Les camps de concentration nazis: l'enfer du XXe siècle

S'abonner
Par Ilia Kramnik, RIA Novosti
Par Ilia Kramnik, RIA Novosti

Le 11 avril 1945, une insurrection des détenus eut lieu dans le camp de la mort de Buchenwald. Pour échapper à l'extermination, les détenus s'emparèrent d'une bonne partie du territoire du camp et réussirent à résister jusqu'à l'arrivée des troupes américaines, qui en chassèrent les unités SS. En souvenir de cette insurrection, le 11 avril on célèbre la Journée internationale de la libération des détenus des camps de concentration nazis, qui rappelle à l'humanité qu'existèrent ces "fabriques de la mort". De même, on se souvient de l'Holocauste le 27 janvier, jour de la libération par les troupes soviétiques du complexe concentrationnaire des camps d'Auschwitz-Birkenau, plus connu sous l'appellation de camp de concentration d'Auschwitz (Oswiecim).

L'Homo Sapiens, en tant qu'espèce biologique, ne s'est jamais distingué par la douceur de son caractère ni son végétarisme. Il est même devenu, en fin de compte, le rapace le plus dangereux de la planète. Mais, sur la toile de fond de toute l'histoire longue et sanglante de l'humanité, le XXe siècle restera comme celui des déportations, déplacements et détentions les plus massifs et, enfin, comme celui de l'extermination la plus massive de l'homme par ses semblables, entre autres, dans les camps de concentration.

Ces camps n'ont pas été inventés par les nazis. Les prototypes des camps de concentration apparurent pendant la guerre civile de 1861-1865 aux Etats-Unis. Les premiers camps de concentration classiques, et leur appellation même, firent leur apparition pendant la guerre anglo-boer de 1899-1902. La création de ces camps avait pour but de priver d'approvisionnement les groupes de combattants boers. Dans ces camps, on détenait les familles de fermiers qui avaient fourni des produits alimentaires aux guérillas boers. La majeure partie des détenus, victimes de la sous-alimentation chronique, mourut de faim.

Les camps de concentration connurent un développement pendant la Première guerre mondiale, notamment en Turquie et en Autriche-Hongrie où, respectivement, les Arméniens et certains peuples slaves furent l'objet d'un génocide.

La Russie n'a pas échappé à cette "honte du siècle". Un cataclysme social monstrueux et la destruction des fondements de l'Etat eurent pour conséquence l'apparition des camps, qui furent un des traits distinctifs de la première moitié de la période soviétique de l'histoire de notre pays. Les camps du GOULAG (direction principale des camps de travail) poursuivaient un double objectif: politique - isoler (ou exterminer) les personnes non loyales envers le nouveau régime -, et économique - utiliser largement le travail des détenus pour la construction d'ouvrages importants, comme les canaux et les voies ferrées.

Cependant, toutes ces inventions, qu'elles soient soviétiques, britanniques, turques ou autres, ne sont en rien comparables, par le niveau d'organisation et la monstruosité, au système des camps de concentration du IIIe Reich, qui furent l'un des principaux moyens de réalisation des plans nazis visant à édifier un "nouvel ordre mondial".

Dans l'Allemagne hitlérienne, des camps de concentration firent leur apparition aussitôt après l'arrivée des nazis au pouvoir, mais ce système s'épanouit tout particulièrement pendant la Seconde guerre mondiale.

Les camps datant de cette période peuvent être divisés en deux catégories. La première catégorie comprend les camps dits de travail, qui avaient pour principal objectif de faire réaliser des travaux et de fabriquer les produits nécessaires pour l'économie du pays. Des millions de personnes y furent envoyées. Un grand nombre de détenus y décédèrent en raison des conditions affreuses de détention et du travail exténuant. Mais les "camps de travail" n'avaient pas pour objectif d'exterminer le plus grand nombre de personnes. C'était la tâche des établissements d'un autre type: les camps de la mort.

Les camps de la mort étaient destinés à exterminer les représentants des races de "sous-hommes", qui devaient être éliminés conformément à la conception de l'"hygiène raciale" adoptée dans l'Allemagne hitlérienne. Plus de la moitié des 6 millions de Juifs d'Europe et d'URSS exterminés par les hitlériens trouvèrent la mort dans les camps d'extermination. Quatre millions de Russes, des centaines de milliers de représentants d'autres ethnies de l'URSS (sur plus de 27 millions de victimes de la guerre), quelque 200.000 Tziganes, un grand nombre de Serbes, de Polonais et de représentants d'autres peuples furent victimes des camps.

Treblinka, Belzec, Majdanek, Sobibor, Helmno, une partie considérable des camps du complexe d'Auschwitz-Birkenau et d'autres camps faisaient partie de ce système d'extermination massive, qui prit une envergure industrielle et fut organisé méticuleusement. Les détenus étaient abattus au moyen d'armes à feu, asphyxiés dans des chambres à gaz, tués lors d'expériences médicales inhumaines, ou simplement battus à mort. A la fin de la guerre, des camps de "travail", tel celui de Buchenwald, furent également transformés en camps de la mort.

Les Juifs, les Tziganes et les prisonniers de guerre soviétiques, et en premier lieu les Russes, furent traités avec une cruauté particulière. L'extermination des "ennemis du Reich" fut menée non seulement dans les camps allemands, mais aussi dans des "établissements" créés par des formations de collaborationnistes, par exemple, dans le camp croate de Jasenovac et le camp letton de Salaspils.

Les camps de concentration faisaient partie du système des services de sécurité nazis SD et SS, mais d'autres organisations participèrent également à l'extermination massive. Un nombre considérable de prisonniers de guerre soviétiques périt non pas dans les "fabriques de la mort" du type d'Auschwitz, mais dans les Stalags de la Wehrmacht (camps pour les prisonniers de guerre). La détention des soldats des armées occidentales dans ces camps était plus ou moins conforme aux conventions internationales. Mais, pour les prisonniers soviétiques, ces camps furent souvent des centres de filtration entre les camps de travail et ceux d'extermination.

Les héritiers des nazis et leurs acolytes affirment souvent que cette extermination aussi cruelle des prisonniers soviétiques s'expliquait par le fait que l'URSS n'avait pas signé la Convention de Genève de 1929, mais ils passent sous silence deux choses. Premièrement, l'Union Soviétique avait adhéré à cette convention en 1931 par une déclaration spéciale signée par Maxime Litvinov, Commissaire du Peuple aux Affaires étrangères. Deuxièmement, la Convention de Genève obligeait les Allemands, qui y avaient adhéré dès le début, à respecter ses règles et ses normes, indépendamment de l'adhésion (ou non) de leurs adversaires.

La fin de la guerre fut la période pendant laquelle les détenus furent traités le plus cruellement. Les hitlériens se mirent à les exterminer pour dissimuler les traces de leurs crimes. Dans les camps situés près du front, les insurrections des prisonniers devinrent de plus en plus fréquentes: ces hommes et ces femmes voués à la mort espéraient s'emparer des armes et tenir jusqu'à l'arrivée des troupes soviétiques ou des alliés occidentaux. L'une de ces insurrections eut lieu dans le camp de concentration de Buchenwald.

Les crimes des nazis ont été pesés, mesurés, comptabilisés. Les principaux responsables ont été pendus ou fusillés. Mais, malheureusement, la pratique de la détention sans aucune forme de procès et des tortures dans les camps n'a pas disparu avec les cendres des leaders du IIIe Reich. Aujourd'hui, d'aucuns, dont l'idéologie repose, pourrait-il sembler, sur la valeur absolue que constituent les droits et libertés de l'homme, en reviennent aux vieilles recettes (bien que ce ne soit pas, bien sûr, sur la même échelle ni dans les mêmes buts). Il n'est que de mentionner la prison d'Abou Ghraib (Irak) ou le camp de Guantanamo (Cuba).

Les opinions exprimées dans cet article sont laissées à la stricte responsabilité de l'auteur.

Fil d’actu
0
Pour participer aux discussions, identifiez-vous ou créez-vous un compte
loader
Chat
Заголовок открываемого материала