adriatique en Italie; via la Grèce, la Serbie et la Hongrie en Autriche. Les accords de construction du gazoduc South Stream sur leur territoire ont déjà été signés avec tous ces pays, sauf l'Autriche.
La mise en service du gazoduc est prévue pour 2015. Son rendement maximal sera de 63 milliards de m3 de gaz par an.
Le chemin vers le futur accord avec l'Autriche sur South Stream n'a pas été facile. L'Autriche a été et reste l'un des principaux promoteurs du gazoduc alternatif Nabucco, grâce auquel l'Union européenne espère réduire sa dépendance vis-à-vis du gaz russe.
Mais puisque l'alimentation de Nabucco par le gaz reste jusqu'à présent en question, alors que South Stream aura des livraisons garanties de gaz russe, Vienne ne renoncera certainement pas à sa chance d'accueillir les deux gazoducs paneuropéens sur son territoire.
Le dialogue énergétique russo-autrichien a été compliqué par la tension observée ces derniers temps dans les rapports entre les partenaires de longue date: Gazprom russe et la compagnie gazière autrichienne OMV. Les compagnies n'ont pas respecté leur accord de coopération. Néanmoins, elles poursuivent les négociations sur une coopération ultérieure. Leur accélération doit être favorisée par les pourparlers entre les dirigeants des deux pays à Moscou.
Le Kremlin considère la mise en oeuvre du projet de South Stream comme l'orientation stratégique de la coopération russo-autrichienne dans le domaine énergétique. Selon Moscou, la Russie et l'Autriche estiment unanimement que ce projet destiné à diversifier les itinéraires des livraisons de ressources énergétiques en Europe contribuera à un approvisionnement énergétique stable de l'Europe et assurera un transit sans entraves de gaz naturel russe vers les consommateurs européens.
L'accord intergouvernemental sur la construction commune du secteur autrichien du gazoduc South Stream est en voie d'élaboration.
Mais les responsables de Gazprom se sont assuré dès l'année dernière le soutien des dirigeants politiques de la Slovénie à South Stream. De même que dans le cas de l'Autriche, les pourparlers avec la Slovénie ont traîné, sans doute parce que les livraisons de gaz russe à la Slovénie sont insignifiantes et, d’autre part, parce que ce pays avait également assuré son soutien au projet alternatif de Nabucco.
Cependant, le gouvernement slovène a fait, au dernier moment, un coup de maître en acceptant de construire un secteur de South Stream sur son territoire qui atteindra l'Italie du Nord et qui fera de la Slovénie un pays important de transit gazier. Il était initialement prévu que le gaz de South Stream acheminé en Italie du Nord passe par l'Autriche qui dispose du plus important noeud de transport de gaz en Europe (hub). A présent, le nœud de Baumgarten sera le point final d'un autre embranchement de South Stream.
La Slovénie est disposée à signer un accord intergouvernemental avec la Russie sur South Stream samedi 14 novembre à Moscou. La partie russe confirme qu'elle signera avec la Slovénie ce document prévoyant la construction sur le territoire slovène du gazoduc d'un rendement de plus de 10 milliards de m3 de gaz par an. A cette fin, Gazprom créera une coentreprise (détenue à parité de 50 % à 50%) en Slovénie.
Par conséquent, à la suite de nouvelles manœuvres gazières en Europe, South Stream aura non pas deux extrémités, comme prévu (dans le Sud et le Nord de l'Italie), mais aussi le troisième, en Autriche, et englobera l'Europe de trois côtés.
Auteur: Oleg Mitiaïev, RIA Novosti.
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