Les Kurdes irakiens: pas de séparatisme à l'horizon

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Par Andreï Mourtazine, RIA Novosti

Par Andreï Mourtazine, RIA Novosti

Les élections législatives dans le Kurdistan irakien, prévues pour le 25 juillet, constituent un événement de portée régionale, qui n'aura aucun impact sur la situation géopolitique dans le monde. Le parlement kurde est encore très jeune: il n'a été formé qu'en 1992 et, en raison de la situation politique intérieure et extérieure défavorable, les élections ne se sont tenues dans la région que deux fois, en 1992 et en 2005.

Pour l'instant, il n'existe au Kurdistan irakien que deux figures charismatiques qui exercent une influence réelle sur la politique mondiale. Il s'agit de l'actuel président irakien, Jalal Talabani (76 ans), et de son principal concurrent, Massoud Barzani (63 ans), leader du Parti démocratique du Kurdistan et chef de la région autonome du Kurdistan (qui réunit trois provinces du nord de l'Irak: Erbil, Suleimaniyah et Dohuk). Ces deux hommes politiques contrôlent presque à égalité 80 des 111 sièges du parlement du Kurdistan. Le reste des sièges est réparti entre de petits partis et mouvements. Aucune surprise n'est à attendre de ces élections, le rapport des forces devant probablement demeurer inchangé.

A l'heure actuelle, les Kurdes irakiens ne cherchent pas à se séparer du gouvernement central de Bagdad. Ils n'ont pas besoin de l'indépendance. D'autant plus que l'un des leaders kurdes est devenu président du pays. Les Kurdes d'Irak sont aujourd'hui dans une situation bien meilleure que celle de leurs frères en Turquie, en Iran ou en Syrie. Après avoir survécu au génocide de Saddam Hussein, qui a tué 200.000 des leurs, selon Jalal Talabani, les Kurdes, qui étaient jadis une classe marginale, constituent à présent la deuxième force la plus influente du pays, après les chiites.

Le niveau de vie au Kurdistan irakien est beaucoup plus élevé que dans d'autres provinces de l'Irak. Après la "Tempête du désert" de 1991, le Kurdistan est devenu une sorte d'"Etat dans l'Etat", qui n'était plus contrôlé que formellement par Bagdad. Saddam Hussein avait été contraint d'appliquer la résolution 688 de l'ONU, interdisant la présence des troupes irakiennes dans cette région et son survol par l'aviation militaire irakienne. Dans le même temps, les Kurdes ont développé un commerce actif avec la Turquie et l'Iran, ce qui leur a permis de vivre assez bien.

Du point de vue géopolitique, les Kurdes irakiens ont été et demeurent de fidèles alliés de Washington. Non seulement parce que les Etats-Unis les ont affranchis du dictateur sanguinaire, mais aussi parce que les Américains n'ont pas entrepris de "démocratiser" les élites politiques kurdes: ils les ont acceptées "telles quelles", reconnaissant la légitimité des deux principaux partis kurdes et de leurs leaders.

Le principal problème des Kurdes, aujourd'hui, consiste à maintenir l'équilibre politique au Kurdistan et à éviter une nouvelle guerre intestine pour l'influence au Kurdistan.

L'actuelle alliance entre Jalal Talabani et Massoud Barzani satisfait non seulement les Américains, mais aussi les voisins de l'Irak, à savoir la Turquie, l'Iran et la Syrie. Ankara s'entend bien avec l'actuel président irakien, qui a pratiquement donné carte blanche à la Turquie pour éliminer les combattants du Parti des travailleurs du Kurdistan qui se cachent dans les montagnes, à la frontière turco-irakienne. Le leader du Parti des travailleurs du Kurdistan, Abdullah Ocalan, est détenu dans une prison turque.

Téhéran mène son propre jeu mais ne veut pas non plus déséquilibrer la situation. La Syrie, quant à elle, ne prend aucune initiative concernant les Kurdes irakiens. Elle se satisfait du statu quo actuel: les Kurdes syriens n'ont jamais réclamé trop fort leur autonomie ni dénoncé la politique de Damas.

Les opinions exprimées dans cet article sont laissées à la stricte responsabilité de l'auteur.

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