Oleg Iankovski

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Il a disparu le 2O mai. C’était un grand acteur, l’aristocrate du cinéma russe. Bel homme, grand et mince, qui a hérité ses manières et son charme particulier de son père, représentant de la noblesse polonaise.
Il a disparu le 2O mai. C’était un grand acteur, l’aristocrate du cinéma russe. Bel homme, grand et mince, qui a hérité ses manières et son charme particulier de son père, représentant de la noblesse polonaise.
C’était un symbole de l’époque soviétique : idéaliste et romantique, il faisait figure à part dans la vie morne et mesquine. Dans les années 9O, il s’est bien inscrit dans le décor des temps nouveaux : élégant et aristocratique, il marqua de son empreinte le festival du film « Cynotaure » , dont il devint le directeur. Au deuxième millénaire, il fit ses débuts comme réalisateur.
Des décennies de popularité extraordinaire. Un charme indéfinissable émanait de sa personne et le faisait rechercher par les femmes : quand son théâtre était en tournée, ses admiratrices portaient sa voiture à bout de bras et enviaient toutes les femmes qui étaient ses partenaires dans les films.
« Personne n’échappait à son charme : collègues, amis, spectateurs, dit la célèbre actrice Inna Tchourikova. Lorsqu’il apprit qu’il était gravement malade, il continuait à se comporter comme si de rien n’était, comme s’il avait un rhume banal, et non une maladie mortelle ».
Comme toutes les personnes nées sous le signe des Poissons, il était enclin à un certain mysticisme. Il se souvenait toujours de ses rêves, croyait aux présages : cherchait à éviter les chats noirs, touchait du bois. Il avait apparemment toutes les raisons de se fier aux signes du destin, car il y avait quelque chose qui semblait le guider dans la vie…
Iankovski a joué une centaine de rôles : maris, amants, tsars, nobles et scélérats. Il en a aussi refusé beaucoup : « Je n’aurais jamais pu jouer Staline, parce qu’on ne peut pas entrer dans la peau du personnage, qui ne suscite aucune compassion ». Homme de confiance du premier président russe Boris Eltsine, il dit un jour : « j’aurais accepté volontiers de devenir homme de confiance de Poutine, si l’on m’avait proposé. Mais si je pensais que nous n’avons pas besoin d’un tel président, je l’aurais refusé »
Enfant, il connut le froid et la faim, bien qu’il vît le jour dans une famille aisée. Son père, officier blanc, fut relégué avec sa famille au Kazakhstan ; arrêté plus tard, il fut envoyé au GOULAG, et sa mère resta seule pour élever ses trois fils.
Iankovski était toujours fier d’être acteur et considérait que ce métier lui était donné par Dieu. « Je n’arrive pas à m’endormir avant le spectacle, j’ai toujours le trac. Pendant le spectacle, j’écoute le silence de la salle et je pense : il y a probablement là un grand savant, qui sait beaucoup plus que moi, comment pourrais-je l’étonner ? Et pourtant, le voilà qui pleure ».
Iankovski considérait toujours sa famille comme la plus grande réussite de sa vie. Il disait que s’il lui était donné de choisir entre la carrière et la maison, il aurait choisi la deuxième. Il est parti, laissant un fils, l’épouse avec laquelle il a eu 4O ans de bonheur, et deux petits-enfants.
Comme aucun autre, Iankovski savait garder le silence à l’écran avec une expression détachée, tantôt triste, tantôt ironique. Son silence n’est pas une pause, mais toujours un moment de vérité. On se souvient de l’expression concentrée de son personnage qui porte une bougie à travers un grand espace, balayé par un vent humide, dans le film de Tarkovski « Nostalguia ». Cette flamme de bougie est le gage du salut, du sien et de toute l’humanité. Il doit la porter d’un bout à l’autre et veiller à ce qu’elle ne s’éteigne pas
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